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Pour se faire du bien à l’âme

Par Carmenrob

J’ai lu tout d’un trait, hier, le très beau petit roman de Marie-Christine Boyer, Farö. Petit dans le sens de court.

Farö s’est isolé sur une île, dans une Scandinavie imaginaire, à la suite du départ, puis du décès de la femme qu’il aimait. Dix ans de réclusion, avec pour seules compagnes le souvenir de la femme en allée et la nature, à la fois âpre et généreuse, dangereuse et enveloppante. Et parfois, quelques rares amis qui débarquent. Et des cerfs que Farö nourrit et qui sont comme les âmes errantes des naufragés que la mer recrache sur les rives. Sinon, ce ne sont que marins taiseux qui ont vidé les lieux lorsque le gardien du phare est parti et qui se méfient de ce solitaire qu’on croit un peu fou.

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« Depuis quelques années, il vivait dans une zone d’ombre. Plus rien n’avait exactement la même consistance que la vie au village ou en ville.»

Une atmosphère mystérieuse, tantôt inquiétante, tantôt réconfortante, enveloppe le récit. Le langage est poétique, délicat, comme de la dentelle.

« Il est six heures. Le jour s’est levé. Le vent balaye les nuages au-delà des pins, le ciel est presque bleu. Farö prend le chemin des dunes, le plus court jusqu’à la mer, ses pas tracent un sentier humide de rosée dans les herbes. Le soleil tarde à apparaître derrière les derniers nuages qui s’étirent. Les quelques oiseaux qui s’envolent à son passage d’ébrouent dans un silence feutré. Un banc de brume s’allonge lourdement dans le creux de la première dune.»

Le récit est tout d’intériorité. N’attendez pas de péripéties palpitantes, de grands revirements dramatiques. L’histoire se déroule avec douceur, avec lenteur. Et c’est plein de tendresse.

Ça parle du deuil, de la vie comme d’une route qu’on parcourt parfois seul, parfois à deux, une route avec des embranchements qu’on n’avait pas vu venir, qu’on prend, à tâtons souvent. Ça parle du lent travail de la mer sur le paysage, de celui du temps sur l’âme humaine. Ça parle de passages, de guérison. C’est un livre qui fait du bien.

Marie-Christine Boyer, Farö, Triptyque, 2016, 138 pages


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