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La crise Dropped : Mission à haut risque pour TF1

Publié le 12 mars 2015 par Muzard

Après avoir entraîné nombre de stars et d’anonymes dans des opérations de survie, c’est au tour de TF1 d’être confrontée à une situation «  à haut risque »  suite à la collision de deux hélicoptères, le  9 mars, pendant le tournage de l’émission Dropped en Argentine. Un accident  qui a couté la  vie à 10 personnes dont 3 grands noms du sport.

Une première étape plutôt bien maîtrisée

Le 10 mars, dès 5 h du matin, TF1 diffuse un communiqué dans lequel elle se limite à exprimer son émotion. Puis son PDG, Nonce Paolini ne ménage pas ses efforts pour s’expliquer dans plusieurs radios et télés, on le sent très ému. Les réseaux sociaux ne sont pas oubliés, la chaîne communique sur Facebook et sur Twitter.   

Cette première étape de communication paraît plutôt réussie. La chaîne évite un écueil important, elle ne diffuse pas d’images «exclusives » du tournage, afin de ne pas donner l’impression d’exploiter à son profit la vague d’émotion.  

De plus, elle se situe uniquement sur le terrain émotionnel avec un discours humain ; elle est sous le choc.  Elle traite le drame en se positionnant en victime qui cherche à comprendre ce qui s’est passé.  Et dans chaque interview, pour couper court aux critiques ; elle insiste sur le fait que les participants à l’émission étaient heureux de participer à l’aventure . 

Elle prend soin de dégager en touche sur les causes de l’accident ; elle a raison d’être prudente à ce stade de l’enquête. Elle ne donne pas l’impression de dégager sa responsabilité sur la société de production, ALP mais n’oublie pas cependant de la mettre dans la boucle de sa communication. En relayant le communiqué de la société de production sur son site internet, en rappelant que c’est la société qui a prévenu les familles des victimes, qui va rapatrier les corps…   Gilles Bouleau, qui officie aux 20h de TF1 accorde une longue interview au dirigeant d’ALP et l’interpelle directement sur sa responsabilité.  

Résultat de cette communication, c’est l’hypothèse d’un accident lié à une erreur de pilotage qui semble dominer.

Quelques failles dans la communication

Il est dommage que Nonce Paolini dans ses interviews, ait préféré dégager en touche sur la question de l’arrêt de l’émission, cela a probablement conforté ceux qui pensent que les intérêts financiers prévalent dans cette tragédie. Par ailleurs, dans son JT de 20h le 10 mars, TF1 opte pour un traitement fortement émotionnel. Rien n’est épargné à son public et surtout pas la détresse, les pleurs des familles des victimes de l’accident. Un parti pris rédactionnel qui donne  le sentiment  à certains internautes qu’elle exploite le drame pour doper son audience.    

Mais c’est le témoignage maladroit de Louis Bodin sur le lieu du crash avec en fond la carcasse d’un des hélicoptères accidentés qui représente un point de rupture dans la communication menée par TF1. Le choix du cadre et le ton détaché du présentateur suscitent un bad buzz sur la toile.  Les excuses de la responsable de l’information de la chaîne qui dégage complétement sa responsabilité sur le prestataire en charge du duplex, ne convainquent pas.

Des nuages sur la planète TF1

Suite à l’intervention de L Bodin, les voix qui critiquaient TF1 et la téléréalité  et qui étaient plutôt minoritaires se sont fait entendre plus fortement en particulier sur le web. La vague d’émotion laisse place au débat de fond alimenté notamment par le témoignage de pilotes ou de professionnels qui connaissent bien les coulisses de ce type d’émission d’aventure, comme Nicolas Hulot ou Sylvain Augier. Ils s’interrogent : la tentation est de se rapprocher pour filmer au plus près.  La question qu’ils soulèvent implicitement est celle de la responsabilité de la société de production voire de la chaîne.  

D’autant que ce drame survient après celui de Koh-Lanta  en mars 2013 ; l’émission de TF1 avait perdu un candidat puis son médecin. Conformément à « l’effet de répétition » des bad buzz, le fait d’être confronté à un nouveau drame de sécurité risque de conforter les détracteurs de la télé réalité et de la course au sensationnalisme. Pour TF1, ce n’est plus le sort de « Dropped » qui  est en jeu, le programme étant a priori arrêté mais  l’avenir de ces émissions d’aventure. Cependant si le débat évolue et porte plus généralement sur les risques liés à l’information sur le terrain, au  reportage… il est probable qu’il s’enlise et que les conséquences pour la chaîne restent limitées. A moins que les conclusions de l’enquête ou l’intervention d’un spécialiste permettent à l’opinion de penser que la responsabilité morale de la société de production et de son commanditaire TF1 est engagée.


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