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La personne aux deux personnes

Par Rob Gordon
Ouais alors bon d'accord, c'est bien joli cette idée de mettre un chanteur ringard dans la peau d'un comptable ringard, mais est-ce que ça fait pour autant assez de substance pour en tirer un long-métrage ? Absolument pas. Sauf quand on s'appelle Nicolas & Bruno, zozos de première, spécialistes des orgues Bontempi™, des agrafeuses et des Minitel™, accessoirement auteurs des fameux messages à caractère informatif et de l'adaptation française de The office. Il fallait être complètement génial ou totalement inconscient pour penser bâtir un bon film sur une idée gentille mais déjà un peu exploitée ailleurs (rappelez-vous par exemple L'aventure intérieure, de Joe Dante, avec Dennis Quaid dans Martin Short). Nicolas Charlet et Bruno Lavaine (autant donner leurs noms de famille, ils méritent d'être mondialement connus) sont les deux à la fois. La personne aux deux personnes est une franche réussite, une rigolade d'une heure et demie qui parvient à partir d'un postulat fantaisiste mais casse-gueule et à aller crescendo pendant toute la durée du film, pour aboutir à un épilogue complètement génial. Ce n'est pas un mince exploit.
Le plus incroyable, c'est que l'idée de départ n'est absolument pas délayée dans des sous-intrigues avec moultes personnages secondaires et digressions. À vrai dire, ils ne sont que trois, dont un qu'on ne voit que très épisodiquement. Dans la peau du cultissime Jean-Christian Ranu, Daniel Auteuil contredit tout le mal qu'on pensait de lui niveau comédie. Très souvent seul à l'écran, il donne à son personnage une dégaine absolument inénarrable, montrant à monsieur Franck Dubosc qu'on peut jouer un ringard fini sans patauger dans le mépris et la facilité. Face à (ou plutôt à l'intérieur de) lui, Alain Chabat campe un Gilles Gabriel mort mais pas trop, star des années 80 persuadée qu'elle peut être le leader du fameux revival des eighties. Sa voix est l'un des moteurs du film, et il prouve une fois encore qu'il est l'un de nos tous meilleurs acteurs, capable de jouer absolument n'importe qui et n'importe quoi en visant toujours droit dans le mille. Quant à Marina Foïs, dans un rôle secondaire mais fondamental, elle est extrêmement bien dirigée, dont très bien (c'est-à-dire qu'elle ne fonce pas tête la première dans ses quelques tics robindesboisesques parfois gênants).
Montée en puissance permanente, La personne aux deux personnes ménage de grands moments d'hilarité, ceux-ci se faisant de plus en plus nombreux à mesure qu'avance un film ne se perdant jamais en route. Impossible d'en dire plus, mais il faudra attendre la scène de la grande réunion de la Cogip au Palais des Congrès, puis ce fameux épilogue intervenant pendant le générique de fin, pour être totalement happé par l'immense puissance comique de ce grand spectacle, drôle et intelligent, qui confirme que Nicolas & Bruno sont des touche-à-tout de génie, capables de dynamiser et dynamiter une comédie à la française qui en a sacrément besoin. Imparable.
8/10

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