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The Revenant, d’Alejandro González Iñárritu

Par La Nuit Du Blogueur @NuitduBlogueur

Note : 3/5 

Il y a quelque chose de profondément troublant à adorer autant Birdman, le précédent film d’Alejandro González Iñárritu, et d’être tant déçu par son dernier cru. Cela est encore plus frustrant lorsqu’on adhère entièrement au projet tel qu’il est présenté sur le papier.

Le réalisateur propose ici une adaptation du personnage mythique américain Hugh Glass, un trappeur devenu célèbre pour avoir survécu à une attaque de grizzly. Histoire vraie ou récit amplifié au cour de ses versions, le héros de ce film, laissé pour mort par ses compagnons, se relève pour venger la mort de son fils indien.

A partir de ce rapide pitch, Alejandro G. Iñárritu montre plusieurs objectifs louables : respecter fidèlement les conditions de vie des trappeurs et des Indiens vers 1820, filmer le Grand Nord sans lumière artificielle, et démontrer ses talents de réalisateur. Malheureusement ces trois objectifs sont atteints sans parvenir à toucher le spectateur.

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Crédits photos: Twentieth Century Fox France

Alors que dans Birdman nous avions adoré sa maîtrise des techniques notamment numériques tout en nous abandonnant dans sa mise en scène, nous sommes ici freinés par celle-ci même. Il y a pourtant une scène sublime qui méritera sa postérité parmi les plus belles scènes du cinéma : l’attaque du camp des trappeurs par les Indiens au début du film. Le réalisateur nous plonge directement dans son récit en nous faisant vivre cette bataille depuis l’intérieur. La caméra virtuose passe de personnage en personnage au fil des coups donnés ou reçus. Nous bouillonnons dans cette violence chorégraphiée comme au milieu d’un ballet d’hommes et de chevaux. La scène est frappante et magnifique, impossible à imaginer sans les techniques numériques actuelles. Mais peu après ce sont ces mêmes techniques qui nous sortent du film.

A vouloir être trop réaliste, à vouloir nous placer aux premières loges de ses scènes, le réalisateur montre un peu trop ses artifices et nous laisse trop de place pour y réfléchir. Habitués des making of et des techniques du cinéma, nous ne pouvons plus croire que DiCaprio (Hugh Glass) tombe à cheval d’une falaise. Si nous acceptons ces trucages dans de nombreux films, nous sommes ici gênés car ces effets ponctuent des séquences d’un réalisme épuré, proches du documentaire.

Si nous sommes aussi regardants sur ces effets, c’est que le film nous laisse le temps de réfléchir. Nous sommes bien loin de la mise en scène nerveuse de Birdman et son personnage excentrique. Ici Glass évolue lentement comme un animal en chasse, étape par étape. Tellement lentement que le spectateur a le loisir de s’ennuyer. Nous pensons trop et sortons du récit survival de Glass. Certes le titre The Revenant nous mettait sur la piste d’un personnage revenant de parmi les morts, mais en voulant accentuer le caractère mystique de cet homme force de la Nature, Iñárritu dresse un mini catalogue des risques mortels dans le Grand Nord et de comment Glass parvient toujours à s’en échapper. Les tableaux s’enchaînent donc et se ressemblent, berçant ainsi le spectateur par ses répétitions.

Dans cette progression dans la Nature sauvage, le film dAlejandro G. Iñárritu gagne une comparaison avec l’univers esthétique de Terrence Malick. Un rapprochement peu hasardeux car le réalisateur a engagé Emmanuel Lubezki, le chef opérateur de Malick depuis Le Nouveau Monde. Si on apprécie la référence dans les choix de cadrage de la Nature, on aime moins le copier-coller des flashs backs oniriques et susurrés de Glass avec sa femme et son fils.

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Crédits photos: Twentieth Century Fox France

Impossible de nier les points forts de The Revenant. Le film est à voir pour sa photographie, pour l’interprétation sublime de Leonardo DiCaprio, et pour la scène de l’attaque des Indiens. Mais alors que tous ces éléments semblaient rassemblés pour composer un grand et beau film, l’alchimie ne prend pas et l’émotion n’est pas au rendez-vous.

Nous aurions adoré adorer ce film, et pourtant il nous laisse froids.

Marianne Knecht

Film en salles à partir du 24 février 2016


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