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Inside ze qualifications of ze "Championnat de Poker de Belgique"

Publié le 21 juin 2007 par Poker

Une aventure pokerienne de Tonton Jo

Le casino de Namur est sans dessus dessous. Apres une file lente et triste, digne d'un samedi chez tonton walt a morne l'avalée, l'on pénètre dans la salle, non sans avoir reçu un numéro, un ticket de tombola et deux bons "boissons". La grande salle est indescriptible. Une sorte de Casino de la méduse, ou sont réunies, pêle-mêle, comme sauvées d'un cataclysme, les machines a sous, les tables de jeux, roulettes et black-jacks. le plafond est a moitié découvert et offre a la vue sur sa partie la moins pudique, béton jauni et gaines techniques baladeuses. De quoi mettre en confiance. Mis a part les 130 joueurs éparpillés dans ce hall de fortune, il y a la faune traditionnelle des casinos, des gens souvent vieux et souvent tristes qui essayent de faire cracher quelques machines.
On retrouve vite la fine équipe de 16 personnes venues jouer cette qualification. Il s'agit d'une sorte d'incentive. Nous sommes tous de la même boite et c'est notre virée hebdomadaire. Pour certains, ca vaut le bowling, ou le karaoké du coin. Pour avoir joué quelques fois depuis que j'ai inoculé le virus poker dans la boite, ils se sentent prêts a tâter du tapis sans pour autant avoir d'autre intention que de passer une bonne soirée. Pour d'autres, moins nombreux mais plus pénibles, c'est LE soir ou ils vont tout (me) prouver... Dans le groupe, il y a quelques joueurs réguliers, des parties amicales une fois la quinzaine, de préférence avec beaucoup d'alcool et de gros rires gras. Non, ils ne jouent pas sur Internet et n'ont jamais ouvert le moindre bouquin. Mais ils ont acheté et regardé "Poker Coach" de Patrick B, ce qui fait d'eux des experts plénipotentiaires en poker. Et puis il y a les 3 ou 4 mordus dont je fais partie, qui scrutent les visages, comptent les tables, se renseignent sur la structure des montées de blindes, la durée des pauses, ect.
je me cale un sandwiche et deux red bull - vodkas dans l'estomac avant de tirer ma place au sort. Direction la table  4. Ca s'installe. Comme toujours aux tables de poker de club, 80% des joueurs tirent la gueule. Comme si "poker face" voulait dire "etre affublé d'une tronche de boxeur de saloon mort par contusion depuis deux jours". Moi, évidemment, je tchatche, je brise la glace, je fais sourire, puis marrer. Ca détend ! Puis ca renseigne surtout. A ma droite, trentaine bourgeoise agréable, un joueur habitué des tournois nord européens. A fini 3eme du Championnat de Belgique 2006 et premier d'un gros tournoi à Amsterdam. A ma gauche, un type un peu goguenard qui prétend tournois les règles depuis la veille seulement. A observer. En face de moi, deux mecs bigleux, impossible à regarder dans les yeux. Le croupier est tout jeune.   On reçoit 500 jetons pour les 50/15 euros d’inscription. Le premier niveau de blinde est 10/20. Mais très vite, le floor annonce la couleur. Apres le baratin d’usage (déjà 220 qualifiés pour un prize pool de 365.000€, merci, bla bla bla) il est question des rebuys et de l’addon. J’apprends donc que le rebuy est autorisé a tout moment pour tout tapis égal ou inférieur a 500 jetons, qu’arrivé a Zéro, un double rebuy a 100€ est possible pour 1000 jetons et que, comble de bonheur, un addon de 1000 jetons pour 50€ est possible pendant la pause. Je n’en sortirai donc pas a moins de 150€ la soirée, tous calculs faits. Sur certaines tables je vois déjà des billets de 50€ prêts sur le tapis. Des la première main, un grand nombre de tapis vont doubler sans même avoir recu de cartes. Voila comment un petit championnat d’un petit pays gonfle artificiellement son pot final. Je serre les dents. De même on nous annonce 130 participants pour 13 places payées. 12 jetons pour la finale et une place a 300€.   