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Une femme à Berlin, au Pulloff Théâtres, à Lausanne

Publié le 27 novembre 2016 par Francisrichard @francisrichard
Une femme à Berlin, au Pulloff Théâtres, à Lausanne

Ce soir, j'assiste à Une femme à Berlin. Hier soir, je n'ai pas pu avoir de place pour la première. C'était complet. Ce n'est pourtant pas un spectacle réjouissant, mais plutôt un spectacle édifiant, basé sur un  document fort, un journal écrit à Berlin par une jeune femme, du 20 avril au 22 juin 1945.

On sait que la bataille de Berlin a opposé l'Armée Rouge aux dernières forces du Troisième Reich du 16 avril 1945 au 2 mai 1945. Le journal commence donc alors que cette bataille a commencé. Et il relate tout ce qui arrive à cette jeune femme de 36 ans, pendant et après qu'elle s'est déroulée.

Le décor est celui d'une cave désordonnée et poussiéreuse. La poussière provient de gravats dus aux bombardements. Un jeune homme (Marco Calamendrei), habillé en complet veston, cravate et gabardine, pénètre dans cette pièce. Il cherche ledit journal et finit par le trouver sous un fauteuil. Il commence à le lire à haute voix.

La jeune femme (Véronique Montel) survient. En fait ils ne se voient pas, parce qu'elle vit dans le temps où elle tient son journal et que lui vit dans le temps où il le lit et qui lui est postérieur. Le choix d'un récit à deux voix permet de le découper en un récit général et en un récit plus intime, dit par la jeune femme.

On sait que les troupes soviétiques se sont emparées des femmes de Berlin et qu'elles ne se sont pas gênées pour les violer et que d'aucunes de ces femmes ont accepté de livrer leurs corps pour ne pas mourir de faim... La jeune diariste n'a pas échappé à ces atteintes criminelles à son corps et à son esprit.

L'homme lit donc. La femme écrit tout en racontant, ou raconte. Quand elle raconte les sévices corporels qu'elle a subis, elle tourne le dos au public, qui ne peut qu'être sensible à cette posture pudique. Sinon, elle entre dans les détails de la vie quotidienne d'alors où il fallait faire preuve de débrouillardise pour survivre.

Il semble que ce soit la tenue de ce journal qui ait permis à cette jeune femme de tenir pendant ces deux longs mois de son existence et après. Ce journal lui a permis de prendre de la distance avec elle-même. Dédié à l'homme qu'elle aime, Gerd, dont elle n'est pas sûre qu'elle le reverra, c'est en quelque sorte son testament.

Eine Frau in Berlin est un document avant d'être une pièce. De le savoir ne peut pas laisser indifférent le spectateur. La réalité dépasse en effet la fiction et que la soldatesque allemande ne se soit pas mieux comportée que la russe ne change rien au caractère ignoble et criminel de tels comportements.

Quoi qu'il en soit, le spectateur sort bouleversé d'un tel spectacle. Le jeu des deux comédiens, la mise en scène réaliste de Séverine Bujard, le décor de Célia Zanghi, l'illustration sonore de Jérôme Baur, contribuent à lui donner l'impression de revivre ce cauchemar et, s'il ne doit retenir qu'une phrase, c'est celle-ci:

La somme des larmes reste constante.

Francis Richard

NB

L'identité de l'auteur de ce journal, Marta Hillers, n'a été révélée qu'il y a dix ans, soit cinq ans après sa mort. 

Prochaines représentations: du 29 novembre 2016 au 7 décembre 2016

Le mardi, le jeudi et le samedi à 19 heures

Le mercredi et le vendredi à 20 heures

Le dimanche à 18 heures

Lieu:

Pulloff Théatres

Rue de l'Industrie, 10

1005 Lausanne

Réservations:

http://www.pulloff.ch/reservations/

Tél.: 021 311 44 22


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