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Street-art : tes papiers ?

Publié le 23 avril 2016 par Pantalaskas @chapeau_noir

urban artAu moment où s'ouvre à Paris "Urban Art Fair, " première foire internationale uniquement dédiée à l’art urbain", on peut s'interroger sur l'identité de ce street art auquel désormais on réserve les cimaises des salons, des galeries, des centres d'art. Depuis quelques années, pour ne parler que de la France où s'exerce ce regard témoin, le mouvement de repli (ou de conquête) des artistes du street-art  en direction des lieux intérieurs protégés s'est accentué de façon très sensible.

"Le Street-art au tournant"

L'universitaire Christophe Genin, dans "Le Street-art au tournant" analysait sans indulgence ce phénomène: "Ainsi, le Street-art est entré dans l'industrie de la mode, devenue une rubrique du marché de l'art et du design qui promeut des oeuvres cessibles (toiles, objets d'art, installations, vidéos, vêtements, accessoires de mode, objets de consommation courante), faites dans le style de la rue pour satisfaire une clientèle fascinée ou divertie par l'héroïsme canaille associé à la figure du graffeur, que cette clientèle soit un adolescent mimétique en mal de modèle d'identification ou une grande bourgeoise blasée en mal de frisson".
Plusieurs fois dans ce blog, à l'occasion d'expositions significatives, ce penchant a été signalé : exposition C215 "Douce France" au Palais Bénédictine à Fécamp en 2014, "Jef Aérosol, 30 ans de pochoirs" à la Collégiale Saint-Pierre-le-Puellier à Orléans en 2012 notamment.

Tour Paris 13

Tour Paris 13

"Tour Paris 13"

Il faut rendre justice à la manifestation de "Tour Paris 13, l'événement Street Art" qui, en 2013, offrit une expérience unique: c'est à une centaine d'artistes de street art venus de seize pays qu'avait été confié par le directeur de la galerie parisienne Itinerrance Mehdi Ben Chelkh le projet  d'occuper presque totalement la surface intérieure (sols, murs et plafonds, soit 4.500 m²) d'un immeuble du 13ème arrondissement à Paris. Cette Tour de Babel du street-art  dépassait largement le cadre d'une pratique confinée entre les murs : destinées à disparaître au terme de la manifestation, les réalisations des street-artistes ont jailli aux yeux de tous quand les pelleteuses mécaniques ont détruit l'immeuble et laissé apparaître les strates de cette histoire comparable à aucune autre, dévolue à une non-marchandisation, rebelle à toute conservation." Tour Paris 13" aurait-il constitué le chant du cygne pour un street-art désormais devenu un art de salon ?
Il semblerait que tous ne se résignent pas à cet abandon de ce qui fait la nature même du street-art : la rue, l'espace collectif.

GR Street-art

Un projet original, actuellement à l'étude, imagine la création d' un itinéraire de Grande Randonnée dédié au street art éphémère entre le 13e arrondissement (haut lieu du street art dans Paris) Ivry sur Seine et Vitry sur Seine. Ce parcours pourrait être arpenté comme une galerie d'art à ciel ouvert.

GR street art
L’itinéraire de EYP (Enlarge your Paris), dix kilomètres environ, «a été repéré en fonction des oeuvres qui existent déjà », notamment à Vitry (Meushay, Bebar, C215…). Mais pour «combler les trous », à Arcueil notamment, l’association table sur la commande d’une quarantaine d’ oeuvres. Et de préciser qu’elle a «veillé » à faire appel à des street artists «de tous âges, connus et moins connus », «très différents, que ce soit dans leur technique ou dans leur approche artistique ».(Source La Parisien).
L'ancrage à Vitry sur Seine ne doit rien au hasard : dans cette commune de la banlieue parisienne, dès le début des années soixante dix, une politique de soutien à l'art contemporain a été mise en place pour inciter les organismes publics et privés à accueillir dans leurs espaces, les oeuvres d'artistes, peintures, sculptures créées sur leur lieu de destination. Quand à Arcueil où l'on ne compte plus la présence d'artistes depuis Julio Gonzalès jusqu'à Claude Viseux, Vladimir Velickovic, François Arnal, Antonio Ségui pour n'en citer que quelques uns, l'ouverture sur l'art n'est plus à démontrer.
Quand bien même la vocation subversive du street-art quasi clandestin des origines  n'y trouverait pas tout à fait son compte, le projet de GR du street-art a le mérite de rétablir une valeur première de ce mouvement urbain : vivre dans la rue.


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