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Critique : Malena

Par Lewis_ @LewisCritique

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Synopsis : Au printemps 1940, Mussolini a déclaré la guerre à la France et à la Grande-Bretagne. La ville sicilienne de Castelcuto est en liesse. Renato Amoroso, un garçon de treize ans, est heureux pour d'autres raisons. Il vient de recevoir sa première bicyclette et de tomber sous le charme de Malena, une ravissante veuve de guerre qui fait tourner la tête à tous les hommes du village et attise la haine des épouses jalouses. Renato, littéralement envoûté, la suit partout avec son vélo. Mais Malena est victime des refoulements et des convoitises des habitants de Castelcuto. Le petit garçon va trouver le moyen de l'aider, et grâce à elle, il apprendra les leçons de la vie.

Dans Malena, Giuseppe Tornatore plante son décor au sein d’une Italie fasciste nauséabonde, à l’aube des années 40, un contexte qui, bien que très riche, ne reste finalement qu’un paysage où sont mis en scène des personnages qui lui font de l’ombre. Le propos du film m’a d’abord plutôt surpris, et dans le bon sens du terme, puisqu’en effet, j’y ai trouvé le choix des thèmes évoqués assez audacieux et abordés de manière très poétique par Giuseppe Tornatore.

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Ici, l’accent est porté sur un jeune adolescent de treize ans, découvrant peu à peu sa sexualité, sous le toit d’une famille rigide et où le sexe semble particulièrement tabou. Effectivement, Renato (Giuseppe Sulfaro), est victime d’un père tyrannique et hystérique, qui lui fera bien des fois part de ses idées arbitraires et violentes. Comme tous les hommes de la ville où se déroule cette histoire, Castelcuto, Renato n’est pas insensible au charme de Malena, loin de là, puisqu’il en tombe rapidement fou amoureux, lui manifestant d’ailleurs un certain respect. Ses camarades de classe eux, affichant davantage leur intérêt pour la plantureuse Malena de manière crue et vulgaire, la réduisant à ce qu’elle est pour visiblement, tous les habitants de cette ville : l’objet du fantasme. Une femme qui suscite l’euphorie chez le moindre homme qu’elle daigne croiser, et qui à l’instar de l’exaltation qu’elle s’attire des hommes, amène à elle la haine folle des femmes qui l’entourent. Nous spectateurs, ne connaissons finalement pas Malena, nous la discernons via le regard que lui portent ceux qui la côtoient de près ou de loin, mais n’acquérions pas réellement la possibilité de nous forger notre propre opinion sur elle. D’un côté les hommes l’acclament pour son corps qu’ils aimeraient dévorer lors d’ébats, d’un autre, les femmes la voudraient morte, et d’un dernier : nous avons Renato, qui affirme qu’elle n’a jamais aimé qu’un seul homme et qui la dresse au rang de déesse.

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D’ailleurs, dès le début du film, Malena, qui est campée par la superbe Monica Bellucci, apparaît presque comme une figure mythifiée. Une sorte de nymphe. Qui arpente ces rues italiennes, muette, le visage sobre, sans grande expression. Durant tout le film notamment, on observe que le personnage de Monica Bellucci s’exprime peu, jusqu’à cette scène cruelle, où Malena est humiliée et sauvagement maltraitée par les femmes qui la haïssent et la réduise à une vulgaire catin. Durant ces quelques minutes, elle apparaît on ne peut plus vraie, laissant tomber un masque qu’on lui a lacéré, avant de se résoudre à quitter la ville, chassée par les harpies qui l’ont brutalisée. Le jeune adolescent qui se dirait être son plus grand admirateur, Renato, assistera dépité à ces cruautés, et avec une impuissance certaine.

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La mythification qu’il fait de Malena s’apparente à une trame pour le film, puisque tout en lui dédiant énormément, se masturbant en pensant à elle entre autre, il sait bien qu’elle ne restera qu’un objet de fascination pour lui. Et à l’instar de pouvoir construire quelque chose de charnel avec elle, il se voue à l’aider comme il le peut, et ce, toujours dans un respect profond. Admirant Malena, comme une idole, une muse, une inatteignable perfection, devant ses yeux. Et quand la majorité s’en écartera par pitié ou par pure haine, il sera toujours là, incarnant cette célébration du féminin que met en scène Giuseppe Tornatore, ici. Pour tenter une comparaison farfelue, Malena est comme Edward aux mains d'argent, elle est dotée d’un don, celui de la beauté, qui lui attire des convoitises, tout comme une répulsion violente, et chez le héros de Burton, le don s’illustre par les mains de ciseaux, qui lui amènent plus ou moins les mêmes intentions venant d’autrui. Jugée dans cet univers, où elle suscite à la fois une fascination indubitable mais aussi une aversion profonde, dans un environnement bouillant, une minorité lui porte pourtant une bienveillance sans failles, chez Burton il s’agirait de Kim Boggs ou Peg Boggs, qui sauvent Edward de l’intolérance effrayante des habitant(e)s du quartier où elles résident, et ici du jeune Renato, le tout sur une musique bouleversante d’Ennio Morricone. Malena est un conte d’une riche poésie, aspect qui contraste avec la cruauté inqualifiable de la page d’Histoire où il s’exprime.

Lewis 


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