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Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques

Publié le 21 avril 2015 par Sia Conseil
Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques

La mise en place d'une Union bancaire européenne, initiée en 2012 avec l'objectif de rendre le système bancaire européen plus efficient, cohérent et robuste, s'accélère. Notre série de 3 articles a pour objectif de décrypter chacun des piliers d'en analyser les conséquences.

Cet article est consacré au second pilier, le Mécanisme de Résolution Unique (MRU), à ses implications pratiques et à ses potentielles conséquences sur le secteur des services financiers en Europe.

La mission du Mécanisme de Résolution Unique (MRU), entré en vigueur le 1er Janvier 2015, est d'assurer efficacement la gestion du plan de résolution d'une banque assujettie au Mécanisme de Supervision Unique (MSU) et confrontée à de sérieuses difficultés financières en minimisant le coût pour l'économie réelle et pour les contribuables. Le second pilier repose sur la mise en place du Fonds de Résolution Unique (FRU) qui entrera en vigueur le 1er Janvier 2016 et qui est encadré par le Conseil de Résolution Unique (CRU) nommé le 9 décembre 2014.

Le MRU est complémentaire au Mécanisme de Supervision Unique (MSU) alors que le Système de Garantie des Dépôts (SGD) est l'accomplissement de ce dernier pour une Union Bancaire complète.

Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques
Vers un système où le bail-in est la règle et le bail-out l'exception

La BCE en tant que superviseur informe le CRU lorsqu'une banque de l'un des 28 Etats membres a besoin d'un plan de résolution. Le CRU évalue la présence de risques systémiques et la possibilité d'un renflouement interne (" bail-in ") par les actionnaires et les créanciers (i.e. la réduction des créances et/ou leur conversion en actions) jusqu'à 8% du montant total des dettes. Si ce renflouement n'est pas suffisant pour sécuriser la situation de la banque, le CRU, avec la collaboration des Autorités Nationales de Résolution, prépare des recommandations et décide du niveau de participation du FRU jusqu'à 5% du montant des dettes mais limité à 5 milliards d'euros. Si l'intervention vise à injecter des liquidités, le plafond s'élève à 10 milliards d'euros. La méthode de financement du FRU, concept central du MRU, sera détaillée dans la prochaine section.

Pour des raisons juridiques, c'est la Commission qui décide du plan de résolution à partir des recommandations du CRU. L'objectif est également d'assurer :
* une cohérence au sein du Marché unique et avec les règles de l'UE sur l'aide de l'Etat
* la protection de l'indépendance et de la comptabilité de l'ensemble du mécanisme
La Commission peut s'opposer au plan de résolution proposé par le CRU en cas d'absence d'intérêt public ou en cas d'interférence avec les conditions d'utilisation du FRU (i.e. atteinte du plafond).

En cas de perte excédant 13% des dettes, l'Etat (jusqu'à 10% du capital) et le Mécanisme de Stabilité Européen (MSE) peuvent alors intervenir. Les autorités nationales de résolution sont en charge de l'application de la résolution, sous la supervision et le pilotage du CRU.

Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques
Niveau de fonds mobilisés par les banques pour contribuer à la colonne vertébrale financière du MRU

Afin de fournir les ressources nécessaires pour garantir la continuité des opérations d'une banque qui a été restructurée, la Directive de Recouvrement et de Résolution de la Banque (DRRB) a établi le Fonds National de Résolution auquel toutes les banques des 28 Etats membres doivent contribuer depuis le 1er janvier 2015. Le 1er janvier 2016, les Fonds Nationaux de Résolution fusionneront au sein du FRU. Pour faciliter la transition, les contributions annuelles seront graduellement ajustées. Le calcul actuel de ces contributions est réalisé au niveau national et son objectif est d'atteindre 1% du total des dépôts dans le territoire concerné. Il sera remplacé par un calcul global avec les objectifs de financement du FRU d'atteindre :
* 55 milliards d'euros à un horizon de 8 ans
* 1% de dépôts garantis des banques dans les 28 Etats membres

Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques

La contribution annuelle de la banque est basée sur la méthode de calcul par entité individuelle proposée par la DRRB et approuvée le 9 décembre 2014. Cette méthode est basée sur le total des dettes (hors fonds propres et dépôts couverts de la banque) ajustées selon leurs profils de risque. Les plus petites banques paient un montant forfaitaire.

Le mécanisme de résolution unique : gérer la faillite des banques

Avec cette méthode de calcul, les banques françaises et allemandes sont les plus gros contributeurs, avec une part pour chacune estimée à 28%, soit 15,48 milliards d'euros chacune. Plus généralement, les plus grandes banques représentant environ 85% des actifs bancaires de l'ensemble des banques sous la supervision de la BCE alimenteront le fonds à hauteur de 90% environ. Les banques de taille moyenne détenant environ 14% des actifs participeront environ à hauteur de 9,7% et les plus petites banques, détenant environ 1% des actifs devront verser les montants restants.

Conséquences et défis auxquels fait face le secteur bancaire

Le système de "bail-in" implémenté par le MRU pourrait potentiellement augmenter le coût de liquidité des banques si, craignant une perte en cas de restructuration du bail-in, leurs actionnaires et leurs créanciers exigent une prime de bail-in.

La contribution au FRU ne donnera lieu à aucune déduction fiscale comme déclaré en France le 3 décembre 2014 et conformément aux volontés de l'Allemagne. Cette mesure établit directement que les contributions au FRU représentent une perte sèche pour les banques.

De nos jours, le secteur bancaire doit se mettre en conformité avec l'augmentation des contraintes juridiques qui nécessitent des ressources supplémentaires pour être anticipées à temps. En effet, l'établissement du système de bail-in, les pertes sèches causées par les contributions au FRU et la contribution demandée par le Système de Garantie des Dépôts (SGD) qui sera l'objet du dernier article de la série sur l'Union Bancaire peuvent peser sur les coûts de liquidité des banques. Si le Mécanisme de Résolution Unique peut protéger les finances publiques en solutionnant des erreurs du secteur privé pour sauver l'économie, il peut également impacter les banques et l'économie à cause d'une augmentation du coût du crédit.


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