« La ville est un îlot de biodiversité »

Améliorer la prise en compte du vivant dans le secteur de la construction, c’est l’objectif de BiodiverCity®, premier label biodiversité pour le bâtiment, lancé en 2013 par le Conseil International Biodiversité & Immobilier (CIBI) avec la participation de Bouygues Construction. Rencontre avec Luc Monteil, Directeur Immobilier chez Bolloré Logistics et président du CIBI, qui revient sur cette initiative originale.

Luc Monteil, président du CIBI

Quel est le bilan du label BiodiverCity® après un an et demi d’existence ?

L’accueil et l’écoute que nous avons reçus du secteur de l’immobilier, généralement réticent à la création d’un nouveau label, ont été très positifs. Cela a révélé une vraie demande sur le sujet de la biodiversité en France. Nous avons consacré l’année 2014 à construire la notoriété et la crédibilité de BiodiverCity® avec des projets pilotes qui ont permis de valider notre référentiel technique et de démontrer la pertinence de notre démarche. Le label a été opérationnel dès son lancement, il est applicable de façon simple et il compte déjà sept références dont l’éco-quartier Eikenǿtt en Suisse et le siège de Veolia à Aubervilliers. Nous allons d’ailleurs doubler ce chiffre cette année. Nous avons également travaillé au renforcement de l’association avec la constitution d’un Comité scientifique composé de différents experts (écologues, sociologue…), chargé d’orienter les axes stratégiques d’évolution du référentiel, et la formation de nouveaux assesseurs indépendants.

Quelles sont vos perspectives pour les années à venir ?

Maintenant que le label est bien installé, notre objectif est de le faire connaître au-delà de notre secteur et de professionnaliser notre activité. Eikenǿtt a montré que le référentiel s’appliquait bien aux projets multi-activités, nous souhaitons donc positionner BiodiverCity® au niveau de l’aménagement urbain, dans le développement des quartiers. Nous prévoyons également à terme de créer un référentiel adapté aux ouvrages en exploitation. En France, notre volonté est que BiodiverCity® atteigne le même niveau de notoriété qu’Effinergie. Jusqu’à présent, les certifications internationales HQE®, LEED® et BREEAM® prenaient peu en compte la biodiversité. Le BRE  et l’association HQE ont ouvert la voie avec l’introduction de critères spécifiques. L’apparition d’un objectif dédié à la biodiversité dans la nouvelle grille des référentiels HQE Performance témoigne de cette tendance de fond. BiodiverCity® se positionne en label d’excellence vis-à-vis de ces référentiels. Nous réfléchissons également à l’internationalisation du label avec la création d’antennes du CIBI dans des capitales ciblées, dont une dès la fin de l’année 2015.

L’éco quartier Eikenott en Suisse
(c) Rainer Sohlbank

Quel chemin reste-t-il encore à parcourir pour que la préservation de la biodiversité soit considérée aussi importante que la maîtrise de l’énergie ?

L’intérêt pour la biodiversité est croissant chez les maîtres d’ouvrages, mais la demande n’est pas encore assez formalisée. Le frein principal est le manque de prise de conscience du sujet et de ses effets bénéfiques sur les projets et les utilisateurs. La réintroduction de la biodiversité améliore la qualité de vie de l’occupant d’un bâtiment, et plusieurs études ont prouvé que la performance des salariés était supérieure dans des bureaux connectés à la nature. Nous avons longtemps pensé que la biodiversité se traitait en dehors de la ville, mais l’enjeu actuel est de considérer que la ville est un îlot de biodiversité, et les que les acteurs privés doivent contribuer au développement de son potentiel. Le CIBI participe à ce titre au groupe de réflexion « Bâtiment et biodiversité » dans le cadre du Plan Bâtiment Durable du gouvernement, dont l’objectif est d’améliorer la réglementation et la bonne prise en compte de la biodiversité au niveau national.

Propos recueillis par Jessica Swiderski