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Et la culture ?

Publié le 08 mars 2017 par Jacquesmercier @JacquesMercier

Pour une fois, je relaie complètement un article édité ce midi sur le site de L’Avenir et signé Xavier Diskeuve…

Tiens, ce mardi matin, sur une des principales radios francophones du pays, il y avait la ministre de la Culture Alda Greoli qui était l’invitée de la traditionnelle interview politique de 7 h 50. Pour parler de quoi au juste?

Enfin, pour être précis, elle est ministre de la Culture, mais aussi de la petite enfance et aussi vice-présidente de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Et donc, Alda Greoli on la voit assez peu. Pour rappel, elle a repris la moitié du job de Joëlle Milquet lorsque cette dernière a dû remettre sa démission. C’est Marie-Martine Schyns qui a hérité de l’autre moitié, à savoir l’Enseignement.

À la Culture, Alda Greoli travaille certainement beaucoup car c’est un secteur très morcelé (cinéma, arts de la scène, littérature…) où tout le monde estime avoir la légitimité de réclamer plus de moyens tout le temps. Mais on la voit peu. C’est une ancienne chef de cabinet, quelqu’un de l’ombre, de pas très médiatique et qui n’arrive visiblement pas à le devenir.

Toutefois durant l’interview, pas une fois l’intervieweur n’a évoqué un sujet lié à sa compétence principale, la culture. Comme si ce secteur était un long fleuve tranquille dépourvu d’urgence ou d’actualité. Il y a eu des questions liées aux «droits de la femme» (c’était certes la thématique de la semaine), à la difficulté d’être femme en politique, des questions sur les pubs sexistes à la télé, une question sur la gratuité future de la Foire du livre et terminé.

Et la culture? Voire même, pour rester dans «la thématique», la place des artistes féminines dans la culture? Euh… une autre fois peut-être. Prenez un ticket et remettez-vous dans la file comme à la boucherie, Mme Greoli.

Imagine-t-on qu’on aurait invité Marie-Martine Schyns sans évoquer une seule seconde l’école ou le pacte d’excellence? Juste pour parler droits de la femme (au volant) et bières artisanales de la région de Herve! Aurait-on invité Maggie De Block sans la questionner aussi sur les dossiers santé, kiné, études de médecine, numéros INAMI etc.? Impensable.

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On ne dit plus «culture», on dit «loisirs», «divertissement», «sorties», «temps libre…»

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Non mais, le problème, c’est que la culture, c’est ennuyeux. Certes, c’est un des principaux critères permettant d’évaluer le niveau d’une civilisation, mais on considère aujourd’hui que ça fait fuir le client. D’ailleurs à la télé, on a décrété que «ça ne convenait pas pour le prime time» et il n’y en a plus que sur des chaînes aux audiences confidentielles, et seulement via des mini-programmes.

D’ailleurs, on ne dit plus «culture» nulle part. On dit «loisirs», «sorties», «divertissement», «week-end», «que faire?», «agenda», «temps libre», mais «culture»? Ah non, le mot est devenu «tabou», ou presque.

Pourtant c’est un secteur important la culture. Dans notre pays, il représente plus financièrement que l’industrie automobile (par contre, le salon de l’Auto, voilà qui reste un «événement» que l’on continue à soutenir médiatiquement envers et contre toute logique environnementale et de mobilité).

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À la télé et dans les magazines, la gastronomie a bouffé la culture

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Certes les «cultureux» ont raté le virage de la communication et de la nouvelle télévision. Ils sont restés dans une façon de s’exprimer souvent intellectualisante et peu didactique.

Au contraire des grands cuisiniers qui eux ont compris tout l’intérêt qu’il y avait à se montrer sympa à la télé, à retrousser leurs manches, à éblouir les spectateurs de leur virtuosité culinaire.

Résultat, la grande cuisine a bouffé la place de la culture dans les médias. Et d’ailleurs, plus un théâtre qui n’ouvre aussi un resto. Gros succès pour les spectacles assortis d’un volet «dégustation». La gastronomie, ça coûte cher, beaucoup plus cher qu’une place de théâtre ou de concert, et pourtant le public semble en accepter les tarifs exorbitants.

Et donc si on réinvite Mme Greoli un de ces matins à la radio, ce sera peut-être pour lui demander ce qu’elle aime manger, sa recette de prédilection, son péché mignon et on terminera par une demi-question sur le festival de Cannes.

Mais la culture et ses soucis? Euh… une autre fois peut-être?

Xavier Diskeuve – L’avenir 8 mars 2017

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