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Régionales: les alliances écologistes-Front de gauche toujours en débat

Publié le 28 août 2015 par Blanchemanche
#Régionales #EELV #Frontdegauche

22 AOÛT 2015 |  PAR STÉPHANE ALLIÈSLors de leurs journées d’été, les écologistes d’EELV ont tenté de mettre en scène une hypothétique dynamique électorale, et des accords avec tout ou partie du Front de gauche, peut-être dans la moitié des régions. Mais le chemin est semé d’embûches.Lille, de notre envoyé spécial.-  L’idéal est possible, mais le compliqué est probable. Lors de leur université d’été sur le campus de Villeneuve-d’Ascq, en banlieue de Lille, les écologistes mettent la touche finale à leur dispositif électoral en vue des régionales de décembre. Sur le papier, le contexte est idéal. Les premier et second tours ont lieu en même temps que la conférence sur le réchauffement climatique à Paris (COP 21), un grand raout assurant à peu de frais une campagne médiatique maximale en faveur de l’écologie.Mais la réalité est aujourd’hui bien loin de l’idéal pour Europe Écologie-Les Verts (EELV). Le parti dérive à vue, faute d’orientation stratégique claire, divisé entre une base militante radicalisée et des parlementaires enclins à « la responsabilité » et à la participation gouvernementale à tout prix. Par la grâce d’une direction ayant choisi de ne jamais arbitrer ni en fin de compte diriger, chaque rassemblement écologiste ressemble au précédent, et celui-ci ne déroge guère à la règle.Comme l’an dernier à la même époque, les élections locales et la perspective de rassemblements avec le Front de gauche (parfois avec le PCF, parfois sans) animent les débats, provoquant de vives critiques chez les tenants d’une écologie pro-Hollande (parmi lesquels les présidents des groupes parlementaires), inquiets d’un virage « gauchiste » alors que grandit la menace du Front national. Mais dans chacune des régions où un tel accord entre concurrents à gauche du PS est possible, on vante la qualité des discussions (« dès qu’on se parle, en fait, ça se passe bien ») et l’évidence de ne pas s’allier aux socialistes. Cette dernière solution serait massivement rejetée par les militants comme les électeurs, à en croire les diverses têtes de liste (ou conseillers de celles-ci) interrogées.Jean-Charles Kohlhaas et Corinne Morel-DarleuxJean-Charles Kohlhaas et Corinne Morel-Darleux © drEn Rhône-Alpes-Auvergne, l’accord est déjà scellé, dans la foulée des municipales grenobloises. Calqué sur le « modèle isérois » et bénéficiant d’une mise en œuvre remontant à plus de deux ans, le binôme Jean-Charles Kohlhaas (tête de liste et EELV) et Corinne Morel-Darleux (porte-parole de campagne et PG) s’appuie sur « un rassemblement citoyen » mettant en avant écologie et éthique (qui bloque pour l’heure les discussions avec le PCF, qui ne veut pas renoncer au cumul des mandats de ses candidats), en surmontant divergences et désaccords pour « jouer la gagne », en tout cas espérer finir devant le PS au premier tour.Ensemble ils vantent leur « assemblée représentative citoyenne » (environ 80 personnes, dont la moitié de non-encartés) qui coordonnera la campagne et prendra les décisions stratégiques, et se félicitent de se voir rejoindre « par des gens qui avaient jusque-là toujours refusé de s’engager dans nos organisations respectives, mais le font désormais parce que nous sommes ensemble ».En Nord-Picardie, un rapprochement similaire est en bonne voie (même si le PCF souhaiterait pour l’instant mener la liste). « Sur le terrain, des pêcheurs, des agriculteurs ou des représentants d’association m’ont dit “si vous partez avec le PS, on ne votera pas pour vous” », assure Sandrine Rousseau, porte-parole d’EELV et tête de liste dans le Nord. Elle assume le « gros pari » tenté face à Marine Le Pen et Xavier Bertrand, favoris pour emporter une région historique de la gauche française. « La seule solution aurait été une liste d’union de toute la gauche, mais les socialistes ne veulent pas du Front de gauche, dit-elle. L’objectif va donc être que le total de nos listes arrive devant la droite et l’extrême droite. »En PACA, le raisonnement est similaire, ainsi que l’explique l’un des responsables locaux, Bruno Delport. « La région est perdue pour la gauche à 95 %, dit-il. La seule façon de la conserver, c’est de créer un électrochoc en arrivant au premier tour devant un PS local qui est dans une situation catastrophique, et en créant une dynamique de rassemblement au second. » Là encore, les discussions sur le fond avec le PCF ne vont pas de soi (elles sont plus « faciles » avec le PG et Ensemble, les autres composantes du Front de gauche), mais « quand on en parle sérieusement, on trouve des points d’équilibre, dit Delport. On y arrivait bien avec le PS, c’est pas plus compliqué ».

