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Les Mandible: Une famille, 2029-2047, de Lionel Shriver

Publié le 18 juin 2017 par Francisrichard @francisrichard
Les Mandible: Une famille, 2029-2047, de Lionel Shriver

2029. A la tête des États-Unis d'Amérique, le premier président latino, Alvarado, fait face à une chute sans précédent du dollar et à une hausse des taux d'intérêts. Le bancor, la monnaie concurrente, instaurée par des pays membres du FMI, est, selon lui, destinée à remplacer le dollar.

Pour contrecarrer cette offensive contre la monnaie nationale (les obligations américaines détenues par des investisseurs étrangers devront désormais être acquittées en bancors), le président Alvarado annonce lors d'une allocution télévisée une série de mesures temporaires , assorties de peines de prison ou d'amendes :

- il est interdit aux citoyens américains de détenir des bancors

- il est interdit aux entités américaines d'effectuer des transactions en bancors à l'étranger

- il est interdit de sortir du pays avec plus de cent dollars

- il est interdit aux particuliers (et aux bijoutiers) de détenir de l'or sous quelque forme que ce soit.

Le président Alvarado enfin déclare que les États-Unis, compte tenu de la conspiration ourdie contre eux par des puissances étrangères, proclament la réinitialisation de la dette nationale, c'est-à-dire sa dénonciation : dès lors, tous les bons, les billets, les obligations du Trésor sont déclarés nuls et non avenus.

En 2024, le pays avait déjà été secoué par L'Âge de pierre, expression contractée en : c'était un cataclysme provoqué par la paralysie de [son] infrastructure Internet vitale par des puissances étrangères hostiles . On pensait naïvement qu'après une catastrophe pareille le pire était passé...

Eliott Mandible a fait fortune dans les moteurs Diesel. Son petit-fils, Douglas, qui a dirigé une fructueuse agence littéraire, en est le tuteur fiduciaire (son ex-femme Mimi n'a pas pu mettre la main dessus). Son fils, Carter, ancien journaliste au New York Times, en sera bientôt le dépositaire.

(L' Âge-pierre a donné le coup de grâce aux livres et aux journaux papier...)

Douglas a eu deux enfants avec Mimi: Carter et Enola. Il vit maintenant avec Luella, sa seconde épouse, beaucoup plus jeune que la première (vingt-deux ans de moins), mais, cette gracile et élégante intruse , qui plus est afri-méricaine , a été frappée de démence à l'approche de la soixantaine. ..

Carter et sa femme, Jayne, ont eu deux filles, Florence et Avery, et un fils, Jarred:

- Florence Darkly travaille dans un centre d'hébergement et vit avec son compagnon, Esteban, guide mexicain, et son fils, Willing, treize ans, dans une maison durement acquise à Brooklyn

- Avery est thérapeute et a épousé Lockwell Stackhouse, professeur d'économie (un technocrate keynésien ) à l'université de Georgetown; ils ont une fille, Savannah, et deux fils, Goog et Bing, qui étudient dans les meilleures écoles

- Jarred est le rebelle de la famille, un écolo qui a viré survivaliste ...

Enola, alias Nollie, est écrivain, soixante-treize ans. Elle s'est installée en Europe à la fin des années 1990. Un seul de ses livres s'est bien vendu ( Mieux vaut tard ). Sa nièce Florence dit qu'elle : Insolente, téméraire, vivant toujours des histoires d'amours torrides [...]. C'était une vraie bombe.

Les mesures prises en 2029 par le président Alvarado ne seront pas sans effets de ruine (décrite en détail) sur les Mandible: les cartes seront redistribuées dans les années suivantes. Il y aura surtout des perdants et ce ne seront pas ceux qui semblaient avoir les meilleurs atouts au départ qui s'en sortiront le mieux.

Au fil de cette saga, Lionel Shriver met dans la bouche de certains des personnages des propos tout simplement inaudibles aujourd'hui par les contemporains, sans doute parce que la pensée unique étatiste les empêche d'ouvrir les oreilles et qu'elle a encore, hélas, de beaux jours devant elle:

Dans les cent ans qui ont suivi la création de la Réserve fédérale en 1913, le dollar a perdu 95% de sa valeur - quand l'un des objectifs de la Banque centrale était justement de sauvegarder l'intégrité de la monnaie. (Douglas à son fils Carter)

Tu me prêtes dix dollars. Je photocopie le billet quatre fois, te rends l'une des copies, et j'annonce que nous sommes quittes. C'est ça, monétiser la dette: je ne te dois rien, et tu te retrouves avec un bout de papier qui ne vaut rien. (idem)

L'inflation est un impôt. De l'argent pour le gouvernement. Un impôt que les citoyens ne considèrent pas comme un impôt. Pour les hommes politiques, il n'y a rien de mieux. Mais l'inflation n'est pas inévitable. (Willing à sa mère Florence)

C'est l'erreur que tout le monde fait en pensant que tout est plus cher. En fait, les prix sont les mêmes. Ils n'augmentent pas; c'est la valeur de la monnaie qui baisse. (idem)

On ne peut pas dénoncer une dette par un discours. On doit payer d'une manière ou d'une autre. (idem)

Tous les gouvernements volent leurs concitoyens. C'est leur raison d'être. Les rois et compagnie: eux aussi ils volaient leurs peuples. Le président l'a fait d'un coup, cette fois [avec la Dénonciation]. (Willing à son grand-père Douglas)

Le récit se termine, après un saut d'une quinzaine d'années, en 2047. Le meilleur des mondes étatiques est établi, c'est-à-dire que les citoyens américains ont accepté volontairement leur servitude, dont la technologie s'est faite le meilleur instrument, mais un État d'Amérique a fait sécession et y règne la liberté qui n'a là-bas rien d'une utopie...

Francis Richard

Les Mandible: Une famille, 2029-2047, 528 pagesBelfond (traduit de l'américain par Laurence Richard)


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