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[Critique] Le grand jeu

Par Régis Marton @LeBlurayphile
[Critique] Le grand jeu

Un film de : Nicolas Parisier

Avec : André Dussolier, Melvil Poupaud, Clémence Poésy

Pierre Blum, un écrivain de quarante ans qui a connu son heure de gloire au début des années 2000, rencontre, un soir, un homme mystérieux, Joseph Paskin. Influent dans le monde politique, charismatique, manipulateur, il passe bientôt à Pierre une commande étrange qui le replongera dans un passé qu'il aurait préféré oublier et mettra sa vie en danger. Au milieu de ce tumulte, Pierre tombe amoureux de Laura, une jeune militante d'extrême gauche; mais dans un monde où tout semble à double fond, à qui peut-on se fier ?

[Critique] Le grand jeu
Le retour des gueules d'hier

Le grand jeu renoue avec l'ancien temps jusque dans son titre - déjà deux fois porté, en 34 chez Feyder avec Marie Bell, puis vingt ans plus tard, chez Siodmak -, empruntant l'adjectif si cher aux producteurs d'autrefois. Dans les années 50, les Grands et les Grosses se comptaient par centaines, tout comme les polars politiques à la française, souvent oubliés, parfois mémorables.Un sous genre défini par l'efficacité épurée de ses scénarios, une tendance au dialogue très écrit, et la présence régulière des grandes gueules d'hier à l'écran ; depuis de Verneuil, jusqu'aux randes familles de La Patellière, en n'oubliant pas l'œuvre entière de Costa Gavras, et sa légende, Z.

[Critique] Le grand jeu
En 2015, Parisier, pas à son coup d'essai en matière de cinéma politique, réinvente les bonnes recettes. Comme un voyage au temps passé, de la politique, du vice, un certain rythme dans l'intrigue, et des gueules, de vraies gueules d'aujourd'hui. Dussolier, Poupaud et Poésy, visages autant qu'acteurs, dressent à eux trois une façade élégante, accrochant la lumière au détour de quelques gros plans rares et bienvenus. Là où le film échoue peut être à raviver la flamme de ses glorieux aînés, c'est dans la mise en scène, où l'absence de matière ne fait pas toujours honneur au joli travail d'écriture. C'est quelque chose d'assez régulier dans le cinéma français d'aujourd'hui que cette incapacité régulière à créer " le détail ", la talentueuse rugosité qui fait qu'on s'accroche à l'écran, même dans les instants où le rythme s'absente. C'est une naissance qui se fait par le son, la lumière, le jeu, la moindre petite originalité de mise en scène, elle est rare. De cette pauvreté, le symptôme principal reste cet abominable générique sur fond noir, police blanche, sons de la ville en off. Et à bien y réfléchir, la lacune ne date peut être pas d'aujourd'hui, parce que si ces fameux films d'hier parviennent à séduire, c'est aussi dû à leur grand âge, à leur noir et blanc grainé, à leurs gueules d'autrefois, à tout ce folklore visuel que l'on ne trouve plus, et qui prend du coup des allures de raretés. Qui sait, peut-être que les enfants de nos enfants adoreront les films d'aujourd'hui, qu'ils les trouveront poétiques. Reste que dans le tout venant actuel, c'est parfois compliqué de se raccrocher à quelque chose. Ici, on a le script, plutôt prenant, prenant au film social comme au roman policier, entre réalité et exagération, sur un dosage bien maîtrisé et très agréable à suivre. Un dialogue littéraire, aussi, parfois lourdement débridé, souvent élégant. La mise en scène n'évite pas les grossièretés. Outre cet abominable générique, quelques fautes de jeu peut être et surtout le jeu des clichés et des plans qui ne passent pas, car manquants de détails, corrigé dans la seconde partie du film, où certains ont vraiment de la force. Sur tous les points, photographie, jeu, dialogues qui, s'ils sont de vérité similaire, semblent mieux sonner... le film s'enrichit, en somme. Sauvé par ses gueules, donc. Peut être qu'elles ne sont jamais vraiment parties.

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