Magazine Cinéma

Vie sauvage - 4/10

Par Aelezig

z21

Un film de Cédric Kahn (2014 - France, Belgique) avec Mathieu Kassovitz, Céline Sallette, David Gastou, Sofiane Neveu, Romain Depret, Jules Ritmanic

Grosse déception.

L'histoire : Paco et Nora, tous deux passionnés par la vie dans la nature, à l'image des Amérindiens, rejettent complètement le monde capitaliste. Ils vivent avec leurs enfants dans des caravanes, loin de l'agitation et du bruit, sans eau ni électricité, mais avec cet idéal auquel ils croient. Et puis un jour, elle en a assez, prend ses enfants et s'enfuit. Elle réclame la garde exclusive, prétextant qu'une vie aussi spartiate n'est pas convenable pour eux. La justice lui donne raison ; Paco n'accepte pas, c'est elle qui est partie, c'est elle qui lui a retiré ses fils. A son tour, il les enlève... Pendant onze années, ils vont vivre à l'écart, suivant leur idéal, évitant les camions de gendarmerie...

Mon avis : Les critiques étaient super bonnes et le Studio Ciné Live donnait 4 étoiles, donc je partais en confiance. Et par ailleurs cette histoire vraie, qu'on a vue à la une des journaux en 2009, m'avait énormément touchée. Parce que le drame des pères, à qui on ôte ses enfants après une séparation, reste totalement d'actualité et à ce jour, on n'a toujours pas trouvé la solution équitable ; la garde alternée, si elle peut convenir aux parents, est souvent mal vécue par les enfants. Et puis à cause de l'idéal de vie de cet homme, rejetant totalement la société de consommation, voulant élever ses garçons au plus près de la nature. Tout le monde le traitait de fou, et moi je le comprenais profondément. Même si, je le reconnais, "c'est compliqué" comme on dit systématiquement aujourd'hui pour les causes qui n'entrent pas dans les cases...

z22

Après onze de cavale, la justice a donné raison à la mère. Cédric Kahn aussi, et je trouve son film trop partisan. Or, on ne peut blâmer ni l'un ni l'autre, et je regrette cette position tranchée. Cette femme avait le même idéal que son mari, et puis soudain elle n'en voulait plus et souhaitait "se ranger", retrouver la société "normale". Madame avait fait un caprice d'adolescente, ne le reconnaissait pas... et s'est enfuie loin de son mari en lui enlevant ses enfants. Il y avait peut-être moyen de discuter un peu avant. Il n'avait pas l'air méchant, cet homme. Et empêcher les enfants de le voir, pas cool non plus. Donc, à son tour, il les enlève, car lui est profondément convaincu que la société est pourrie et que son mode de vie est le seul moyen de ne pas devenir abruti. Or dans le film, il est présenté comme un baba cool irréaliste et irresponsable, et les enfants ont tout le temps l'air triste, ce qui donne vraiment l'impression qu'ils n'ont qu'une envie rejoindre leur mère. Ce qui est faux. Ils ont dit eux-mêmes que cette vie était géniale. Leur mère leur manquait, certes, mais ils aimaient aussi leur père et cette harmonie avec la nature. 

Le film est très linéaire, très lisse, très politiquement correct, et manque furieusement d'émotions, de larmes et de cris de joie, de colères et de moments d'allégresse. D'esthétisme aussi. Pas trop d'effort sur la photo, alors que ce film devrait être un hymne à la nature. Ils font tous des têtes d'enterrement, gardent les chèvres, et puis c'est tout, il ne se passe pas grand chose. Ce qui tend à prouver que oui, vivre en harmonie avec la nature, c'est de la foutaise. La seule belle scène que j'ai appréciée est celle de l'oiseau sur la branche... qui sert pour l'affiche ! On a eu chaud... moins de deux, ils n'avaient rien à mettre dessus !

z23

Critiques dithyrambiques donc. Brillant, grandiose, tragique... On applaudit le réalisateur qui ne prend pas partie (ce n'est pas mon impression), mais on se lâche quand même pour juger les actes du père "révoltants". Paradoxal. Il n'y a guère que les Cahiers et Télérama qui émettent plus ou moins les mêmes réserves que moi. Les spectateurs sont également moins enthousiastes que les professionnels, soulignant les lenteurs, l'aspect trop sage et le manque de profondeur sur un sujet qui méritait mieux. 185.000 entrées.

A noter, c'est important que dans la réalité, aujourd'hui, les deux enfants continuent de vivre selon les principes de leur père, l'un est en train de monter un ferme écologique, l'autre a voyagé dans le monde avec son sac à dos et s'occupe aujourd'hui de chevaux. Ils déclarent que leur plus gros traumatisme fut l'enlèvement par leur mère, et non celui par leur père, dont ils aimaient le mode de vie et ils affirment que c'était leur choix de rester avec lui. Même si, à l'adolescence, ils ont effectivement eu quelques heurts, essentiellement parce qu'ils ne pouvaient pas avoir d'amis de leur âge et qu'ils avaient envie de voir des ordinateurs. Quand les gendarmes sont venus arrêter leur père, ils ont supplié leur mère de retirer sa plainte, ce qu'elle n'a pas fait. Et ils ont détesté l'image que donnait la presse de leur histoire, présentant leur père comme un marginal vivant dans la crasse et eux comme des enfants sauvages. Ils n'ont aujourd'hui pratiquement plus de contacts avec leur mère et disent qu'elle ne cherche pas beaucoup à les contacter, ne comprenant toujours pas leur choix de vie. Ils voient par contre très régulièrement leur père, qui tient une ferme dans les Cévennes, pas loin d'eux, et ils ont écrit un livre sur leur aventure à trois.


Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Aelezig 127315 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines