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Pfizer-Allergan : les nouveaux loups du capitalisme

Publié le 23 novembre 2015 par Blanchemanche
#Pfizer
LE MONDE ECONOMIE | 23.11.2015
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Image source : lemonde.fr
Le géant pharmaceutique Pfizer va absorber son concurrent Allergan pour 150 milliards de dollars (141 milliards d’euros). La plus grosse fusion de l’histoire dans ce secteur. Pourquoi ? Pour faire des économies… et pour échapper à l’impôt. En s’arrangeant pour que le mariage prenne la forme d’un achat de l’américain par sa cible, le nouvel ensemble pourra, en effet, adopter la nationalité de cette dernière et donc installer son siège en Irlande. Gain espéré, une diminution par deux du taux d’imposition, moins de 15 %, contre 35 % aux Etats-Unis. Des milliards d’économie à la clé.

Lire aussi : Pfizer sur le point de fusionner avec Allergan
Joli coup. Mais est-ce bien moral tout cela ? Pas moins, en tout cas, que certains agissements quotidiens en France, qui consistent benoîtement à attendre l’huissier avant de payer son fournisseur. Selon le ministère de l’économie, les deux tiers des entreprises ne respecteraient pas la loi, qui impose de payer ses factures dans les deux mois. Une gestion très agressive de sa trésorerie, qui se fait au détriment des plus fragiles, petites entreprises, particuliers, etc. Sans parler bien évidemment de l’arnaque du siècle, celle de Volkswagen avec ses logiciels truqueurs.
Un sport international
Contourner la loi, ou ne pas la respecter, est un sport international pratiqué depuis plusieurs siècles par les seigneurs du capitalisme. Ian Read, le patron de Pfizer, est le lointain successeur des fameux « robber barons », ces barons voleurs de la fin du XIXe siècle, prêts à tout pour agrandir leur empire, au mépris des règles de la morale individuelle et des lois collectives. La lutte entre le plus célèbre d’entre eux, John Rockefeller, patron tout-puissant de la compagnie pétrolière Standard Oil, et l’Etat américain fut sanglante et aboutit au démantèlement de son empire au nom de la concurrence.
Largement atténuée durant les « trente glorieuses », la bagarre a repris de la vigueur avec l’avènement de la mondialisation et de la libéralisation de la finance au début des années 1990. Progressivement, nombre d’entreprises ont adopté les tactiques d’« optimisation » mises au point par les financiers pour améliorer la rentabilité de leurs actifs : chasse aux coûts, gestion serrée de la trésorerie, fiscalité agressive. « Les barbares sont à la porte » (Bryan Burrough et John Helyar, non traduit) titrait en 1989 un célèbre livre, décrivant les méthodes de ces nouveaux loups du capitalisme.
La barbarie s’est banalisée. Elle n’en est pas moins nocive. D’abord parce qu’elle fait nombre de victimes, ensuite parce qu’elle prive les Etats de ressources, enfin parce qu’elle sape la crédibilité de la loi. Que devient la valeur d’une obligation que plus personne ne respecte ?
Les Etats organisent la riposte. L’Amérique frappe juridiquement hors de ses frontières, et les grands pays font désormais cause commune pour lutter contre l’évasion fiscale et ses paradis en tout genre. La survie du capitalisme se joue aussi sur le maintien d’une certaine éthique des affaires.

Philippe Escande 

Journaliste au Monde
En savoir plus sur http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/11/23/les-nouveaux-loups-du-capitalisme_4815537_3234.html#21q68S8DDod4YCPH.99

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