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Femme insecte, La (Nippon konchuki)

Par Kinopitheque12

Shohei Imamura, 1963 (Japon)

Femme insecte, La (Nippon konchuki)

L'entomologiste suit le parcours de la femme insecte de sa naissance en hiver 1918, jusqu'au début des années 1960. Tome, l'enfant bâtarde (Masumi Harukawa) est élevée au milieu des champs par un faible d'esprit (image déconcertante d'un père-enfant qui réclame encore le sein à sa propre fille sur le lit de mort). Puis, allant chercher du travail à Tokyo pendant la guerre, elle s'y installe. De drames en désillusions, Tome échoue dans le temple d'une secte, " la Terre pure ", qui la pousse plus ou moins directement à se prostituer. Passé un temps, Tome devient maquerelle à son tour et à force de trahisons finit par tout perdre.

Parallèlement, l'anthropologue se penche également sur la descendance. Tome a eu une fille, enfant bâtarde elle aussi, née durant la guerre et laissée à la campagne avec le grand-père. Devenue jeune femme, elle prend un amant d'âge mûr qu'elle appelle " papa " et, hésitant entre les tentations qu'offre la capitale et la ferme où l'attend son fiancée cocu, elle échappe de peu à la désespérante reprise du modèle maternel.

Les cadres sont pleins. Personnages, affaires, éléments du décors, cloisons des pièces, portes ou fenêtres : le tout donne l'impression d'un enchevêtrement, d'une superposition sans ordre ni logique. Il y a assez peu de profondeur de champ. De plus, rares sont les plans qui en extérieur nous laissent un peu respirer (une pause pour se soulager accroupi dans les vignes blanches de neige). Partout en ville on suffoque et les accidents domestiques à coup d'eau bouillante, les disputes vives autour de ces amours blessés (incestueux et illégitimes), mais surtout autour des sommes d'argent dues et échangées chargent l'inconfort de ces vies sordides et tout autant le malaise de ce récit scrutateur. En outre, les arrêts sur image donnent l'impression d'une société bloquée, pervertie par la ville probablement et davantage par le passé (relations très tendues avec les États-Unis, Imamura y fait allusion par plusieurs inserts d'images d'archives lorsque le récit se poursuit dans les années 1940 et 1950).

Dans les derniers plans, Tome n'a plus d'autres choix que de quitter Tokyo et de rentrer dans sa province rurale. Le chemin est caillouteux. Elle y casse sa sandale de bois et on la voit souffrir de marcher. Pourtant pour la première fois les paysages autour s'ouvrent à nouveau ; le désir, la chair et l'argent semblent devoir être abandonnés lors de cette marche qui demande force et volonté... Les collines et le ciel s'imposent et même si elle grimace encore dans l'effort, on imagine une tranquillité enfin possible pour Tome, regagnant ainsi un foyer depuis trop longtemps délaissé.


Dvd et Blu-ray sortis le 3 novembre 2015 édité par Elephant films.
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Critique réalisée pour Cinétrafic, aléatoirement à voir sur le site la page top film et meilleure série.


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