BEDARIEUX/GRAND ORB – Retour sur « L’enfance à l’œuvre » avec Robin Renucci et Nicolas Stavy – 14 janvier 2018

saison culturelle 17/18

Retour sur L'ENFANCE À L'OEUVRE

C'est de la toute petite enfance que tout s'est construit. Ne passons pas à côté de l'enfance qui est le devenir de l'humanité - Robin Renucci

LA TUILERIE

dimanche 14 janvier 2018

durée 1h15

L'invitation au voyage

" Qu'est-ce qui, dans l'enfance, forge l'aspiration et amène la création ? Comment, pour reprendre l'expression de Marcel Proust, les " hautes et fines enclaves du passé " surgissent, élèvent et éclairent ? Comment dans le noyau des émotions intenses de l'enfance, cette période de lait et d'encre, se dessine une vocation ? "

Ce dimanche, en fin d'après-midi, nous nous sommes embarqués pour un double périple. Le premier, très terre à terre, trivial même, est celui qui nous a conduit jusqu'à Bédarieux. Pluie, brouillard, sensation de départ pour un but lointain mais qui en vaut la peine. Et puis, une fois à l'abri dans cette Tuilerie, accueillante, où chaleureux se pressait, déjà, le public, deuxième départ derrière Robin Renucci.

Une invitation à le suivre, dans la salle, que l'acteur initie avec quelques mots, simples et efficaces : rappels de son travail, l'engagement des Tréteaux de France au service de la culture et de l'éducation populaire. Programme collant parfaitement aux projets de Bédarieux.

Scène dépouillée, sur des tréteaux surélevant le plateau, clin d'œil ou nécessité technique, un piano à queue, splendide Steinway, une " chaise haute " et une table-bureau. En fond une tapisserie dont les grandes fleurs, s'estompant " coté cour ", évoquent les décors des maisons de nos enfances.

Un voyage nous entrainant, au rythme du jeu, dépouillé, lui-aussi, de Robin et du piano de Nicolas, au travers d'œuvres de " Géants " de notre littérature. On y voit naître des vocations, on y découvre le doute et la certitude, on vibre avec Romain Gary et sa " mère russe ", on s'assoit sur le lit avec les " chercheuses de poux ", on déguste à Combray, avec le petit Marcel, cette délicieuse Madeleine et son ressac de souvenirs... merveilleux moments.

Renucci est parfait, avec la sobriété d'un très grand il confirme que silences et immobilité sont toujours du théâtre... et quel théâtre ! Son lent cheminement dans sa traversée du plateau, depuis le jardin, à gauche, jusqu'à la cour, à droite, depuis la Mélodie hongroise et Paul Valéry, jusqu'à César Franck et Proust, impose l'image de ce parcours initiatique, de l'enfance à l'âge adulte, jalonné par découvertes et interrogations. Quand à Nicolas Stavy, il fait naître sous ses doigts toute la subtilité, toute la richesse, d'œuvres majeures que l'on découvre, peut-être, avec une oreille nouvelle. Les deux poèmes de Scriabine en donnent un des plus beaux exemples.

La salle, sensible à cette " mise en éveil " ne s'y est pas trompé et le public bédaricien (et d'ailleurs) a longuement acclamé cette performance.

Bravo à Bédarieux/ Grand Orb, bravo à une ville qui ose, qui ose faire de la culture un de ces chevaux de bataille. Il me semble qu'elle est en train de réussir ! Marc Ely pour IDHERAULT.TV