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Stéphane lissner réveille l'opéra de paris

Publié le 26 novembre 2015 par Popov

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Deuxième création à Garnier pour Stéphane Lissner avec Le Château de Barbe-Bleue de Béla Bartok  dans la mise en scène de Krysztof Warlikowski et de La Voix  humaine de Francis Poulenc adaptée de la pièce Jean Cocteau.

Et d'abord,pourquoi un tel rapprochement ?

Sur le plan narratif tout d'abord les deux oeuvres mettent en scène une même passion délétère de l'héroïne pour des pervers plus ou moins narcissiques. La première, Judith(superbe Ekaterina Gubanova) aime un affreux  et torturant monarque aux allures de vampire des Carpathes (le duc John Relyea à la basse très basse et au râle inquiétant) . La seconde monologue au téléphone faute d'appel de sa rock star de mari muet. C'est Barbara Hannigan qui tient ce rôle presque aussi halluciné que du Ligeti, dirigéé remarquablement par Warlikowski et qui réalise une performance d'actrice rare  chez une soliste

Sur le plan musical ensuite, les deux oeuvres se répondent et se fondent dans une continuité presque logique aux confins de l'harmonie tonale, aux rythmes exubérants (césures brutales voire poignantes, démarrages en trombe de fanfares etc).

Dans une modernité totale même si les deux compositeurs par infimes instants ne semblent tous deux affranchis de leurs grands prédécesseurs ou contemporains (Strauss pour Bartok, Debussy chez Poulenc). Le maestro aux gestes fluides et élégants Esa-Pekka Salonen dirige la danse macabre avec une assurance et une sensibilité impressionnante le poème symphonique .La tâche était loin d'être aisée . Boulez dans les années cinquante n'avait  fait aussi bien.Chaque porte passée du Château recèle des trésors de composition que Salonen exécute avec un talent rare. Même chose pour  la sensualité de l'oeuvre de Poulenc où la musique supplée le verbe défaillant d'une communication téléphonique où la fonction phatique n'est pas réalisée ( sur les 800 mesures de la partition , près d'un quart  sont écrites pour la voix seule). Le résultat est stupéfiant. Après Moïse et Aaron de Schoenberg, le nouveau directeur de l'Opéra de Paris continue de dépoussiérer sans brusquer le genre en nous faisant redécouvrir l'oeuvre révolutionnaire de deux grands précurseurs aux idées et surtout aux préoccupations d'aujourd'hui. Après  Paule Duval ou Felicity Lott , Barbara Hannigan apporte aussi son lot de modernité à ces oeuvres magnifiques.

Opéra de Paris jusqu'au 10 décembre 2015


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