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Asthme et dépression

Par Dunia

Recentrage

Je suis revenue de vacances depuis plus d’une semaine et je ne suis pas encore recentrée.

Mon asthme reprend de plus belle. Pas aussi ravageur que cette hiver, très désagréable quand même. L’humidité jurassienne me coupe le souffle. Angèle prétend que je devrais reprendre de la cortisone. Je n’ai pas mesuré ma capacité respiratoire au peek-flow -oui je sais c’est mal- mais si j’en étais au stade d’avoir à lourdement me médicamenter, je le sentirais.

Je n’ai pas l’impression de m’être réappropriée mon chez moi. Depuis mon arrivée et jusqu’à hier, j’ai effectué une ou deux douzaines d’aller-retour entre mon logis, celui d’Angèle et celui de Madeleine, afin de récupérer ma ménagerie. Mon attention s’est beaucoup portée sur Angèle chez qui j’ai passé beaucoup de temps afin d’amortir le choc du retour -merci ma douce- et sur mon zoo. Hier j’ai ramené le dernier rat ainsi que l’ultime cage qui se trouvaient encore chez Madeleine. En ce qui concerne ma vie, depuis le début de la semaine je me concentre sur les factures qu’on me réclame. Pas facile d’obtenir quelqu’un au téléphone de nos jours. Après avoir attendu des plombes à écouter une voix électronique suivie d’une musiquette niaise, on finit par nous dire, lorsque quelqu’un décroche enfin, “les collaborateurs qui peuvent répondre à vos questions sont tous occupés. Laissez-nous vos coordonnées on vous rappellera”. Ça fait trois jours à présent que j’attends un coup de fil d’une assurance. Rien. J’en viens à me demander si je ne me suis pas plantée dans le numéro en donnant mon téléphone. Idem pour un service de l’Etat que je ne parviens pas à joindre.

A présent j’ai besoin de solitude. Depuis plus d’un mois, je ne cesse de courir, de côtoyer des gens. J’ai l’impression de m’être dissoute en eux. De n’être plus moi-même. Vicky devait passer ce soir. Je l’ai appelée pour annuler notre rendez-vous. Besoin de calme. De ne plus parler. De réfléchir. De m’occuper de me bêtes. De moi. D’investir à nouveau ma maison. D’écrire. Depuis que j’ai arrêté le Prozac certaines choses sont devenues plus difficiles. Je manque d’énergie et le minimum de sens de l’organisation que j’avais acquis s’en va à vau-l’eau. Madeleine dit que je devrais reprendre l’anti-dépresseur. Pour l’instant je m’y refuse. Je m’explique. J’ai arrêté l’antidépresseur après ma énième tentative de psychothérapie ratée. Après un début de thérapie relativement réussi, ma psy qui voulait me bourrer de neuroleptiques afin que je m’intégre socialement en travaillant dans le premier boulot harassant et mal payé qui me tomberait sous la main -je rappelle que je n’ai qu’une formation de vendeuse, mais que la vente, à l’instar de l’usine, me donne des envies de suicide car en sortant de ce type de travail la fatigue qui m’habite m’empêche d’écrire or, il me faut écrire pour avoir le courage de vivre- voyant que je résistais à ses plans, a fini par me casser, telle une poupée qu’une fillette, lasse de ne parvenir à faire parler, détruirait. D’après ma thérapeute -dit en d’autres termes mais il n’y a guère besoin d’avoir usé son string trois ans en fac littéraire pour en comprendre le sous-entendu- je suis soit une simulatrice, soit une personne qui ne veux pas se soigner. L’écriture? Quelle prétention vouloir devenir un auteur de talent lu par autrui! Je peux m’adonner à l’écriture durant mes congés de salariée, juste pour moi, pour la satisfaction d’écrire en dilettante! Mon blog? Un passe-temps! Un loisir! Un blog ce n’est pas de la vraie littérature! Je lui ai pourtant dit qu’il arrivait parfois que presque 500 personnes passent dans la journée. Cela ne l’a pas impressionnée. Ce n’est pas imprimé sur papier! Ce ne peut-être important. D’ailleurs, elle m’a vivement déconseillé d’y décrire nos séances. Bonne fille, prête à jouer le jeu de l’analyse, j’ai cessé de les raconter. Résultat: cette dame aux gentilles allures de grand-mère en qui j’avais confié pour me donner de l’hardiesse, le courage d’accepter qui je suis, m’a totalement inhibé l’inspiration. De plus, sur les soixante minutes de séance, pendant 30 minutes elle ne parlait que d’elle! Super professionalisme! La facture? Plus de 2000 francs les dix séances, pour me sous-entendre que je ne suis qu’un parasite de la société qui croit avoir du talent alors que je n’en a pas parce qu’un “vrai écrivain écrit tous les jours dans le but d’étre publié” -texto cette fois-ci- or je n’écris pas tous les jours dans le but d’être publiée -et mon blog c’est quoi? De la soupe aux cailloux? Et mes lecteurs quotidiens que sont-ils? De pauvres imbéciles parasites de la société tout comme moi qui ont du temps à perdre sur mon blog?- .Deux mille balles pour me culpabiliser, pour castrer le seul talent -fut-il médiocre- que j’ai. Honnêtement, je me demande qui est parasite social? Moi qui tente de m’en sortir depuis des années en me privant de tout ce dont je peux me priver, y compris de la compréhension et du respect de la majorité des gens où de certains des miens, ou elle qui parvient à soutirer deux milles balles à une assurance pour un résultat que je ne qualifierais pas de nul, mais de carrément contraire à celui escompté, donc plus proche du dangereux que de l’improductif?

