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[critique] la Femme au tableau : la Dame contre l'Etat

Par Vance @Great_Wenceslas
[critique] la Femme au tableau : la Dame contre l'Etat

Un projet visant à soigner autant que faire ses peut les traumatismes du passé, à réconcilier un expatrié avec sa nation d'origine et à rectifier les faillites de l'Histoire, n'est pas à prendre à la légère. Surtout lorsqu'on s'appuie sur la vie d'un personnage et les témoignages de ses proches.

C'est bien ainsi que Simon Curtis a envisagé l'adaptation de l'extraordinaire combat mené par Maria Altmann, cette réfugiée qui décida un beau jour de récupérer des tableaux que Gustav Klimt aurait légué à sa famille alors qu'elle résidait à Vienne au début de la Seconde Guerre mondiale. Si encore il s'était agi de petites aquarelles dans une collection privée ! Morbleu, cette petite vieille s'en prenait carrément à l'une des pièces maîtresses d'un musée viennois, la Femme en or qu'on n'hésitait pas à surnommer la "Joconde autrichienne" !

Un travail de reconstitution minutieux, propre au metteur en scène de My week with Marylin, un casting international et un tournage in situ promettaient de plonger le spectateur dans les déboires accumulés tout au long de cette quête de Justice et de vérité qui poussa les dirigeants autrichiens à questionner leur propre légitimité et à faire acte de contrition au nom de tous les opprimés du régime nazi.

Dans ce but, Simon Curtis évite les effets de manche : tout au plus se permet-il de faire varier la tonalité de la photo lorsque sont mises à l'écran quelques séquences du passé de Maria, alors qu'elle était promise à une vie dorée au sein d'une des familles les plus influentes de Vienne. Ces scènes parfois intenses, parfois intimes, sont les plus réussies, tournées en allemand avec des comédiens criants de justesse et ont dû sans aucun doute troubler profondément les autorités municipales qui ont vu (re)défiler dans leurs rues des bataillons de soldats à la croix gammée. Impossible de ne pas être ému par les avanies que subirent les Juifs viennois à l'époque de l'Anschluss, alors que certains estimaient encore que tout finirait par s'arranger tandis que d'autres espéraient déjà obtenir un visa pour s'exiler.

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Mais le plus clair du film demeure cette lente bataille juridique, initiée par Maria, qui engage un jeune avocat plein d'avenir et un peu idéaliste, lequel va prendre à son compte cette tâche qui titille sa curiosité avant de le passionner et de mobiliser toutes ses ressources. Ce jeune homme, Randol Schoenberg, lui-même petit-fils de déporté autrichien, sera successivement l'appui, le soutien et le moteur des revendications de Maria qui, plusieurs fois, baissera les bras devant les lourdeurs administratives, l'énormité des enjeux et l'influence de ses adversaires : après tout, il s'agit bien d'une femme contre une nation entière, chacune revendiquant ces toiles comme siennes. Helen Mirren faisait évidemment partie des actrices capables de donner vie à cette septuagénaire truculente qui n'a pas sa langue dans sa poche. Etrangement, malgré tout son talent et son expérience, elle apparaît un peu empruntée par moments, et on la sent très peu à l'aise avec l'allemand, ce qui ôte de l'authenticité à sa performance. Elle est même parfois agaçante et ne permet pas d'insuffler l'énergie nécessaire pour qu'on se passionne tout au long de ces presque deux heures de métrage. Heureusement, et contre toute attente (il n'était d'ailleurs pas l'interprète prévu initialement), Ryan Reynolds parvient à exister dans son ombre, et à convaincre dans un rôle assez ingrat. On aurait ainsi souhaité que le script donne plus de latitude à sa propre quête des origines, assez touchante. Si Katie Holmes (la jeune femme de Randol) ne fait honnêtement que de la figuration, Charles Dance ( Sherman, le patron de Randol) impressionne toujours autant par sa prestance naturelle, mais n'intervient que trop épisodiquement. Daniel Brühl ( Czernin, le contact de Maria en Autriche) fait son travail très honnêtement mais également pour quelques trop rares séquences.

Grâce à l'opération propos d'un Cinétrafic, j'ai pu ainsi satisfaire ma curiosité à

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des films-culte de 2015, à voir absolument : le DVD et le blu-ray sont sortis le 18 novembre chez M6 Vidéo. Filmé sagement, dans un scénario qui prend son temps (la "bataille" s'étale sur de longues années), la Femme au tableau n'arrive pas à passionner et ses rebondissements, souvent attendus dans ce style de procédé à la David contre Goliath, manquent de force. Cela dit, il n'est pas avare en scènes émouvantes, surtout les reconstitutions de 1940 (bien que bavarde et stupidement énoncée en anglais, la scène des adieux de Maria à ses parents est poignante) et le finale vaut son pesant de cacahouètes : on n'attend finalement que cet instant où une petite bonne femme fait plier un Etat souverain. Incontestablement, à placer dans le best-of des films de 2015.

Plaisant, parfois attendrissant.

[critique] Femme tableau Dame contre l'Etat

Titre original

Woman in Gold

Simon Curtis

Date de sortie France

15 juillet 2015 avec SND

Alexi Kaye Campbell

Musique

Martin Phipps & Hans Zimmer

Ross Emery

DVD M6 SND (2015) zone 2 en 2.39:1 / 110 min

Lorsqu'il fait la connaissance de Maria Altmann, un jeune avocat de Los Angeles est loin de se douter de ce qui l'attend... Cette septuagénaire excentrique lui confie une mission des plus sidérantes : l'aider à récupérer l'un des plus célèbres tableaux de Gustav Klimt, exposé dans le plus grand musée d'Autriche, dont elle assure que celui-ci appartenait à sa famille ! D'abord sceptique, le jeune avocat se laisse convaincre par cette attachante vieille dame tandis que celle-ci lui raconte sa jeunesse tourmentée, l'invasion nazi, la spoliation des tableaux de sa famille, jusqu'à sa fuite aux Etats-Unis. Mais l'Autriche n'entend évidemment pas rendre la " Joconde autrichienne " à sa propriétaire légitime... Faute de recours, ils décident d'intenter un procès au gouvernement autrichien pour faire valoir leur droit et prendre une revanche sur l'Histoire .


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