Accords et désaccords

En Midi-Pyrénées-Languedoc, où le rassemblement EELV-Front de gauche-occitanistes-citoyens passe par un site internet où contributions et désaccords sont affichés en « totale transparence », l’ancien vice-président du parlement européen Gérard Onesta estime même que « la fragilité du processus fait paradoxalement sa force, car la sincérité convainc ». Il évoque les désaccords surmontés sur le nucléaire ou la scolarité occitane et catalane. Un« socle commun » de propositions devrait être rendu public au début du mois de septembre. « On va tous revenir devant nos organisations pour voir si cela convient à tout le monde, en tout cas si le résultat est vraiment différent de ce qu’on aurait pu écrire tout seul, dit Onesta. Ce qui est déjà acquis, c’est que nous défendons tous le paradigme écolo. »Une rencontre "citoyenne" dans l'Aude © drLes débats les plus compliqués à trancher ne portent finalement pas sur l’énergie, où la mise en œuvre d’une « filière démantèlement » garantissant aux salariés le maintien de l’emploi semble faire consensus, alors que le porte-parole du PCF Olivier Dartigolles a même prononcé à la tribune les termes de« sortie progressive du nucléaire » (mais, ajoute-t-il, « financée par l’État, via des renationalisations d’Areva et d’EDF dans un pôle public de l’énergie »). En revanche, la gratuité des transports publics, revendication traditionnelle du PCF, crée davantage de discussions, avec des écologistes tout aussi traditionnellement défenseurs sur le sujet d’une tarification progressive mais réelle si elle veut être ambitieuse.Dans d’autres régions encore, les discussions sont en cours, comme en Aquitaine-Limousin ou en Bretagne, mais sont pour l’heure loin d’aboutir. Mais d’ores et déjà, dans une bonne moitié de la France, écologistes et autres partis de gauche sont en position de concurrencer le PS. La situation n’est toutefois pas pour autant dégagée pour les écologistes, car outre les parlementaires EELV pro-participation gouvernementale qui n'en finissent plus de menacer de faire scission (Jean-Vincent Placé, le dernier en date), Jean-Luc Mélenchon a lui aussi fait connaître son mécontentement, vendredi dans Sud-Ouest, critiquant « l’annexion » en cours des écologistes sur le Front de gauche.Un « coup de sang » qui étonne les écologistes, selon qui « les camarades locaux du PG ne partagent pas du tout ce point de vue ». « Localement, les membres du PG sont de très bonne volonté, admet Éric Coquerel, coordinateur du PG présent à Villeneuve-d’Ascq ce vendredi. Mais il n’est pas possible de se rassembler dans cinq ou six régions sans avoir de têtes de liste, ou de “labellisation nationale”, et en plus certains dirigeants écologistes disent que le Front de gauche se rallie sans conditions à EELV. »Responsable des relations extérieures du parti écolo, David Cormand comprend que « de leur point de vue, ce soit compliqué » et admet que les responsables écologistes doivent « faire attention aux mots employés ». « Nous sommes un parti fédéraliste, et dans les élections régionales, la direction nationale n’a aucun pouvoir, prévient-il cependant. Vu la culture écolo, ce serait même contre-productif que Paris tente de mettre son nez dans les discussions locales. » Un cadre de discussions entre les secrétaires régionaux concernés et la direction du PG a toutefois été mis en place, afin d’examiner les revendications de Coquerel (un label commun dans les régions où se fait le rassemblement, et une mise en avant de certains comme têtes de liste, au moins départementales).Lors d’un « forum » organisé avec les partenaires de gauche (en réalité le Front de gauche – PCF, PG, Ensemble –, la co-présidente démissionnaire de Nouvelle donne Isabelle Attard et l’ancien eurodéputé PS Liem Hoang-Ngoc, qui vient de créer la Nouvelle gauche socialiste), tous ont plaidé pour que le rapprochement électoral se réalise sur l’ensemble du territoire. Mais si la salle, essentiellement constituée de l’aile gauche d’EELV, a vigoureusement applaudi, la majorité du mouvement préfère cette unité « par le bas ».« Notre intérêt, face à la droite radicalisée et aux forces d’accompagnement actuelles du système que sont la majorité du PS et le centre-droit, c’est de construire une force “alter-système” reposant sur l’écologie, et qui puisse concurrencer le FN, explique David Cormand. Les élections locales peuvent permettre de lancer une dynamique que personne ne parvient à créer “par le haut”, dans les états-majors des différents partis. »Emmanuelle Cosse, elle, se fait moins bavarde sur le sujet. Tête de liste en Île-de-France, la secrétaire nationale d’EELV est elle aussi « en autonomie » face au PS au premier tour. Mais après avoir refusé les mains tendues du Front de gauche, elle a fait alliance avec l’ancienne ministre d’Alain Juppé Corinne Lepage et son mouvement Cap 21.

http://www.mediapart.fr/article/offert/f9d433e3018855e91bdadcafdd915117

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