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Pina B. vue par…, Montre-moi (ta) Pina : honni soit qui mal y pense

Publié le 25 janvier 2010 par Jérôme Delatour

Un truc de malades, comme il n'y en a que quelques-uns par siècle. Une idée de José Alfarroba, directeur du théâtre de Vanves, pour l'ouverture d' Artdanthé, alors que Pina Bausch était encore des nôtres : 33 artistes (chorégraphes, metteurs en scène, plasticiens, vidéastes), 33 éclairages, 33 musiques, une cinquantaine d'interprètes (dont un invité franchement mineur au moment des faits), 4 minutes par artiste, et une grosse heure de retard à la générale.

Pina B. vue par…, Montre-moi (ta) Pina : honni soit qui mal y pense

Montre-moi (ta) Pina, Waldemar Kretchkowsky (cl. Jérôme Delatour - Images de danse)


4 minutes pour convaincre, le temps d'une exécution. Dans le hall d'entrée, en attendant l'heure fatidique, il y a les traqueux qui se remontent au ballon de rouge ou qui sortent griller leur dernière cigarette. Andrea Sitter se commande une assiette de bleu (mais pas du roquefort ! c'est trop fort), Viviana Moin demande qui veut se dandiner devant elle juste pour voir. Yves-Noël Genod se promène cool, un tourteau passe à toute allure.

Pina B. vue par…, Montre-moi (ta) Pina : honni soit qui mal y pense

Montre-moi (ta) Pina, Gael Depauw
(cl. Jérôme Delatour - Images de danse)


Rendre hommage à Pina Bausch en 4 minutes, comment faire ? La morte impressionne. Et, paradoxe, la jeune génération ne la connaît quasi que par ouï-dire. Déjà une icône. Au fil d'une trentaine de numéros, les stratégies forment des statistiques. Il y en a qui insistent sur l'absence et le funèbre : plateau vide, nature morte improvisée, seuls couchés sur la scène, ou mimant un duo. Beaucoup conjurent la mort par l'humour, grand-guignol ou décalé (Kataline Patkaï indienne, Marta Izquierdo-Muñoz burlesque, Ami Garmon crustacée, Viviana Moin médium, Andrea Sitter... Andrea Sitter). Un trio désopilant, mené par la férule de Gael Depauw, feint de mésinterpréter le titre du spectacle. D'autres témoignent plus directement, généralement avec une pointe d'autodérision (Marie-Jo Faggianelli et d'autres - pardon pour les noms, tout cela s'éclaircira avec le temps...). D'autres esquivent avec brio (Yves-Noël Genod en éventail et chaussettes), d'autres débarquent juste d'une autre planète (Mr X & Mr J). Les vidéos, toutes réussies pour une fois, rejouent les codes bauschiens. D'autres enfin dansent, tout simplement, et c'est peut-être eux qui méritent la palme de l'émotion. Dans ce registre, Guesch Patti se montre parfaite de retenue et d'intensité. Idem pour Raphaël Cottin, et pour l'Ukrainien Waldemar Kretchkowsky, admirable dans sa grande robe rose (photo !). Très opportunément, les benjamins Pierre Niney et Marie-Charlotte Chevalier jouaient le fil rouge pour structurer ce défilé joyeusement hétéroclite.

Les clichés sont là nombreux, mais c'était un choix délibéré de José Alfarroba : des tombereaux de deux-pièces, de robes de satin rouges et noires, de talons aiguille, de seaux d'eau, de chaises, de fleurs déversées, de valises, de tubes de Purcell, de cheveux longs... Au reste, pas mal d'hommes à poil ou en robe. Une révolution bauschienne a bien eu lieu.

Pina B. vue par…, Montre-moi (ta) Pina : honni soit qui mal y pense

Montre-moi (ta) Pina, Marie-Charlotte Chevalier et Pierre Niney
(cl. Jérôme Delatour - Images de danse)


Un tel projet comporte fatalement des faiblesses, selon le temps et l'engagement des uns et des autres. Mais avec une telle variété de propositions, chacun est assuré de trouver son bonheur.

Voilà, la mère est tuée, il reste à s'occuper du père. Charmatz l'a déjà un peu fait. Après Montre-moi (ta) Pina, j'attends un Montre-moi ton Cunni(ngham). Et cette fois, il faudra faire preuve d'encore plus de technique. Allez José, pour 2011... chiche ?


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