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Au secours ! Mon ado pique sa crise !

Publié le 22 juin 2016 par Julieboutard

Votre ado n'en fait qu'à sa tête. Ce que vous lui dites entre par une oreille et sort par l'autre dans la minute qui suit. Vous avez l'impression que ce qui vous semblait acquis (politesse, règles de vie familiale, ...) s'est envolé. Et que votre charmant petit s'est transformé en une sorte de monstre que vous ne reconnaissez plus. Bref : la crise d'adolescence a pointé son nez dans votre home sweet home et vous avez du mal à vous en remettre.

Rassurez-vous : tout ceci est absolument normal. Son comportement, et votre réaction. Si vous aviez un grand enfant bien élevé, votre monstre redeviendra un être agréable, de bonne fréquentation, quand tout cela sera passé. D'ailleurs, vous pourriez être surpris d'apprendre que les adultes qui croisent sa route le trouvent très bien élevé et serviable ... certains pourraient même ajouter "ah! si le mien pouvait être pareil !".

La vérité ? C'est avec leurs parents que les adolescents se comportent le plus mal, en général.

Parce qu'ils ont besoin de se détacher de vous pour se trouver, eux, le futur adulte qui est en eux.
Parce que cela suppose qu'ils ne peuvent plus se comporter comme le petit enfant qu'ils étaient, celui qui avait besoin de briller à vos yeux de super-héros ou de super-héroïne du quotidien. Exit donc l'obéissance et le conformisme aux valeurs et habitudes familiales.
Parce qu'ils savent maintenant qu'ils peuvent compter sur votre amour inconditionnel et que s'il y a un endroit où ils peuvent tester leur futur eux-mêmes sans risque, c'est bien chez vous.
Parce qu'ils ont sans doute un peu besoin de mettre votre amour inconditionnel à l'épreuve.

Donc, ils testent de nouveaux comportements, et ils vous testent aussi.

Alors, comment réussir le test ?

En d'autres termes, quelle posture adopter face à son ado qui vit une crise d'adolescence "normale" ?

Tout d'abord, restez fermes sur VOS valeurs : s'il y a une chose qui doit rester stable, c'est bien cela. Cela ne signifie pas que votre ado doit les partager, mais qu'il doit vous respecter dans ces valeurs, et dans vos besoins (qui sont liés à vos valeurs). Si vous avez su les faire vivre, il y a de bonnes chances qu'il les adopte à son tour, quand il aura un peu grandi.

Ensuite, fixez ensemble de nouvelles règles, adaptées à son âge et à ses besoins. C'est l'occasion de faire un conseil de famille, où chacun pourra exprimer ses besoins particuliers. Il faudra sans doute passer par un compromis, mais rappelez-vous que cela l'aide à construire le futur adulte qui est en lui. N'en faites pas une question de pouvoir : vous n'êtes pas le supérieur hiérarchique de votre enfant.

Autre chose indispensable : rappelez-lui que vous êtes légalement responsable de lui (ou d'elle), et que vous devez encore assurer sa sécurité, ce qui vous donne le pouvoir de fixer des limites intangibles. Elles seront d'autant mieux acceptées et respectées qu'elles seront peu nombreuses, motivées, et que vous lui aurez laissé en parallèle des libertés nouvelles.

Un petit cas pratique tiré de la vie réelle : nous vivons en banlieue parisienne et notre fille de 15 ans a le droit de prendre le RER et d'aller à Paris avec ses copains, dans certains quartiers définis, dans une certaine plage horaire, mais ne doit jamais s'y trouver seule. Elle a failli une fois : l'autorisation a été suspendue le temps qu'elle reprenne ses esprits et qu'elle réfléchisse aux risques qu'elle avait pris en se séparant de ses amis pour aller dans un autre quartier, dont elle ne savait rien, et de proposer une solution pour éviter que ça ne se reproduise.
Jusque là, ces limites étaient bien acceptées et respectées. Mais elle s'est laissée emporter par une pulsion (son cerveau en pleine restructuration lui a joué un mauvais tour, c'est une ado). La bêtise étant faite, nous avons choisi de la mettre face à ses responsabilités - puisqu'elle veut être responsabilisée, allons-y ! Donc, pas de hauts cris, ni d'ultimatum, ni de punition (quoique ... elle n'est toujours pas retournée à Paris, et il faut dire qu'elle n'a pas demandé). En revanche, nous en avons appelé à sa raison, à nos valeurs et nos besoins (sa sécurité est importante pour nous, et nous avons eu peur rétrospectivement), et nous avons réaffirmé les limites qu'elle devait respecter.

