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Le royaume du capitalisme pour enfants

Publié le 22 juillet 2015 par Raphael57

Le royaume du capitalisme pour enfants

Il ne vous aura pas échappé que les crises économiques et financières arrivent fréquemment durant l'été, et débutent en général après un week-end. L'été 2015 n'aura ainsi pas fait exception, puisque nous avons connu la crise grecque mais aussi le krach boursier en Chine, et encore nous ne sommes que mi-juillet !

Quoi qu'il en soit, après mes analyses longues et étayées de la situation en Grèce (ici et là notamment) et en Chine, je me devais de vous proposer un billet plus léger en cette période de grande chaleur. En route donc vers Londres où se trouve le royaume de Kidzania...

Kidzania, le royaume du capitalisme pour enfants

Une petite vidéo pour découvrir toute la magie de Kidzania, un monde où les enfants apprennent les joies de l'asservissement au système capitaliste et où il leur faut gagner de l'argent pour vivre comme des petits-grands :

Kidzania c'est donc 7 000 m² à la gloire du capitalisme et de son messie le kidzo, monnaie officielle du royaume. Ouvert à tous les enfants de 4 à 14 ans (passé cet âge, on craint peut-être qu'ils soient capables d'esprit critique...), Kidzania propose aux enfants de trimer comme des grands pendant 25 minutes par session, cependant que leurs parents feront leurs courses juste en-dessous chez Marks & Spencer.

Le capitalisme triomphant

Bien entendu, dans ce concept tout droit importé du Mexique où pourtant les crises firent de nombreux dégâts, les promoteurs assurent qu'ils ont uniquement à coeur d'apprendre aux bambins les "valeurs de la vraie vie" et les "opportunités de carrières". Point de traces, selon eux, d'un quelconque militantisme qui consisterait à présenter aux enfants, fort réceptifs à cet âge, le capitalisme (et ses antivaleurs) comme le seul mode de production et de rapports sociaux possibles.

Qu'un parc d'attractions pour enfants offre du rêve, c'est sa mission première. Mais si le rêve est une pure chimère monétaire alors là je dis halte à tout, sous peine de transformer la vie des gamins en cauchemar lorsqu'ils finiront par comprendre que gagner de l'argent n'est pas synonyme de bonheur. Ne mélangez pas la sphère sociale et l'argent disaient pourtant avec sagesse les Anciens...

D'ailleurs, la direction du parc leur expliquera-t-elle que, même avec toute la bonne volonté du monde, certaines personnes n'arrivent pas à trouver un emploi suffisamment rémunérateur ? Va-t-elle leur expliquer que, en dehors des métiers de la finance et d'une infime part du show-biz (sport inclus), le Royaume-Uni n'offre pas la possibilité de gagner des millions d'euros par son travail, sauf à pratiquer des activités moralement répréhensibles ? De tout cela il ne sera évidemment pas question, puisque le directeur de la franchise affirme de manière péremptoire qu'il faut gagner de l'argent pour "profiter de la vie" (sic !).

Quant aux questions de soutenabilité des modèles économiques basés sur la consommation de masse, il n'en entendront pas parler bien sûr ; pas un mot non plus sur le don, acte hautement altruiste et même religieux puisque parole d'Évangile ; quant à l'économie du partage, dont le développement est actuellement phénoménal, on taira probablement même le nom pour éviter de donner aux enfants l'idée qu'un autre monde que celui de la consommation est possible.

Mettre l'individualisme à l'honneur, sous sa forme la plus vile, la consommation, est pour les promoteurs du parc une façon efficace de faire du marketing et du placement de marques auprès des enfants. Car n'oublions pas que les grandes enseignes qui sont représentées (H&M, British Airways, etc.) cherchent évidemment à obtenir un retour sur l'investissement auquel elles ont consenti pour être présente dans le royaume de l'abrutissement.

Vous noterez par ailleurs que, à l'instar de tout bon système capitaliste, on y trouve une banque où les bambins peuvent déposer leur argent et même acheter une carte de crédit. Ce que le reportage ne dit pas, c'est si certains enfants ont le droit de jouer au trader fou ou à l'escroc financier type Madoff, afin, bien entendu, de gagner de l'argent comme dans la vraie vie... Au reste, le royaume de Kidzania peut-il connaître une crise financière et bancaire ? Bien sûr que non, puisque la finance libéralisée et dérégulée s'autorégule comme nous le savons tous depuis 2007 !

J'imagine qu'un tel concept doit particulièrement plaire au ministre de l'économie en France, Emmanuel Macron, lui qui avait souhaité que les jeunes ambitionnent de devenir milliardaires ! Vous savez, le même qui avait expliqué à Elise Lucet que l'État n'a pas à se mêler de la politique financière et salariale des entreprises. Au fait, pourquoi je vous parle de Macron ? Tout simplement parce qu'il n'est pas impossible que ce magnifique parc ouvre un jour en France... On n'arrête pas le progrès !

N.B : l'image de ce billet provient d'un article du site http://lesbeauxdimanches.hautetfort.com


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