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Pour en finir avec (le débat sur) Cavani

Publié le 18 octobre 2016 par Kazbarok Kazbarok

Certains joueurs alimentent, sans qu’ils en soient toujours responsables, un débat permanent qui ne s’arrête pas à la fin de leur carrière. Edinson Cavani est de ceux-là et il n’y a aucune raison que les controverses à son sujet cessent tant qu’il ne cessera pas d’être lui-même. Car c’est un peu ce qu’on lui reproche : d’être ce qu’il est. Or on sait très bien ce qu’il est : un attaquant qui se crée beaucoup d’occasions, qui en rate beaucoup, mais qui marque quand même beaucoup de buts. Si l’on oublie de considérer un de ces trois aspects, on passe à côté du joueur. Ses statistiques traduisent ce profil de buteur, et réservent quelques surprises…

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À PEINE MOINS EFFICACE À PARIS QU’À NAPLES

On peut déjà reconnaître à Cavani une certaine régularité. C’est un buteur qui n’a pas connu d’éclipse (ni de longue période de blessure) et qui, après ses débuts européens à Palerme avec 13 buts, n’en a jamais inscrit moins de 16 en championnat lors de ses six saisons à Naples et Paris. Il affiche même une moyenne à un peu moins de 22 unités par saison.

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Une part de la déception née de son parcours parisien vient du contraste avec ses saisons napolitaines. En particulier avec la dernière au terme de laquelle il avait culminé à 29 buts en Serie A, alors qu’il n’a jamais atteint la vingtaine en Ligue 1. Trois éléments pondèrent pourtant fortement cette différence. D’abord, la pointe du PSG ayant été presque toujours occupée par Zlatan Ibrahimovic, Cavani n’a pas évolué à son poste de prédilection – évidemment plus favorable pour marquer.

Ensuite, il a moins tiré de penalties en bleu nuit qu’en bleu ciel (15 réussis lors de ses trois saisons à Naples, contre 5 lors de ses trois premières à Paris). Enfin, rapporté à son temps de jeu, moindre dans la capitale, l’écart n’est plus très significatif : 0,64 but hors penalties par tranche de 90 minutes à Naples, 0,6 à Paris. Comme, en outre, Cavani a moins tiré en France (3 tirs par match en moyenne) qu’en Italie (4), seule une lecture superficielle des statistiques conduit à conclure qu’il est significativement moins efficace avec le PSG qu’avec le Napoli.

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Autre paradoxe : la saison dernière, durant laquelle les critiques contre lui ont atteint un pic, Cavani a atteint son plus haut niveau d’efficacité sur le critère des buts par tranche de 90 minutes : avec 19 unités (0 penalty), il a porté son record à 0,74…

MESURE DE LA MALADRESSE : « BIG CHANCES », LITTLE GOALS ?

Reste le reproche cardinal fait à Cavani : sa maladresse ou son inefficacité relative devant le but. L’indicateur le plus fiable est celui des « big chances » tel que le calcule la société Opta à partir de différents critères [1]. En substance, les occasions nettes. De ce point de vue, l’Uruguayen sous-performe, à plus forte raison pour un joueur qui marque quand même autant. Depuis son arrivée à Paris, il ne convertit en effet que 38,2% de ses occasions nettes, alors que la moyenne (pour l’ensemble des joueurs des cinq principaux championnats) est de 41,8% [2]. Encore ce chiffre est-il amélioré par une efficacité de la tête supérieure à la moyenne.

