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Paso Doble n°78 : Faut-il créer une contre-blogosphère ?

Publié le 06 juin 2008 par Toreador

A las cinco de la manana…

Cent degrés de comparaison

La blogosphère est à nouveau en ébullition, avec en son centre la validité du classement mensuel Wikio, les conseils pour devenir un blogueur « influent », et ses parodies, et les reprises par la presse. A l’étranger, on discute de la manipulation du classement Technorati. Au coeur de la contestation de la légitimité de tel ou tel, transparaît en réalité une profonde aspiration à l’horizontalité.

Si l’on met de coté l’humain (la jalousie), tout ce ramdam sur la légitimité de tel ou tel classement comporte un fond sociologique fort et un élément objectif d’inégalité.

Tout d’abord, l’élément sociologique. J’assistai lundi à une conférence sur mai 68 où était invité François Cusset, un professeur de sociologie, qui expliquait comment la pensée d’un Deleuze ou d’un Guattari avait été importée aux Etats-Unis où elle avait irriguée la « french theory », et notamment les pionniers de l’internet.

J’assistais il y a quelques heures à une brillante conférence d’Alain Finkielkraut qui, après avoir cité Tocqueville puis Peguy, expliquait comment les médias incarnant une « force sociale » poussaient à la démocratisation, au nivellement du politique en étendant les concepts d’égalité politique à toutes les sphères.

J’ai bien envie, lorsque je croise ces deux approches de diagnostiquer en internet le royaume héritier d’une certaine pensée post-68, « égalitarienne » et nourrie d’une wiki-pensée utopique.

The Blue Blood Blogosphère

L’élément objectif ensuite: il y a clairement dans la blogosphère l’émergence, à partir d’un milieu vierge, de gagnants et de perdants. Une classe d’élite, qui se reconnaît comme telle, trône tout en haut. Elle se linke, elle se regroupe, elle se dispute parfois, mais comme les puissantes dynasties d’Europe du XIXème siècle, elle se reconnaît implicitement un lieu point commun : autrefois le sang bleu, aujourd’hui le sentiment d’être cousins. Allez à une République des blogs, et vous verrez : malgré un apparent climat de convivialité, ces messieurs de la Haute se distinguent sans le vouloir, discutent entre eux, attablée et en costume, pendant que la plèbe (en jean) piétine debout…

Ce que contestent les générations d’après, c’est que la place soit est déjà prise et que le « pouvoir » soit perpétué. Contrairement à ce que prétend Autheuil, le classement Wikio est en effet relativement stable : la renommée appelle la renommée. Et contrairement à certains, je ne trouve pas que ce soit toujours forcément mérité. Ne nous en cachons pas : j’ai remarqué que linker un Eolas rapportait près de 100 clicks/jour. Comme l’affluence n’est pas forcément mon objectif, je n’en abuse pas, mais je l’ai néanmoins noté. Les médias traditionnels, quant à eux, paresseux et relativement ignorants des mécanismes réels, se contentent de copier ce qui existe déjà. En donnant les noms de Presse-Citron, Versac ou Embruns, on prend peu de risques.

Alors, faut-il créer une contre-blogosphère, une espèce de club qui réunirait tous les exclus du système qui n’ont pas de reconnaissance institutionnelle, une blogosphère « underground » ? Ou bien, choisir une voie médiane et copier la méthode de certains blogs qui se linkent (tout est expliqué là) pour un oui ou pour un non et multiplient ainsi les références et les faisceaux pour grimper dans Wikio ? Personnellement, je ne le pense pas. Kiwis me suffit. Car cette contre-blogosphère, une fois institutionnalisée, deviendrait un nouveau pouvoir, tout aussi illégitime que le premier.

Après, il faudrait discuter sur la notion de « pouvoir » des blogs, mais c’est au-dessus de mes forces !

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