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L’histoire de l’automne (39)

Publié le 13 juillet 2016 par Nicolas Esse @nicolasesse

Ève s’avance et touche du bout des doigts l’écorce de l’arbre planté devant elle. Elle pose ses deux mains bien à plat sur le tronc. Elle pousse de toutes ses forces. Sous la plante de ses pieds nus, elle sent le pli dur formé par l’épine dorsale d’une racine qui émerge des profondeurs de la terre. Elle pousse encore. De toutes ses forces. Pourquoi les arbres voudraient voler ? Moi je flottais dans la lumière. Je flottais, c’est tout. Maintenant, j’ai froid aux pieds. La première femme, je n’ai pas envie d’être la première femme, ni la dernière. Peut-être que les arbres volent, après tout ?
– Il faudrait demander à cet arbre.
– Demander quoi à cet arbre ?
– Lui demander s’il veut voler.
– Les arbres ne parlent pas.
– Peut-être qu’ils se taisent.
– Dieu a dit, la parole c’est seulement pour toi et moi.
– ET LE SERPENT ALORS ?

Adam fit un saut de carpe, Adam hurla PAPA !
Il parcourut cinquante mètres en moins de trois secondes. Freina des quatre fers. Se retourna, Les yeux exorbités. Ce n’était pas possible. Juste un gros coup de fatigue. Du repos. Du sommeil. Un litre et demi d’eau par jour. Cinq portions de fruits et légumes et un chapeau. Oui, c’est ça ! Un chapeau ! Cette petite brise est bien agréable mais le soleil tape dur sous ces latitudes et une insolation est si vite arrivée.
Un frémissement imperceptible parcourut la ramure, pourtant, il n’y avait plus un souffle de vent. Adam se frotta les yeux. Ondulant dans l’air immobile, les feuilles semblaient portées par le courant d’une rivière invisible qui coulait le long des branches. Il reprit ses esprits. Du calme. Les arbres ne bougent pas. Les arbres ne parlent pas. Sûrement un nouveau tour du Grand Magicien. Petit Rigolo, va.  Faut Le comprendre, aussi, après avoir passé toute la sainte journée à balancer des trous noirs dans tous les coins de la galaxie, il vient un moment où Dieu a juste envie de rigoler.
– Allez, Dieu, arrête Tes conneries et montre-Toi.
– DEUX SECONDES, J’ARRIVE.

Il y eut encore un bruissement de feuilles froissées et on vit surgir, perchée au faîte de la plus haute branche, la tête du serpent hilare qu’une joie inextinguible secouait tout entier.



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