Magazine Cinéma

Le témoin amoureux

Par Rob Gordon
Le témoin amoureux Je sais ce que vous pensez : il faut vraiment n’avoir rien d’autre à faire pour aller passer deux heures devant une comédie romantique interprétée par Patrick Dempsey, le docteur aux yeux de velours de la série Grey’s anatomy. La réponse tient en neuf mots : on est professionnel ou on ne l’est pas. La romcom est souvent barbante et usée jusqu’à la corde, mais certains films peuvent créer la surprise à condition de gratter un peu la couche de vernis sucré qui les recouvre. Le témoin amoureux ne fait malheureusement pas partie de cette catégorie, et plonge la tête la première dans la routine. Passé un premier quart d’heure assez amusant, narrant la rencontre de ceux qui seraient dix ans plus tard les meilleurs amis du monde (et plus si affinités), le film se contente de dérouler une trame archi-classique avec une certaine paresse et des difficultés visibles à trouver son style. En témoignent les tentatives répétées du scénario d’aller explorer à chaque fois un nouveau registre comique. Ça fonctionne aussi bien que faire jouer du Woody Allen par Jean-Marie Bigard : les vannes de cul sont grasses et éculées (pas de mauvais jeu de mots, merci) et le burlesque est réduit à néant par une mise en scène impersonnelle.
Côté gaudriole, pas grand-chose à se mettre sous la dent. Et côté guimauve ? Pas beaucoup plus, à vrai dire. Propulsé demoiselle d’honneur au mariage de sa meilleure amie (ce qui est prétexte à une série de gags assez consternants sur les gays), ce fameux témoin amoureux va multiplier les ruses pour écarter le futur marié (un Ecossais moyennement avenant, comme dans Quatre mariages & un enterrement, film cité plus d’une fois) afin de ravir in extremis le cœur de celle qu’il aime d’amour. Dans ce genre de situations, deux possibilités s’offrent aux scénaristes : livrer un happy end clé en main, avec suspense jusqu’à la dernière seconde et ultime rebondissement trois secondes avant le ‘’oui’’ décisif, ou voir le héros se résoudre à laisser la femme de ses rêves épouser l’homme qu’elle aime, beau joueur et soucieux avant tout de son bonheur. Soit deux issues déjà vues mille fois chacune, et quasiment aussi agaçantes l’une que l’autre. Le témoin amoureux se conclura effectivement par l’une de ces deux fins, et ne se distinguera jamais par l’originalité ou la drôlerie des péripéties qui vont y mener.
Heureusement que la bonne humeur générale du film parvient à ne pas le rendre trop antipathique. Même s’il n’a pas la classe d’un Hugh Grant, Patrick Dempsey s’acquitte efficacement de son rôle, moins agaçant qu’en Derek Shepherd, le docteur qui cligne des yeux quand il est triste. Face à lui, Michelle Monaghan semble se spécialiser dans ce type de rôle, mais manque de personnalité et de charme pour vraiment s’imposer (elle était plus convaincante car sans doute mieux dirigée dans Les femmes de ses rêves). Enfin, le film donne l’occasion d’apercevoir pour la dernière fois le regretté Sydney Pollack, décédé il y a peu, et qui est à l’origine des scènes les plus amusantes du film. Même s’il aurait mérité un dernier film un peu plus classieux, il montre qu’outre de nombreux grands films, il fut également un acteur extrêmement attachant. Rien que pour lui, on conseillerait presque d’aller voir ce Témoin amoureux. Presque : on peut aussi rester chez soi et le revoir dans Maris et femmes ou Michael Clayton.
3/10

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Rob Gordon 109 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazines