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[Critique] GOOD MORNING ENGLAND

Par Onrembobine @OnRembobinefr
[Critique] GOOD MORNING ENGLAND

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Titre original : The Boat That Rocked

Note:

★
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Origines : Grande-Bretagne/Allemagne/France
Réalisateur : Richard Curtis
Distribution : Philip Seymour Hoffman, Tom Sturridge, Rhys Ifans, Bill Nighy, Emma Thompson, Nick Frost, Kenneth Branagh, January Jones, Chris O’Dowd, Gemma Arterton…
Genre : Comédie
Date de sortie : 6 mai 2009

Le Pitch :
Carl vient de se faire renvoyer du lycée. Sa mère, un peu dépassée, décide de le confier quelques temps à son parrain, un homme fantasque qui se trouve être le patron de Radio Rock, une radio pirate qui émet depuis un paquebot situé en Mer du Nord. Dès son arrivée, le jeune homme fait la connaissance de toute l’équipe des animateurs, tous engagés dans la diffusion d’une musique très mal perçue par les autorités britanniques, qui font tout pour leur mettre des bâtons dans les roues. À bord, Carl va passer par une foule d’émotions au contact de ces résistants du rock and roll, dont la passion et l’engagement, en plus de se montrer très galvanisants, ont contribué à bouleverser un ordre établi à grands coups de riffs…

La Critique :
Il y a des films comme celui-là. Des films que l’on évoque entre amis, en se remémorant les scènes les plus drôles, et qui ont, de par une simple évocation, le pouvoir de nous coller un beau sourire sur le visage. Des films comme Good Morning England, de Richard Curtis, ce scénariste absolument génial dont le travail a largement contribué à redéfinir les contours de la comédie britannique contemporaine. Un artiste complet, tout aussi inspiré quand il passe derrière la caméra et qui ici, signait son deuxième long-métrage après avoir ému la terre entière avec son Love Actually, soit la comédie romantique suprême par excellence.

Good Morning England trouve immédiatement sa place dans la filmographie de Richard Curtis. On retrouve ces mêmes personnages immédiatement attachants, notamment par leur faculté à se montrer fantasques sans tomber dans la caricature. Encore une fois, après Love Actually, Curtis met sur le devant de la scène un grand nombre de protagonistes, à ceci près que pour le coup, tous ou presque sont réunis dans un seul et même lieu. En cela, le film se pose un peu comme une sorte de huis-clos comique, dont la proximité entre les personnages permet de mettre un peu plus en évidence l’amitié, les gentilles rivalités et la passion qu’ils incarnent à tour de rôle ou carrément de concert, quand l’intrigue avance vers son dénouement. En face, sur la terre ferme, Kenneth Branagh prend un malin plaisir à incarner l’autorité anti-rock and roll. L’illustration d’une censure contre laquelle la musique et plus globalement la liberté d’expression ont du se battre pour avancer et faire progresser des courants de pensées ici véhiculés par la puissance d’une musique galvanisante dont la portée va bien au-delà de son seul sens premier.
Dans Good Morning England, le rock est glorifié. Il est décrit, par le biais de ces DJ’s engagés dans une lutte avec le gouvernement, comme le moyen de se sortir des carcans et de laisser libre-court à sa personnalité, y compris (et surtout a-t-on envie de dire) si cette dernière ne colle pas avec les canons de son époque. À travers les riffs de Jimi Hendrix, les harmonies des Beach Boys, les bluettes des Turtles ou la hargne des Kinks, le long-métrage exprime son amour pour ces artistes qui en leur temps, ont fondé un mouvement encore aujourd’hui bien vivace, car basé sur le passage de flambeau entre artistes, qu’ils soient directement acteurs ou « simple auditeurs ». Le rock and roll, Richard Curtis l’utilise comme liant, mais aussi comme moteur. Dans Good Morning England, il est partout. Sur le pont du bateau, dans la cale, dans les studios des animateurs, dans leur casque et bien évidemment dans les milliers de postes de radio qui relayaient les notes à travers le pays, comme pour affirmer que tout n’était pas perdu. Que quelqu’un écoutait et comprenait et qu’en plus, si on se laissait suffisamment aller, tout ceci pouvait s’avérer sacrément jubilatoire.

