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Serge Gainsbourg-Percussions-1964

Publié le 02 avril 2016 par Numfar
Serge Gainsbourg-Percussions-1964

OCTOBRE 1964

Après l'album de jazz "Confidentiel", une autre idée naît du cerveau fertile du compositeur: un album thématique consacré aux rythmes et chants de l'afrique centrale, un album bâti autour des percussions...

Serge Gainsbourg propose à sa maison de disques de partir enregistrer en Afrique noire (ce qui aurait été une première, vingt ans avant la world music) avec des musiciens et choristes locaux.

-Et pis quoi encore? répondent en choeur les patrons de Philips qui voient les ventes de disques du sieur Gainsbourg dégringoler d'années en années.

C'est donc à Paris, avec des musiciens parisiens et des choristes parisiennes à qui on va demander de prendre des accents de "négresses" que le disque sera enregistré.

(Je sais, le terme est choquant et je m'en excuse, mais il est représentatif de l'esprit encore très colonialiste et paternaliste de l'époque.

-Pourquoi, ça a changé?

-Euh je crois oui... Enfin j'espère...).

Ce qui aurait pu prendre des allures de catastrophes franco-françaises, devient un nouveau chef d'oeuvre du sieur Gainsbourg: le bien nommé "Percussions".

Joanna (Serge Gainsbourg)

Là-bas c'est naturel(Serge Gainsbourg)

Pauvre Lola(Serge Gainsbourg)

Quand mon 6'35 me fait les yeux doux(Serge Gainsbourg)

Machins choses(Serge Gainsbourg)

Les sambassadeurs(Serge Gainsbourg)

New York USA(Serge Gainsbourg)

Couleur café(Serge Gainsbourg)

Marabout(Serge Gainsbourg)

Ces petits riens(Serge Gainsbourg)

Tatoué Jérémie(Serge Gainsbourg)

Coco & co(Serge Gainsbourg)

Et ça démarre très mal avec un "Joanna" hyper caricatural... Aïe aïe aïe...

"Joanna est aussi grosse qu'un éléphant,

C'est la plus grosse de toute la Nouvelle-Orleans,

Et pourtant,

Joanna, Joanna

Joanna tu sais danser léger léger."

A peine moins pire, "Là-bas c'est naturel"...

"Là-bas c'est naturel,

Là-bas au Kenya,

Pour tous les naturels c'est OK.

Chacune est en deux pièces moins une,

Chacun dans ce noir paradis,

En monokini".

L'accident de parcours semble inévitable, mais la troisième chanson change de trajectoire in-extremis et nous offre la première gemme de ce disque: "Pauvre Lola" avec un texte de génie et le rire de France Gall en bonus. (et non celui du sergent. Je sais j'assume pas cette blague, tant pis).

"Faut savoir s'étendre, sans se répandre,

Pauvre Lola,

Faut savoir s'étendre, sans se répandre,

C'est délicat.

...

Il est des mots tendres qu'elle aime entendre,

Tendre Lola,

Oui quelques mots tendres,

Devraient attendrire Lolita".

Quand on vous l'avait dit qu'il irait chercher sa Lolita chez les yé-yés.

Retour au jazz et retour à la déprime avec "Quand mon 6'35 me fait les yeux doux".

"Aïe! Mourir pour moi,

Me buter pourquoi?

Histoire d'en finir, une bonne fois.

C'est une idée qui me vient,

Je ne sais pas d'où,

Rien qu'un vertige que j'ai souvent,

Comme ça pour rire Pan! Pan!"

On continue dans un jazz ouaté, ambiance trois heures du matin avec "Machins choses".

"Avec machine,

Moi machin,

On s'dit des choses,

Des machins,

Oh pas grand chose,

Des trucs comme ça."

"Les sambassadeurs" nous fait partir à Rio à temps pour le carnaval, un carnaval bruyant, casse-tête et casse-bonbons.

"Les sambassadeurs sont venus en dansant,

Les sambassadeurs sont venus en dansant,

Armés de tubas jusqu'aux dents."

