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Tour : l'arche dénouée

Publié le 08 juillet 2016 par Jean-Emmanuel Ducoin
Dans la septième étape, entre L’Isle-Jourdain et le Lac de Payolle (162,5 km), victoire du Britannique Stephen Cummings. Le maillot jaune Greg Van Avermaet reprend du temps aux favoris. Le col d’Aspin est fatal à Thibaut Pinot, qui perd plus de deux minutes…

Tour : l'arche dénouée

Thibaut Pinot.

Lac de Payolle (Hautes-Pyrénées), envoyé spécial.
Quand nuages et grisaille cohabitent avec une certaine chaleur et s’invitent sur les premiers escarpements des Pyrénées, le grondement de la course ne tonne jamais bien loin, comme si l’imminence de quelque-chose de puissant allait se produire au moindre lacet. Hier, entre L’Isle-Jourdain (dans le Gers) et le Lac de Payolle (162,5 km), qui domine Saint-Marie-de-Campan et les contreforts du Pic du Midi de Bigorre, le chronicoeur, qui continue de lutter contre une conception atterrée de la course, attendait avec gourmandise l’ascension éthérée du col d’Aspin (première catégorie, 1490 m), avec douze kilomètres de montée à 6,5% de moyenne. Il l’attendait d’autant plus qu’une forme de désolation a gagné la caravane depuis une semaine, tant les scénarios quotidiens ont déçu notre ambition de frénésie. 
L’impression de déception, ce vendredi, fut quelque peu identique, même si l’émotion d’Aspin possède toujours une saveur particulière. Il fallut pourtant attendre la descente vers le Lac de Payolle, la course étant déjà entendue, pour connaître un événement inattendu. Ce fut l’image du jour, tellement insolite et surréaliste qu’elle nous tira (pardon) un rictus d’amusement. Car soudain l’arche gonflable du dernier kilomètre tomba sur la tête du groupe des favoris, avec, pour conséquence principale, de provoquer la chute du Britannique Adam Yates (menton en sang). Ce n’était plus le Tour de France, mais l’arche dénouée ! Mais pas de panique. « Les temps, pour calculer les écarts, ont été pris aux 3 kilomètres », précisa immédiatement le commentateur sur Radio-Tour. Une information confirmée par le directeur de course, Thierry Gouvenou, qui évoqua, dieu merci, « un incident majeur ».

Mais revenons à la course, en mode mineur. La première journée dans les Pyrénées a en effet consacré un Britannique, Stephen Cummings, 35 ans, vainqueur en solitaire, qui faussa compagnie au groupe d’échappés à 27 kilomètres de l'arrivée, adjugé à sept kilomètres du sommet d’Aspin. Parmi les attaquants, notons la présence d’un revenant: l'Italien Vincenzo Nibali, finalement débordé dans le final d'Aspin (quatrième place). Signalons également que le Belge Greg Van Avermaet a non seulement conservé le maillot jaune après ce premier volet du triptyque pyrénéen, mais, lui aussi présent dans l’escapade du matin, il a encore augmenté son avance sur les Froome et autre Quintana… Le Belge semble n’effrayer personne, malgré ses six minutes d’avance au général sur tous les favoris, tous sauvés de l’arche et parvenus groupés (même si Warren Barguil donna des signes inquiétants de lassitude). Question: parlerons-nous encore de Van Avermaet dans quarante-huit heures, après le franchissement de neuf cols majeurs? En revanche, nous n’oublierons pas de sitôt une autre image du col d’Aspin. Celle du Français Thibaut Pinot, d’abord décramponné, puis irrémédiablement lâché par les meilleurs dans Aspin. Le leader de la FDJ ambitionnait un podium à Paris, voire meilleur destin encore, mais nous ne vîmes qu’un bloc de marbre alourdir son visage en dedans, qu’il soulevait à peine sous l’effort, en perdition, avant de le laisser retomber dans un bruit sourd entre ses tempes finement veinées et crénelées de sueur. Une vraie défaillance ! Sans doute pensait-il, à ce moment précis, à ce poids sourd, central et magnétique, dont la lourdeur devait lui dire intérieurement, «le Tour est fini, le Tour est fini»… Sur la ligne, le Français accusa un passif de plus de deux minutes. Sans doute insurmontable. Devant le bus de son équipe, ce fut un homme presque piteux, mais lucide, capable du moins d’assumer sa défaillance, qui évoqua sa détresse. «Je n’avais pas de jambes, déclara-t-il. Je n’ai rien d’autre à dire, il n’y a aucune excuse à chercher. C’est presque tout le travail d’une année qui s’envole dans un seul col…» Thibaut Pinot vaincu. L’arche dénouée. Drôle de journée. 

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