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Rentrée littéraire et premiers romans… les loups à leur p...

Par Quinquin @sionmettaitles1

RENTRÉE LITTÉRAIRE ET PREMIERS ROMANS…

LES LOUPS À LEUR PORTE, Jérémy Fel (2015)

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La quatrième de couverture du premier roman de Jérémy Fel évoque Twin Peaks, Stephen King et Joyce Carol Oates… Ô, doux rêve caressé d’une lecture s’annonçant dès lors passionnante d’un écrit effectivement fascinant, et dont la confirmation de ces influences prend vie à chaque page tournée. Jérémy Fel, jeune prosateur exalté, affectionne visiblement le manuscrit empoisonné, l’offrande littéraire judicieusement démoniaque qui revisite la figure du mal en se faisant habilement sombre et machiavélique ; Jérémy Fel, nouveau pontife inspiré de la violence et de l’épouvante mêlant ingénieusement un suspense haletant, de subtiles injections de surnaturel et surtout beaucoup, beaucoup d’effroi…

À chaque chapitre l’écrivain français sème un personnage, comme le Petit Poucet sème ses cailloux, pour mieux retrouver le chemin qui mène jusqu’au point culminant de l’horreur. Le postulat de départ se fait immédiatement tragique, genèse d’un véritable jeu de massacre programmé : une maison brûle sous l’œil pervers d’un adolescent déséquilibré, les flammes de la satisfaction et de l’aliénation se réverbérant dans son regard. Puis, chaque nouvelle page nous catapulte dans l’existence d’un-e protagoniste différent-e, comme un puzzle qui se met doucement et inéluctablement en place, comme une ronde macabre où les divers personnages entreraient malgré eux, créant des liens lointains, ténus, sorte d’ « effet papillon » embarquant tout ce petit monde dans les affres de la souffrance et de la douleur. Ils sont douze, évoluant dans des pays et milieux différents, douze âmes chargées du poids de la folie et des vicissitudes gravitant fatalement autour de l’orbite du mal. Comme un effet boule de neige les destins de Duane, Louise, Mary Beth et les autres – si au départ ne semblent avoir aucun rapport – finiront par se croiser et s’entremêler de près ou de loin, sous l’influence dévastatrice d’un individu méphistophélique. Les loups à leur porte est un livre à tiroirs que l’on ouvre prudemment mais où l’on plonge rapidement sans retenue, comme poussé-es à l’intérieur d’une boîte de Pandore d’où s’échappent tous les pires maux de l’humanité…

Jérémy Fel présente un texte extrêmement bien construit et calibré, cet ancien libraire et scénariste ayant visiblement largement compris les rouages d’une œuvre manipulatrice, prenante et difficile à délaisser,  marionnettiste littéraire agitant les meilleures ficelles dans l’unique but de rendre le lecteur dépendant et hypnotisé par tant de barbarie finement décrite. Un récit labyrinthique tenant en haleine par la seule force et le talent de son auteur qui, partant de vies antinomiques et lointaines, parvient à tisser une gigantesque et suffocante toile d’araignée. Jérémy Fel aurait pu tomber dans l’excès et la surenchère de violence – l’on évite tout de même de justesse l’overdose – mais parvient à s’arrêter à temps, livrant une fin pertinente, réfléchie et contrairement au reste du livre plutôt positive. Mais attention, le mal guette inéluctablement et si un fugace moment de bonheur ou d’accalmie peut éponger un peu de toute la crasse de ce monde, il n’en reste pas moins que le Diable ne faiblit jamais, rôde bien souvent là où on ne l’attend pas et que les loups à leur porte ne cesseront jamais de hurler…

La locution L’homme est un loup pour l’homme semble parfaitement étudiée et disséquée dans ce livre troublant et violent conduit d’une plume aguerrie, vigoureuse, féroce et emmené par d’intenses moments de frayeurs où les fantômes du passé le disputent aux spectres du présent. L’on se cache sous sa couette, l’on ne parvient plus à dormir, assommé-es par cette fresque dédaléenne et sans concession ceinte d’une angoisse omniprésente et singulière ; un roman hautement cinématographique à l’ambiance pesante et terrifiante que des écrivains ou réalisateurs comme David Lynch, David Cronenberg, R.J Ellory et Stephen King ne renieraient pas.

C’est passionnant, souvent éprouvant mais le résultat est tout simplement digne des plus beaux films d’horreur… Un œuvre tortueuse et torturée à ne pas mettre entre toutes les mains, les âmes sensibles étant priées de passer leur chemin…



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