Cavani figure parmi les onze joueurs qui ont obtenu plus de cent « big chances » depuis 2013 (en championnat et Ligue des champions). 7e pour le nombre de ces occasions nettes, il est 11e pour leur taux de conversion en but, à 10 points de la plupart des autres attaquants. Voilà qui résume à la fois sa capacité à se créer des occasions et sa difficulté à les concrétiser. On note toutefois que Neymar – lui aussi positionné sur le côté – qui navigue dans les mêmes eaux (38,5%), ne souffre pas d’une réputation de gâcheur…

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Cavani est l’antithèse du stéréotype de l’attaquant « qu’on ne voit pas de tout le match mais qui marque sur sa seule occasion ». Au contraire, le Parisien est particulièrement visible et ses erreurs d’autant plus voyantes. Mais à nombre de buts égal, quel attaquant faut-il préférer : celui qui ne se procure qu’une occasion ou celui qui s’en procure quatre ? Au moins le second s’est-il donné une chance d’en marquer plus, dans un bon jour…

CE QU’IL FAUT POUR FAIRE UN BUTEUR

Au-delà des chiffres, pour apprécier Cavani, il ne faut donc pas le prendre pour un autre, ne pas se tromper sur ce qu’on lui demande. Le poste de buteur exige beaucoup de qualités différentes, mais rarissimes sont ceux qui les possèdent toutes (d’ailleurs, certaines s’excluent mutuellement). Sa technique n’est ni exceptionnelle ni indigne [3], il n’est ni un grand dribbleur ni un gros frappeur. Mais sa science du déplacement a peu d’équivalent. Par ses courses, ses démarquages et ses appels de balle, il propose constamment des solutions viables et est souvent servi pour se retrouver en position de frappe. Ses buts de la tête, merveilles du genre, témoignent particulièrement de cette affinité avec les trajectoires.

Si certains attendent la situation la plus idéale pour frapper (et optimisent ainsi leur taux de conversion), lui se met dans l’obligation de tenter quoi qu’il arrive. Son nombre de kilomètres parcouru, anormal pour un attaquant, explique en partie qu’il manque chroniquement de fraîcheur et de lucidité au moment de conclure. D’où, aussi, l’irritant contraste entre des buts exécutés de manière clinique et des ratés inexplicables.

Il faudrait justement lui savoir gré de son impressionnante contribution défensive – pressing, replis et replacements. Malheureusement pour lui, le contexte parisien se prête mal à la patience et à l’indulgence, ne valorise pas un niveau d’implication qui ferait de Cavani une idole dans la plupart des autres clubs [4].

2016/17 : CAVANI, FORMULE ENRICHIE ?

Même avec un taux de réussite devant le but plus faible que celle des grands attaquants qui évoluent actuellement en Europe, Cavani fait partie de cette catégorie. D’une efficacité imprévisible sur un match, sa régularité sur une saison (et sur plusieurs) constitue une assurance rare pour un club.

On fait donc assez facilement le tour d’Edinson Cavani, joueur dont la constance en tout permet de savoir à quoi s’attendre. Mais, à vrai dire, on n’en pas forcément fini avec le débat sur Cavani. Le joueur se retrouve cette saison devant le défi de se retrouver titulaire à la pointe de l’attaque, délesté de la présence pesante de Zlatan Ibrahimovic. Un statut qu’il a longtemps déploré de ne pas avoir au Paris Saint-Germain, et qu’il n’avait pas justifié lors de ses intérims dans cette position. Malgré cette pression, et non sans avoir déchaîné de nouvelles critiques après ses matches contre Metz ou Arsenal, il est parti sur des bases statistiques hors-norme : 9 buts en 8 matches de championnat, 3 en 2 de Ligue des champions.

Il ne maintiendra probablement pas un tel rythme, mais il peut s’offrir de nouveaux records statistiques personnels. En ratant probablement toujours autant d’occasions, mais en parvenant enfin à faire reconnaître la nature de son talent.

Merci à Julien Asunçao dont l’aide a été précieuse pour la rédaction de cet article et dont le site sur les statistiques est à recommander.


[1] Pour résumer, les « big chances » correspondent aux situations de face-à-face avec le gardien (duels, mais aussi tirs avec angle dégagé, reprises de la tête face aux cages, etc.).
[2] Championnat et Ligue des champions.
[3] Son déchet technique a probablement été aggravé par sa crise de confiance : au sommet de sa réussite, lors de sa dernière saison à Naples, il affichait beaucoup plus de maîtrise.
[4] Le montant élevé de son transfert (64 millions d’euros), à l’aune duquel il est jugé, n’a pas aidé non plus.


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