Sur quelques absurdités quotidiennes dans les sciences sociales (14)

Anecdotique

Je n’ai jamais compris les raisons pour lesquelles le qualificatif d’anecdotique pouvait devenir péjoratif, prendre le sens de secondaire, d’annexe, de faible intérêt. Au contraire, aussi faible soit son ampleur, il me semble qu’une « histoire » propose un récit particulièrement révélateur d’une situation. A partir d’elle, de cette proximité du réel, de cette verbalisation d’une expérience, par l’analyse du récit et l’examen du contexte de son expression, nous pouvons induire des idées pour une fois pas trop éloignées du vécu

Dès lors, pourquoi les journalistes et même quelque savant (je pense à Yves Winkin dans son important livre Anthropologie de la communication à la page 244) tiennent-ils à disqualifier l’anecdote ? Peut-être est-ce le refus des animateurs de télévision qui réclament de leurs invités des « anecdotes », afin d’insuffler un minimum d’authenticité dans les banalités présentées ?

Mais peut-être est-ce aussi parfois le moyen de se cantonner dans « le provincialisme des généralités » selon l’expression de Jacques Berque afin d’échapper à la trivialité des pratiques et aux charges de la preuve.

Bernard Traimond