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Un CIO dans la ville de Palo Alto: entretien avec J. Reichental

Publié le 08 mars 2017 par Pnordey @latelier

Jonathan Reichental, Chief Information Officer de Palo Alto, a répondu à nos questions sur le rôle d'un CIO dans une smart city et sur la façon d'aider au développement d'un écosystème de start-up.

Berceau de la Silicon Valley, Palo Alto se révèle un exemple intéressant en matière d'innovation et de Smart City. En 2016, la ville occupe en effet le 5e rang des villes américaines digitales dans la catégorie des villes de 75 000 habitants dans le classement du Center for Digital Government

Depuis 2011, Jonathan Reichental occupe le poste de Chief Information Officer (CIO) de Palo Alto. Il compte parmi les 20 CIO les plus influents des États-Unis. Auteur populaire et figure publique, il parcourt le monde pour promouvoir la Smart City et la GovTech. Dans cet entretien, il évoque ses principales responsabilités comme CIO, les résultats de Palo Alto comme Smart City et sa vision de l'innovation urbaine. 

Jonathan Reichental

Être CIO d'une ville peut paraître étrange puisque c'est habituellement une position occupée dans une entreprise. Comment décririez-vous votre mission ?

Aujourd'hui encore, les gens sont surpris de voir que les villes ont leur CIO. Au niveau fédéral, c'est assez commun, mais lorsque vous passez au niveau des départements et des villes, ça l'est moins. Mais au fur et à mesure que la technologie prend de l'importance dans les mairies, cela devient plus populaire.

Évidemment, mon travail comporte une importante composante IT. Mais le besoin de penser différemment l'offre des services de la ville, des transports jusqu'à l'énergie et à la sécurité publique, en passant par la gestion de l'eau et des déchets, se fait de plus en plus sentir. Et, dans tous ces domaines, la technologie est au centre. De plus en plus, nous tentons de résoudre des problèmes du 21e siècle par des solutions du 21e siècle. Je consacre également environ un tiers de mon temps à développer des relations avec des start-up de la Silicon Valley, et au-delà, pour voir comment donner vie aux projets Smart City.

Vous parlez de créer de la valeur, de donner vie aux projets Smart City… Comment procède Palo Alto pour que de telles opportunités se concrétisent ?

Nous avons la chance d'être proches de certains des plus grands cerveaux du monde ce qui est, sans conteste, un avantage. Ceci dit, nos partenariats ne se limitent pas aux start-up mais s'étendent à de grands acteurs comme Microsoft, SAP ou Verizon. L'innovation urbaine ne concerne pas que les start-up technologiques.

En outre, quelle que soit la configuration géographique, je suis fermement convaincu que les villes doivent être prêtes à prendre des risques pour innover. Même si nous sommes dans la Silicon Valley, nous devons trouver le moyen de pousser les compagnies technologiques à réfléchir avec nous à l'avenir de nos villes. Car, en fin de compte, les villes ne sont pas forcément un domaine très affriolant pour les start-up. Comment pouvons-nous les aider ?

Palo Alto reste une ville relativement petite, avec environ 67 000 habitants, même si en journée la population double avec les navetteurs. La ville couvre environ 6 500 hectares, une surface gérable. Cette taille relativement réduite favorise plutôt la rapidité d'action et permet de mesurer les résultats.

Mais c'est incontestablement un compromis. Il est clair que la ville de San Francisco dispose de budgets plus importants et peut embrasser davantage de projets en même temps. Ceci dit, je suis convaincu qu'il n'existe pas une seule réponse au défi de la Smart City, qu'il n'y a pas une solution ou un plan magique applicable à toutes les villes. Il faut une solution distincte en fonction des défis et du contexte local  

"What could be a reasonable definition for #smartcity innovation? Livability, workability and #sustainability" according to @Reichental pic.twitter.com/1RWSjGv91n

— Atelier BNP Paribas (@atelier_us) 14 février 2017

Quelle est votre vision de la Smart City ?

La Smart City devrait être vue à travers le prisme suivant : viabilité, faisabilité et durabilité. L'expérience actuelle des citoyens à la mairie n'est bien souvent pas satisfaisante. Il y a d'abord les longues files d'attente et les résultats sont imprévisibles. Nous voulons en faire une expérience transparente, aussi rapide que possible grâce à l'utilisation d'applications, par exemple. Si vous avez besoin d'un permis de bâtir pour des travaux dans votre maison, vous devriez pouvoir soumettre votre requête via un appareil mobile. Pour répondre à ce besoin, nous avons digitalisé environ 60 services et simplifié autant que possible la signalisation d'un problème, le paiement d'un ticket de parking ou le suivi de la consommation énergétique de votre maison. Nous avons également développé une bibliothèque virtuelle. Vous pouvez télécharger des livres, de la musique et des films directement à partir de votre téléphone. Un service complémentaire à nos cinq bibliothèques physiques.

Quels types de technologie avez-vous implémenté pour faire de Palo Alto une ville plus intelligente ?

Nous avons lancé PaloAlto311 il y a déjà quelques années. Il s'agit d'une application gratuite grâce à laquelle les membres de la communauté peuvent signaler des problèmes tels qu'un arbre tombé, des graffitis ou des trous dans le trottoir; en envoyant une photo. Aujourd'hui, nous comptons quelques milliers d'utilisateurs et nous recevons des centaines de rapports chaque mois. Nous avons également intégré une section feedback sur notre travail quand nous enquêtons sur la satisfaction de l'utilisateur, une façon d'évaluer la qualité de nos services. Par exemple, combien de temps cela nous a-t-il pris pour résoudre un problème spécifique ?

Ensuite, nous bouclons la boucle en mettant cette information à disposition de notre communauté. Nous proposons des données en libre accès pratiquement en temps réel. Nous voulons ainsi encourager les académiciens et autres personnes à analyser nos données. D'une part, cet outil permet une connexion positive entre les résidents et le personnel de la ville et, d'autre part, ces données peuvent aider la prise de décision au niveau de la ville.

Palo Alto 311

Quels sont les principaux défis que vous rencontrez en tant que CIO de Palo Alto ?

Nous voulons souvent réaliser plus qu'il n'est possible ! Il y a malheureusement plus de problèmes que de temps ou de capacité. Par conséquent, notre plus grand défi est de fixer les priorités. Nous sommes une ville relativement petite, avec un personnel limité. Nous devons donc décider avec une précision chirurgicale ce qui compte pour la communauté.

En outre, convaincre nos partenaires de la valeur apportée par nos produits et services est un processus continu. Si le retour sur investissement n'est pas aussi important dans le secteur public que dans le privé, nous devons malgré tout nous engager à défendre nos projets et à chercher de l'aide. Il est important d'être un bon communicant . À cela s'ajoutent les problèmes de recrutement, particulièrement dans la Silicon Valley. Il y a un grand turn over  et les talents sont difficiles à trouver. Nous sommes en compétition avec les géants technologiques de la Bay Area.


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