Le croupier est un poupon. Gentil, sympa tout plein, mais un poupon quand même. On donne la première main… une poubelle. Je jette. J’ai besoin de temps pour observer les attitudes. En moins de quelques minutes, c’est Verdun, le Vietnam et les plages de normandes servis sur tapis vert. Ca boite avec 62, des pots colossaux se créent sur des relances de fous avec un roi ou un as mal accompagné, mon voisin débutant touche une couleur avec 7 4 a pique qu’il a joué Allin. Je glisse a mon voisin de droite, le « champion » « 10 contre 1 qu’il va s’excuser tout en nous disant qu’elles étaient assorties, tout de meme »… et évidemment ca ne manque pas. Je suis écoeuré par la boucherie. J’évite les mauvais coups simplement par ce que je tire des cartes pourries… 10 6, 6 2, 7 3, 7 2, J 3, autant de crasses jetées des que possible.   Au fur et a mesure des mains, il est évident que le croupier ne pratique le Holdem que depuis peu. Il a du mal a lire les mains gagnantes et est incapable de splitter un pot correctement. A plusieurs reprises les joueurs et le floor l’assistent dans sa tache. Je n’ai rien contre le gamin, mais avec des levées de blindes toutes les 20 minutes, un tapis d’entrée ridicule et des fous furieux partout, j’ai besoin de voir beaucoup de cartes pour trouver une bonne paire ou un as correctement accompagné pour doubler… Et ce n’est pas avec le tout petit nombre de mains jouées a l’heure que j’y arriverai.   Je touche un 98(d) que j’envisage d’amener au flop, pour voir, quitte a limper la blinde ou une relance double. Je paye 40, mon voisin également, et trois places plus loin, une relance a 420… Je couche. Beaucoup plus tard, je touche une paire de 3 en smallblind. 3 entrants, personne ne raise et il est hors de question que je tente un vol sur des blindes a 60 en risquant mon tapis, d’autant plus que mon voisin de gauche est toujours capable de me boiter avec 74… Je paye donc ma moitié, l’autre check. Voila le premier flop auquel je participe. 4, 5, 8. les deux premières cartes m’enthousiasmaient, mais la, c’est la douche froide. J’ouvre à 60, un continuation bet, pour prendre la température de la table, mon voisin suit, et son voisin envoie les 940 de son tapis dans le pot… Je vire ma paire de 3 et lui laisse ramasser le tout.   A l’avant dernière main de la période de rebuy, mon tapis n’est plus que de 240. D’un coté, je me dis que j’ai réussi a épargner la moitié de mon tapis de départ en dépit de cartes pauvres et d’une ambiance hyper hostile. De l’autre, je me sens ridicule face aux autres joueurs dont le tapis mini tourne autour des 1000 jetons, double rebuy oblige. Je touche AJ(h). Le tout pour le tout. Doubler, tripler, quadrupler même (puisque je suis sur d’être suivi avec un stack aussi faible) ou recaver. Mon tapis est suivi par 4 joueurs. Au showdown, que des mains minables. Mais c’est celle de mon voisin « le champion » qui l’emporte avec Q10 sur un 10 touché au flop. Et c’est parti pour un rachat plus addon.   La pause. Enfin… l’arnaque, encore une fois… 1h30 à tourner en rond dans ce hall de gare. 1h30 pour que tous les joueurs aient eu l’occasion de boire, manger, reboire, remanger, pisser, de mettre quelques pièces dans une machine a sous ou quelques jetons sur un numéro de roulette ou une feutrine de black-jack. Par chance nous sommes venus en groupe. Il nous faudra bien ce temps la pour nous échanger nos impressions sur ce début de tournoi. Mais ce break finit par nous sembler interminable et nous mourrons d’impatience d’en découdre a nouveau sur les tables   A mon retour, j’ai 2000 jetons, largement en dessous de la moyenne. Les blindes passent a 50-100 et vont doubler toutes les 20 minutes. Plus question ici de pente douce. Chaque levée de blinde sera abominable et radicale pour les petits tapis.   A peine quelques minutes après la reprise, une table se met a applaudir. Et un de sorti… Les applaudissements se succèdent sans grand intervalle, ça tombe de toutes part, régulièrement, une fois toutes les deux mains en moyenne…   Toujours la même lenteur d’exécution du croupier… toujours la même malchance dans mes cartes. Au fur et a mesure des blindes je vois mon tapis se réduire. Je tente de voir un flop en limpant la blinde avec un KJ assorti mais une grosse relance tardive me dissuade de m’accrocher. Pareil avec un J10 assorti qui ne touche rien au flop. Je vire un A4(s) qui touche sa double paire au flop, la seule main jetée gagnante jusqu’ici.   