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[ critique ] (7.5/10) MARGUERITE & JULIEN par Laetitia G.

Par Christian Papia @ChristianPAPIA

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Synopsis: Julien et Marguerite de Ravalet, fils et fille du seigneur de Tourlaville, s’aiment d’un amour tendre depuis leur enfance. Mais en grandissant, leur tendresse se mue en passion dévorante. Leur aventure scandalise la société qui les pourchasse. Incapables de résister à leurs sentiments, ils doivent fuir…

C'est un projet osé que Valérie Donzelli nous a présenté à Cannes cette année ; celui de l'adaptation libre d'un scénario entrepris par Jean Gruault pour François Truffaut, abandonné en cours de route. Lorsque la réalisatrice de « La guerre est déclarée » s'est appropriée l'histoire de Julien et Marguerite de Ravalet, frères et sœurs mais surtout amants passionnés condamnés par la société, on pouvait lui faire confiance pour nous faire vivre un moment de cinéma. « Marguerite et Julien » nous entraîne sans retenue dans cette aventure un peu folle, romanesque et terriblement excitante. Valérie Donzelli est une conteuse. La particularité et la force de son cinéma sont d'extraire l'essentiel des histoires particulières pour créer des récits intemporels et universels. C'était déjà le cas avec "La guerre est déclarée", film autobiographique et très personnel de Valérie Donzelli et Jérémie Elkaïm, relatant leur combat contre la maladie grave de leur fils de 18 mois. Malgré quelques maladresses, il était difficile de ne pas être touché par le récit universel de l'amour mis en péril et de la peur de perdre son enfant. Pour "Marguerite et Julien", l'amour en danger est encore au cœur de l’œuvre. Seulement ici, le danger vient de l'extérieur : le regard porté par la société sur l'amour incestueux d'un frère et d'une sœur. Pour rendre cette histoire plus universelle, Donzelli a choisi de l'écrire comme un conte. En guise d'ouverture du film, un carton nous informe que l'histoire s'est déroulée il y a très longtemps, en évitant soigneusement toute précision, comme pour l'introduction d'un conte pour enfants. Valérie Donzelli  et Jérémie Elkaïm dépouillent le récit  de son cadre pour mieux en tirer l'essence : un amour impossible. 

 "Destin tragique de deux personnages"

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Par ce choix, le scénario, simple et élégant, laisse alors plus de place à une mise en scène audacieuse, pop et stylisée. Des anachronismes sont parsemés çà et là pour nous rappeler que l'époque et le lieu sont secondaires ; le spectateur est tout simplement plongé dans l'ici et maintenant de la passion immortelle. Parfois, ces inexactitudes sont légères et se fondent parfaitement au décor : un détail du costume plus moderne que le reste, une voiture des années 1950 qui fait une apparition soudaine... Mais au fur et à mesure que le danger devient plus prégnant et que le destin tragique des deux personnages se resserre sur eux tel un étau, les anachronismes deviennent plus importants, plus nombreux, parfois gênants. Si l'arrivée de la police en hélicoptère est un clin d’œil au "Peau d'âne" de Jacques Demy,  Valérie Donzelli, à l'inverse de ce dernier, se tient toujours éloignée du second degré. Il est alors dommage que le zèle d'atemporalité en arrive, par instants, à provoquer l'inverse de l'effet souhaité puisqu'il nous tire la tête hors de l'histoire.

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Le cinéma de Valérie Donzelli séduit justement pour sa tendance à se jeter pleinement dans le récit, sans hauteur ni jugement. La réalisatrice joue ainsi habilement avec la dimension incestueuse de l'amour des deux protagonistes. Il nous arrive de nous identifier à eux, de vouloir qu'ils vivent librement leur passion mais l'histoire ne peut être pour autant trop naïve, trop rose, puisqu'elle touche un vice rejeté par tous. En ce sens, la scène du premier instant où Julien et Marguerite, adultes, se caressent est particulièrement magistrale. C'est un jeu. Et comme dans un jeu, la réalisatrice s'amuse à aller et venir entre la candeur enfantine de leurs gestes et l'excitation provoquée par leur désir et leurs corps, eux, bien adultes. À l'image de ce moment, la mise en scène de Valérie Donzelli donne toute son importance aux gestes et aux regards. Jérémie Elkaïm (Les bêtises,Grand départ) et Anaïs Démoustier (Bird people,A trois on y va) développent alors un jeu particulièrement juste, à la fois intense et retenue.Comme pour "La guerre est déclarée", Valérie Donzelli nous touche dans ce qui a de primaire en nous. Et elle le fait avec une détermination et une sincérité déroutante. 

Marguerite & Julien - Bande annonce

LAETITIA G.

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