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Avez-vous de la chance ?

Publié le 23 janvier 2015 par Dubruel

d'après " COCO, COCO, COCO FRAIS ! " de Maupassant

Mon oncle avait expiré sereinement.

Cet après-midi de juillet était brulant,

De la rue, monta un cri : -" Coco frais, coco !

Rafraichissez-vous ! Qui veut du coco ? "

Le notaire ouvrit le testament.

Mon cousin héritait naturellement

De tous les biens de son père.

Mais ce fut la stupéfaction

Quand il lût : ''Je laisse à Pierre

Mon manuscrit sur la superstition.

Il le trouvera dans mon bureau

Avec un billet qu'il remettra

Au premier vendeur de coco

Qu'il rencontrera. ''

Le manuscrit donnait l'explication.

Il disait ceci, approximativement :

''Une étoile s'allume en même temps

Que nait un enfant, dit-on.

On croit à l'influence des comètes,

Aux mauvais sorts qu'on vous jette,

On craint le chiffre treize, les vendredis...

L'homme vit

Sous le joug des superstitions

Car superficielle est son observation.

Ma mauvaise étoile à moi,

C'est quoi ? :

Un vendeur de coco.

À huit ans, aux Champs-Elysées,

Me promenant avec mon père,

Ma mère et mes deux frères,

La cariole d'un marchand de coco

M'a renversé.

J'eus le nez cassé.

Le jour de mes dix-huit ans,

Je fus invité à chasser par les parents

De mon meilleur ami

Dans leur propriété de Senlis.

En descendant de la diligence,

( Vous allez dire coïncidence,

Sans chercher au-delà )

Une voix m'interpella :

Figurez-vous que dans la forêt,

J'ai tiré sur un des chiens.

Je l'avais pris pour un lapin.

Le matin de mes vingt ans,

J'avais rendez-vous avec ma fiancée Suzon,

Un autre marchand

Me tendit un verre de sa boisson.

Avec elle, je ne fus jamais heureux !

Enfin, voici le fait le plus malencontreux :

Un vendeur de coco.

Brisa ma carrière illico :

Je venais d'être diplômé

Et devais être nommé

Assistant d'université.

J'allais au Ministère me présenter.

J'entendis : Coco ! Qui veut du coco ?

Il pleuvait. J'étais en retard. Je me pressai.

J'ai alors trébuché et suis tombé

Dans une flaque d'eau !

Le temps de rentrer et de changer d'effets,

L'heure de mon audience était passée.

J'étais refait. Je me suis excusé

...Mais je n'ai pas été nommé !''

Le manuscrit se terminait par ces mots :

''Méfies-toi des marchands de coco.''

En sortant de l'étude du notaire,

Je croisais, boulevard Voltaire,

Un vieux porteur de coco.

Je lui remis aussitôt

Le billet de cent francs

Qui était joint au testament.

Le marchand me répondit :

-" Je vous remercie

Mon bon seigneur,

Que cela vous porte bonheur ! "


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