Quand ce n'est pas si simple

L'adolescence n'est pas une période facile, et c'est d'abord vrai pour l'adolescent lui-même. Pour comprendre ce qui se passe, quelques rappels fondamentaux :

    • Physiquement, l'ado est un mutant. Son corps se modifie énormément, et pas forcément comme il l'aurait souhaité ! Il doit apprendre à composer avec sa nouvelle enveloppe corporelle, apprendre à s'en servir, en tester les limites. C'est à la foi fascinant et très angoissant.
    • Neurologiquement, il doit composer avec un cerveau qui vit la plus grande restructuration de sa vie (ça dure de 12 à 25 ans). Le cortex préfrontal, qui est le siège de la pensée "raisonnable" est la dernière partie du cerveau à se développer. En attendant, votre jeune est particulièrement sensible aux pulsions ... Voilà pourquoi les prises de risques en tout genre sont si courantes à cette période de la vie. Et malheureusement, contre cela, il n'y a rien à faire, si ce n'est de la prévention pour qu'ils soient conscients de cet état de fait et qu'ils apprennent à se méfier d'eux-mêmes.
  • Psychologiquement, il est essentiel que l'adolescent se détache du modèle parental pour pouvoir se construire en tant qu'adulte. Il vit une nouvelle période du "moi tout seul". Bizarrement, ça nous attendrit moins, en tant que parents, que lorsqu'ils étaient encore de tout petits enfants ... Et c'est là que vous comprenez cette phrase qu'on vous a dite quand il est né : "Petits enfants, petits soucis ; grands enfants, grands soucis". D'autant que vous en êtes souvent réduits à vous faire du souci, car vous pouvez de moins en moins intervenir directement quand vous voyez qu'il va trébucher.
  • Socialement, il est soumis à de fortes contraintes. D'un côté, le monde des adultes auquel il reste soumis à son corps défendant, tant qu'il dépend financièrement de ses parents. De l'autre, le groupe de pairs, qui impose des règles pas forcément plus confortables que celles des parents ... Et au milieu, un soi qu'on voudrait être capable d'affirmer face aux autres sans se les aliéner.

TOUT ÇA EN MÊME TEMPS ! Non, vraiment, être ado n'est pas simple. D'autant qu'on n'a pas de carapace, et qu'on n'a plus de certitudes rassurantes (plus votre ado a l'air sûr de lui, moins il l'est !). De gros doutes sur soi-même. Ajoutez à cela la morosité ambiante de la société ...

Quand faut-il consulter ?

  • Votre ado se renferme sur lui-même, s'isole, est durablement triste (plus de quinze jours d'affilée).
  • Il ou elle a de plus en plus de mal à aller au collège ou au lycée, ou se retrouve souvent à l'infirmerie.
  • Il ou elle se dévalorise beaucoup, se culpabilise, ...
  • Ses résultats scolaires sont en chute libre.
  • Il ou elle s'amollit excessivement et durablement (les "coups de mou" sont normaux à l'adolescence du fait des changements physiques en cours).
  • Au contraire, il ou elle est excessivement agité(e).
  • Il ou elle souffre de troubles du sommeil ou de l'alimentation (trop, ou pas assez, ou selon un rythme incompatible avec ses obligations sociales).
  • Il ou elle a des comportements à risque très fréquents, systématiques, qui mettent sa sécurité en jeu de manière régulière (toxicomanies, binge drinking, conduites sexuelles non protégées, conduite automobile dangereuse ...).

Tout cela impose une visite chez le médecin traitant dans un premier temps (vous aurez soin de le laisser en tête à tête avec son médecin), et peut-être un suivi psychologique. En tant que parent, de telles épreuves sont d'autant plus difficiles à vivre que les parents sont les plus mal placés à cette période de la vie de leur enfant pour l'aider directement. Pour autant, votre enfant vous sera reconnaissant de lui trouver de l'aide, de montrer que vous êtes présent pour lui, que vous le soutenez et que vous croyez en lui. Même s'il ne le montre pas tout de suite !


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