Good-Morning-England-cast

Car oui, Good Morning England est un film absolument jubilatoire. Le sens de la mesure de Richard Curtis est parfait. Sa déclaration d’amour au rock and roll, comme musique du cœur, de l’âme et des tripes, touche au vif les vrais amateurs.
Cela dit, il ne s’y repose pas non plus entièrement. Son long-métrage ne se contente pas d’être un formidable film rock. Il est aussi une comédie rondement menée, aux dialogues finement ciselés. Des répliques que les acteurs subliment en permanence. En première ligne, Philip Seymour Hoffman trouve l’un de ses meilleurs rôles, prouvant qu’il pouvait absolument tout jouer. Qu’il s’agisse d’un gars introverti comme le Scotty de Boogie Nights, d’un écrivain complexe comme Truman Capote ou d’un type investi d’une mission par les dieux du Rock comme Le Comte, son personnage de Good Morning England. Un gars acharné, drôle, charismatique, simple et enjoué. Rhys Ifans pour sa part, incarne à lui tout seul le flegme d’un certain rock britannique. La classe que l’on retrouve dans beaucoup de groupes de l’époque, mélangée à une impertinence illustrée par un look fantasque et par un sens du devoir exemplaire doublé d’une insouciance très inspirante. Il convient aussi de mentionner Chris O’Dowd, ici touchant plus qu’à son tour, parfait de bout en bout, l’impérial Bill Nighy, qui campe un chef de troupe à l’image de la joyeuse entreprise qu’il gère, le fabuleux Nick Frost, lui aussi dans un de ses meilleurs rôles, séducteur jusqu’au bout des ongles, sans oublier Emma Thompson et les superbes January Jones et Gemma Arterton, qui pour leur part personnifient le glamour de tout un âge d’or bercé par des airs depuis belle lurette gravés dans la pierre.
Une joyeuse équipe, savamment bariolée, à laquelle se confronte le jeune Tom Sturridge, dans un rôle qui permet de booster considérablement l’immersion. Ce jeune gars un peu paumé c’est nous. C’est avec lui que nous pénétrons sur le bateau et c’est toujours à ses côtés que nous faisons la connaissance de tout le monde. Ses premiers coups de cœur sont aussi les nôtres. Son expérience nous rappelle les nôtres, et sa naïveté ainsi que sa propension à embrasser le monde avec un regard nouveau à mesure que la musique et tout le reste influent sur sa personnalité, s’avèrent déterminantes dans la structure de récit.

Aventure unique en son genre, film choral puissant, Good Morning England est régulièrement ponctué de tubes, qui appuient l’éloquence de son propos. The Who, The Box Tops, The Easybeats, Cat Stevens et David Bowie éclairent de leur musique un conte moderne qui se nourrit de leur force. Dans le rire et l’émotion, car bien souvent, le film sait aussi se montrer très touchant. Sans faire preuve d’un quelconque cynisme, il sait trouver les mots justes pour aller titiller la corde sensible des amateurs de musique, qui savent bien qu’il n’a jamais été question que d’une simple succession de notes et d’un joli refrain. La musique, Richard Curtis la prend complètement au sérieux et en même temps, il sait aussi faire preuve d’un second degré salvateur dont l’un des principaux effets secondaires et d’empêcher le bateau de couler dans la guimauve.

Rythmé à la perfection, jamais vain, tour à tour hilarant et pertinent, sexy, et excitant, Good Morning England a su acquérir le statut de film culte dès sa sortie. En prenant pied dans les années 60, avec ses animateurs radio joyeusement azimutés, en parlant à la fois d’amour, d’amitié, de musique, de la famille et de son époque, le tout avec une infinie justesse, il s’est imposé comme une sorte de conte initiatique hors du temps. Des caractéristiques lui permettant de toucher un très vaste public.
Mais bien sûr, c’est aux amateurs de rock que Richard Curtis s’adresse en priorité. À tout ceux qui, encore une fois, ont compris depuis bien longtemps, que quand on parle de rock, on ne parle pas que de musique. Avec son film, le réalisateur ne fait que traiter de tout ce qu’incarne ce mouvement. Son côté social, l’appel à la révolte qu’il a illustré (et qu’il illustre encore), de ses héros parfois sacrifiés et du pouvoir de ces compositions qui font partie de nos vies d’une façon ou d’une autre.
Pour Curtis, le rock est un moyen de résister. De se battre, sans céder à la brutalité. Curtis qui se retrouve un peu dans tous les personnages du film. Dans tous ces DJ’s qui ne doutent pas un seul instant que la musique peut changer le monde.
Après tout ça, même au bout du 15ème visionnage, il est tout à fait légitime de verser sa larme quand résonnent les premières mesures du Let’s Dance de Bowie, après un dénouement ô combien épique.

@ Gilles Rolland

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 Crédits photos : StudioCanal


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