"New York USA": attention chef d'oeuvre révolutionnaire... Des noms de buildings, des percussions, du rythme et vingt ans d'avance sur tout le monde...

"J'ai vu New York, New York USA,

J'ai vu New York, New York USA,

J'ai jamais rien vu d'au-

J'ai jamais rien vu d'aussi haut,

Oh c'est haut, c'est haut New York,

New York USA."

Honteusement pompé sur une chanson de Myriam Makeba, "Couleur café" reste toutefois, un classique de la chanson française des sixties.

"L'amour sans philosopher,

C'est comme le café,

Très vite passé,

Mais que veux-tu que j'y fasse,

On en a marre de café,

Et c'est terminé,

Pour tout oublier,

On attend que ça se tasse."

"Marabout" est un simple jeu avec les mots, simple mais efficace, et démontre s'il fallait encore le faire, que Gainsbourg maîtrise la science du rythme. Ce titre possède plus qu'un point commun avec le "Jingo" popularisé par Santana cinq ans plus tard.

"Y'en a marre, marabout,

Bout d'ficelle,

C'est la vie,

Vie de chien,

Chien de temps,

Tant qu'à faire,

Faire les cons,

Qu'on se marre,

Marabout,

Bout d'ficelle,

C'est la vie,

Vie de chien,

Chien de temps,

T'en fais pas,

Pamela."

Chef d'oeuvre du chef d'oeuvre, cerise sur le gâteau, le sublime "Ces petits riens" qu'il revisitera quelques fois au long de sa carrière.


"Mieux vaut n'penser à rien,

Que n'pas penser du tout,

Rien c'est déjà,

Rien, c'est déjà beaucoup.

On se souvient de rien,

Et puisqu'on oublie tout,

Rien, c'est bien mieux,

Rien c'est bien mieux que tout.

...

Mieux vaut pleurer de rien,

Que de rire de tout.

Pleurer pour un rien,

C'est déjà beaucoup.

Mais vous, vous n'avez rien dans le coeur et j'avoue,

Je vous envie,

Je vous en veux beaucoup.

Ce sont ces petits riens qui me venaient de vous,

Les voulez-vous?

Tenez, que me voulez-vous?

Moi je ne veux pour rien au monde,

Plus rien de vous,

Pour être à vous,

Faut être à moitié fou."

"Tatoué Jérémie" est sympa, au mieux rigolo...

"Parce qu'il avait cette fille dans la peau,

Et pour ne pas l'oublier,

Il se l'était fait tatouer, tatouer...

Juste à la place du coeur,

Tatoué Jérémie

Il s'est fait tatouer un coeur,

Jérémie

Tout le monde en coeur:

Tatoué un coeur, tatoué Jérémie.

On peut lire à l'intérieur:

Jérémie

De même sur les avant-bras,

Tatoué Jérémie

De même où ça ne se voit pas.

Jérémie

Encore une fois:

Où ça ne se voit pas, Tatoué Jérémie

C'est à dire un peu plus bas.

Jérémie."

Et on termine avec un jazz déprimé: "Coco & co", qui est une sorte de suite à "No no thanks no".

"Ecoute, le gars qui jazzote,

T'entends? Ah comme il saxote,

Il est camé à zéro!

Coco & co.

...

Celui qui joue pas qui sirote,

C'est un des gars du Blue Note,

Mais lui ça s'rait plutôt la,

Marijuana..."

Après ce disque, Gainsbourg abandonne le jazz, puis en 1965, il abandonne les concerts, et vu les faibles ventes de ce disque, il abandonne également les disques 33 tours.

Pour avoir un nouvel album conceptuel de Serge Gainsbourg, il va falloir attendre sept ans, et ce sera le cultissime "Melody Nelson".

© Pascal Schlaefli

Urba City

2 April 2016

Du même auteur:

Serial Angel Vol.1:

Anastase & Perfidule (2014-gratuit sur Itunes)

The Blacksouls (2015)

Serial Angel Vol.2:

Runaway Suzi (à paraître)

 Blog: Serialangel.centerblog.net

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