Magazine Cinéma

Will Hunting. À propos de deux plans-séquence

Par Balndorn
Will Hunting. À propos de deux plans-séquence
Ce qu'il y a d'assez génial dans Will Hunting, c'est de voir à quel point la quête d'un jeune être s'inscrit sans encombres dans la forme classique de la comédie dramatique. Peut-être est-ce là l'une des forces du cinéma de Gus Van Sant : à l'image de ses héros adolescents, son cinéma est souple, mobile, naviguant de repères en repères cinématographiques sans jamais s'y enliser.  
Le schéma affectif de la comédie dramatique tel qu'on le trouve dans Will Hunting met brillamment en forme les désirs inconscients qui animent le personnage éponyme, joué par un Matt Damon rebelle, arrogant et attachant. À travers une série d'épreuves relationnelles incarnées par différents personnages (le professeur de maths qui ne jure que par la reconnaissance institutionnelle, le meilleur ami des quartiers populaires de Boston, la petite amie qui fait irruption dans son monde, le psychologue qui défie la vanité juvénile), Will Hunting confronte ses aspirations, ses craintes, et se les révèle peu à peu. L'efficacité de la structure dramatique est ainsi de dévoiler un inconscient en le projetant brutalement sous les lumières du conflit inter-personnel.


Pourtant, Gus Van Sant ne verse pas dans l'écueil d'une mise en scène trop linéaire, trop attendue. Deux très belles scènes se font écho dans leur manière de filmer la parole. Lorsque Sean fait l'apologie de sa vie de couple passée pour condamner l'égoïsme d'un jeune ado, plan-séquence en gros plan sur son visage paisible et travelling latéral jusqu'à inclure dans une même perspective l'orateur et Will, le destinataire de l'enseignement moral. Lorsque Will tonne contre la NSA et ses effets pervers à l'échelle planétaire, plan-séquence en gros plan et travelling avant progressif sur son visage indigné, jusqu'à observer la naissance de la colère dans cette bouche qui parle.  
Les deux plans-séquence du film apparaissent au moment où une parole se libère. La catégorisation des événements qu'opère le montage cut s'interrompt, le temps qu'il faut pour que le poids des non-dits se déverse à l'écran. Les grands procédés du cinéma classique se mettent en sourdine pour se mettre à l'écoute d'une voix humaine.  
Au sein d'une mise en scène très linéaire, un instant de suspension éthique, qui fait prendre conscience de manière rétroactive de l'étendue des silences affectifs qui pesaient sur les personnages. Un choix proprement esth-éthique qui saisit mieux le fait d'être humain dans sa complexité.
Dans sa quête de repères et sa fuite en avant, soudain, un espace s'offre à l'adolescent.  

Will Hunting. À propos de deux plans-séquence  
Will Hunting, de Gus Van Sant, 1997

Maxime

Retour à La Une de Logo Paperblog

A propos de l’auteur


Balndorn 391 partages Voir son profil
Voir son blog

l'auteur n'a pas encore renseigné son compte l'auteur n'a pas encore renseigné son compte

Magazine