Néanmoins, là, on joue vraiment au poker. Les relances sont rationnelles, les jeux éminemment plus serrés et au fur et a mesure que le temps s’écoule, les chacals et les inconscients disparaissant dans des vagues d’applaudissements. Quelques tables sont déjà cassées et supprimées. L’élimination se poursuit. Je n’ai été engagé dans aucun flop pendant une heure, et c’est une nouvelle pause, de 15 minutes, qui démarre. 1020 de tapis. Je fais pale figure et dois me trouver dans les 5 plus petits shortsacks du tournoi.   Au retour de la pause, il y a un chip race a table avant qu’elle soit cassée. Grâce au roi de carreau, mon jeton de 20 se transforme en 100 et je me retrouve projeté a une autre table ou je retrouve l’un des membres de mon groupe qui survit, lui aussi avec un tapis de 2.500. Les blindes sont a 300/600. Cette table est plus sympa que la précédente. Joueurs de mon age. Détendus et efficace. Un type me fait un clin d’œil et désigne un joueur a gauche du donneur. « fais gaffe » me dit il, « lui, c’est Robin des Blindes ». L’expression me fait largement sourire. Je ne la connaissais pas mais je la recaserai. A signaler également que le croupier est nettement meilleur et plus rapide. C’est donc enfin avec une cadence un peu plus soutenue que j’aborde cette troisième phase.   D’abord je touche un 77 a l’avant bouton. Je le joue tapis et agresse les blindeurs qui lachent leurs mises. Je me fais un plaisir de leur montrer ma main, le message est simple : j’irai a tapis avec toute paire moyenne ou as correctement encadré. Je repasse a 2000. Deux mains plus tard, je touche un Ajax a coeur. A nouveau, j’attaque a tapis, payé par deux autres stacks qui checkent le flop, la turn, et.. la river qui est un J… Me voila a 6.000. Quelques coups plus loin, mon voisin de gauche boite avec 4.000 jetons alors que je découvre un 99 tout a fait plaisant (pour rappel, ça fait des heures que je touche des brouettes, je n’ai joué jusqu’ici que deux AJ et un 77). Je calle. Il me découvre un AK contre lequel je me sais légèrement favori mais fragile néanmoins. Comme pour me punir de cette arrogance, le flop amène deux as et je ne tire pas le carré-miracle à la turn & river*. Je retombe a 2.500.   Encore quelques poubelles, les blindes passent a 600 1200 et puis je découvre un 55 en UTG+1. Bon, soyons clairs, il est 1h30 du mat. Il doit rester une quarantaine de joueurs, dont des tapis absolument monstrueux. Le mien ne me permet ni d’attendre ni de bluffer ni de payer pour voir un flop. Je mets donc mon petit tapis en joue en priant. La petite blinde me suit et la grande blinde est tapis obligé avec son shortstack de 1000. Le smallblind est sur 10 6 dépareillés, le BB sur un Q9… Encore une fois je suis favori mais très fragile car dominé par 4 overcards. le flop 7 J 6. Se peut il que je me fasses éliminer par une paire de 6 ? Ce serait trop minable. Si je dois avoir un peu de chance c’est maintenant. Je croise les doigts en dessous de la table. La turn est un 9. Je ferme les yeux pour les rouvrir juste à l’instant ou le dealer abat la river, un 8, qui me donne une quinte de l'espace, touchée par le bas. Je sors mon ami en remontant mon tapis a 6.000.   Je serre en attendant les blindes. Je vois passer un A2 a carreau qui me fait de l’œil. Je suis au bouton. Je sais que les deux blindeurs, quoi que pourvus en jetons, ne sont pas des casse-cous et ne prendront aucun risque. Et personne n’est rentré dans le coup. Et je le sens. Mais je me couche, en essayant de garder ma discipline. Et pour me narguer, le flop m’aurait donné un tirage couleur, et la couleur max sur la turn, de quoi piéger et doubler ou tripler mon tapis. Soit. So be it.   On casse la table. Il n’y en a plus que 3, donc moins de 30 joueurs. La pression se fait plus forte. Ma première main a cette nouvelle table est un A7 dépareillé. Je suis dans la zone de fin de parole mais derrière moi, 3 énormes tapis attendent. Je ne connais pas encore ces joueurs, je couche donc cette main boiteuse. Apres une observation plus poussée, je classe la table dans le top 3 des plus serrées que j’ai connu. Je touche A6 en fin de parole, je m’apprête a voler les blindes en me mettant a tapis, mais deux tapis moyens décident de se boiter l’un l’autre. Je couche, ils découvrent respectivement JJ et KK, pas d’as au tableau, je suis toujours vivant.   