Oui, ma thérapie ratée et l’une des raisons pour lesquelles j’ai arrêté l’antidépresseur. J’ai voulu vérifier si j’étais une simulatrice ou pas, tout en replongeant dans des états d’âme qui m’obligent à écrire. En ce qui concerne la simulation non, je ne suis pas une simulatrice. Depuis l’arrêt du Przac, je suis à nouveau redevenue un être ultra-sensible, hautement émotionnel, colérique, parfois dure et froid comme le marbre. Je pleure pour un oui, pour un non, pour le bonheur comme pour le malheur. Il m’arrive aussi de rester totalement indifférente à ce qui m’entoure, très clinique, presque psychopathe. Sans antidépresseur je suis tout cela à la fois. Toujours dans les extrêmes. Sans milieu. L’autre jour, entendre les Portugais fêter bruyamment la victoire de leur équipe de football, m’a déclenché un flot de larmes irrépressible. Des larmes positives. J’étais contente pour eux. Des larmes quand même. Sans médicament, je suis telle une éponge qui boirait la moindre goutte d’hystérie collective. Et ce depuis toujours. Gamine, lors des grandes manifestations festives où les gens montraient bruyamment leur joie, je pleurais systématiquement, ce d’aussi loin que je m’en souvienne, c’est-à dire depuis l’âge de deux ans. Ça déstabilisait beaucoup mes parents. Ils croyaient que j’avais peur. Je n’avais pas peur. J’étais juste dépassée, secouée, agressée par les émotions des autres.

L’arrêt de Prozac exacerbe également mon envie d’écrire. Je suis capable d’écrire sous antidépresseur mais pas suite à une castration, car il agit tel un anesthésiant. J’éprouve la gène de l’opération, la fatigue de l’ablation, l’envie de me désagréger dans le néant horrifiée par la perte que je viens de subir, mais je ne perçois pas assez de douleur pour avoir envie de crier. Pour écrire je dois être ou parfaitement cérébrale avec la certitude de posséder un minimum de talent, ou alors castrée sans sédatif, endolorie au point d’hurler sans les moyens de me demander si intellectuellement cela en vaut la peine ou pas. Je crie. Point barre. C’est ainsi. Je n’ai pas d’autre choix.

Non Vicky, en ce moment je n’ai envie de voir personne. Je concentre mon énergie à tenter de me voir moi-même. Ce n’est déjà pas si mal.

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Photo prise après mes ensoleillées vacances en Espagne. Depuis mon retour il fait gris, froid et pluvieux. De belles couleurs aussi parfois, même si j’apprécierais grandement du soleil et de la chaleur.


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