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Il y a longtemps que je t'aime...

Publié le 23 avril 2009 par Kristel

Il y a longtemps que je t'aime......Jamais je ne t'oublierai. Cette comptine enfantine rythme le premier film en tant que réalisateur de l'écrivain Philippe Claudel (Les âmes grises, adapté au cinéma par Yves Angelo). Autour du thème de l'enfermement, il dépeint le retour difficile d'une femme à la vie sociale, une femme dont le mystère intrigue, une femme "creusée par le vide et la perte".

Après 15 années de prison, Juliette, rejetée par sa famille, retrouve sa jeune soeur Léa qui l'accueille au sein de sa famille. Projetée dans un monde de bobos bien pensants où tout est fait pour assurer sa réinsertion, elle reste muette sur l'acte qu'elle a commis dans le passé. Si on apprend très vite qu'elle est une meurtrière ayant tué son enfant de 6 ans, cette première révélation nourrit le film. On s'attache à Juliette (superbe Kristin Scott Thomas), à son droit de revivre après avoir payer sa dette. La force du film réside justement sur ce passé qui se révèle petit à petit sans jamais se dévoiler complétement, sur ce mystère que l'on tente de percer à jour, sur cette femme qui semble résister à toute forme de compassion comme si elle se punissait perpétuellement. Cette charge émotionnelle autour du secret est également portée par Léa / Elsa Zylberstein, la jeune soeur dont la vie entière a été déterminée par l'absente : famille déchirée, renfermée sur son secret, études en opposition à celle de sa soeur, adoption de ses enfants... Elle n'a jamais pu oublier sa soeur, ne pense qu'à l'aider afin de pallier le manque ressenti durant ces 15 années d'absence.

Il y a longtemps que je t'aime...
Jusque là, tout va bien... L'émotion de cette chronique familliale se distille par petites touches, jusqu'à l'inflation émotionnelle finale. La plus belle chose du film était l'inconfort entretenu par le doute sur la légitimité sociale de cette femme. Mais lorsque tout est révélé, l'originalité du scénario est anéanti : Juliette est une victime et non un monstre, elle a tué par amour un enfant condamné pour abréger ses souffrances et s'est punie d'avoir mis au monde puis repris cet enfant. "En le mettant au monde, je l'ai condamné à mourir" hurle-t-elle. Mais n'est ce pas le propre de chaque vie que d'aller vers la mort? On est condamné dès le départ, plus ou moins tôt il est vrai. Mais cette banalité assénée dans cette ultime et mélodramatique scène fait vraiment regretter cette connaissance de la vérité, révélation qui fait perdre au film tout sa saveur. Autre point faible : la musique. Si la guitare de Jean-Louis Aubert colle bien à certaines scènes du film, le générique de fin est atroce : une très belle chanson de Barbara massacrée par le chanteur. En bref, la fin du film tue le film, c'est regrettable.

Ceci étant dit, cela reste plaisant à regarder : un beau thème, celui de l'enfermement (la prison pour Juliette, un grand père mutique suite à une attaque, une mère atteinte d'alzheimer et un flic en proie à une solitude qu'il ne peut affronter), une belle interprétation ( César du meilleure second rôle féminin pour Elsa Zylberstein)... Distinguée par le Bafta du meilleur film non anglophone par les anglais, César de la meilleure première oeuvre, ce film sensible et poignant est gaché par une overdose de bons sentiments qui vise à nous arracher des larmes. Trop d'émotions tuant l'émotion, nos yeux restent secs et on sort du visionnage de ce film avec des sentiments mitigés.

avec Kristin Scott-thomas, Elsa Zylberstein,

Laurent Grevill et Serge Hazanavicius


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