Je touche un peu plus loin un A8 à cœur. Les blindes arrivent. Je dois prendre des risques. Deux joueurs payent les blindes, j’envoie mes 6.000, deux petits tapis suivent alors que je les couvre et un moyen stack qui me domine paye le tout. Les petits tapis ont respectivement 10 10, KJ et le tapis moyen a une main insignifiante. Il rate totalement sa tentative de faire un peu de ménage à la table. Un 10 apporte un brelan au petit tapis, ma hauteur As me donne droit au side pot, soit 5.600… Pas mal pour une main perdante.   Malheureusement, un passage de blindes plus loin (1.000/2.000), je suis a 2.600 jetons. Je vois le bouton faire le tour de la table, lentement mais sûrement. 3 mains après, les blindes grimpent a 2.000 4.000. C’est l’asphyxie assurée si je ne trouve pas vite de quoi doubler (ou tripler plus vraisemblablement, puisque je suis presque couvert par la petite blinde). J’attends un bon as, une paire quelconque ou, au pire, deux figures.   En UTG+1, sur le fil, je découvre un KQ assorti. Je n’aime pas cette main qui ma déjà coûté pas mal de sorties de tournois sur le net. Mais ais-je vraiment le choix ? Il ne me resterait plus qu’une main en UTG et un allin forcé sur la blinde a 4000. J’observe patiemment la BB qui ne me semble pas très satisfait de sa main. J’envoie donc la boite. Tout le monde se couche sur son passage y compris, oh surprise, la petite blinde (qui n’avait pourtant que 600 à ajouter) et je me retrouve en tête a tête avec la grande blinde qui retourne en grimaçant un 10 5 non assorti. Je retourne mon couple royal en osant soupirer. Je suis largement favori. Mais un 10 au flop vient me couper les jambes et aucune tete couronnée ne se pointe au rendez-vous que je leur supplie d’accepter au tournant ou sur les berges d’une rivière insignifiante qui emporte dans son cours tous mes espoirs de victoires. Je me leve sous les applaudissements rituels. 18eme. J’étais pas loin bon sang.   Je me retourne vers la table 4, ou je vois JF, le dernier membre de notre bande, mon élève personnel, qui paie la blinde de 4.000, regarde patiemment tomber les 3 lames puis pousse ses 6.000 jetons restants sur la feutrine, au pied d’un flop de petites cartes de toutes les couleurs, suivis immédiatement par une quadra blonde. Galant, JF lui montre ses crochets JJ, polie elle lui révèle a son tour un énorme King Kong. Pas de miracle. Il sort 17eme, quelques secondes après moi. Nous repartons ensemble au bar sous les félicitations des 13 autres joueurs de notre petite bande. Plus question de retenter ma chance ici avant un bon bout de temps : les qualifications sont archi-complètes jusqu’en octobre. Une vraie folie.   Si vous devez les jouer, tablez sur une dépense minima de 115€ (inscription et addon) et plus raisonnablement sur 215€ (inscription + double rebuy éventuel + addon). Attendez vous a une première heure douloureuse. Si vous vous sentez l’âme d’un chacal affamé, partez a l’assaut de tout ce qui bouge mais sachez que vous serez plus que probablement suivi, relancé et surrelancé pendant cet échauffement de folie. Ou alors n’entrez qu’avec le top 5 et faites vous immuniser contre les bad beats par le marabout du coin. Apres la pause, jouez votre meilleur « poker classic ».   Epilogue… Nous sortons du casino. Il est 3h30. Je retrouve un des joueurs de ma deuxième table. Il a fini 13eme avec 300€. Furieux. Ca fait 7 fois qu’il joue les qualifs. Il a déjà deux places de sélections. Il me propose de venir jouer a Valencienne pour un mini tournoi organisé avec comme premier prix sa place excédentaire. Je prends note de son mail qui intégrera ma liste de plus en plus conséquente de joueurs français et belges. En revenant sur Bruxelles, nous discutons de nos coups. Sans être vraiment tristes, JF et moi sommes tout de même légèrement déçus de n’avoir pas pu intégrer le cercle des 13 derniers… Je fais le compte des mains touchées. Rien de formidable. Aucune main du top 5, pas d’AA KK AKs QQ AKns… Même dans ce que j’ai couché, a une exception près, je n’aurais pas touché de combinaison dévastatrice. J’ai donc fait au mieux, considérant mon manque de chance dans la donne. Finir 18eme avec des mains pareilles, ça n’est pas si mal.    

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