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(Nouvelles) métaphores dans un monde digital

Publié le 02 mai 2018 par Marianne Dekeyser @IDKIPARL

BridgeLES LANGAGES MÉTAPHORIQUES DE L’ENTREPRISE
Quelles soient sportives, militaires, organiques, historiques, philosophiques, artistiques, économiques ou pragmatiques, les métaphores (dont l’étymologie grecque signifie porter (phéro) d’un lieu à l’autre (méta)) restent aujourd’hui un puissant moyen pour les entreprises et/ou managers de donner du sens, faire bouger les représentations existantes ou les comportements ; littéralement, de transporter les équipes d’une représentation à une autre ou d’une émotion à une autre.
Par le détour, elles permettent (de même que le langage figuratif au sens large) de déterminer une nouvelle image du succès, du projet, du futur, de l’innovation, des relations interpersonnelles au sein d’une équipe ou d’une organisation…

FORMES & MÉTAPHORES

Usuellement, les métaphores se déclinent sous forme d’histoires plus ou moins longues ; voici trois pistes (voir image ci-dessous) :  VISUELLES, LAPIDAIRES AVEC UNE CITATION, PLUS LONGUES AVEC UNE HISTOIRE (je cite celle bien connue de l’expédition Shackleton souvent utilisée pour appréhender ce qu’est le leadership, pour en savoir plus, voir ici ; j’aurais pu également parler « des cailloux dans la chaussure » ou comment les petites choses non résolues peuvent ralentir ou empêcher notre développement , « du singe sur l’épaule » pour illustrer ce qu’est la délégation ou non etc… Vous les connaissez par coeur !

Formes

QUE CHANGE LE MONDE DIGITAL ET LE MONDE DES PLATEFORMES ? Immédiateté, accélération et réinvention permanente redessinent la façon de mener son activité :  ce qui était vrai hier ne l’est plus forcément aujourd’hui, l’innovation (de rupture) n’est plus une option et, en même temps

;-)
la prise de recul devient encore plus vitale. Nous avons besoins de (nouvelles) métaphores, une forme de décélération de l’esprit pour mieux percevoir ce que ce nouveau monde induit. Ces métaphores ne sont pas « nouvelles » en tant que telles comme vous pourrez le constater dans le série à venir. Comme le dit le dit Beau Lotto dans son dernier livre paru en avril « Deviate – the science of seeing differently« , la prochaine disruption (innovation de rupture) ne viendra pas d’une technologie mais de la façon de regarder différemment les choses.
Aujourd’hui, je vous propose une piste de réflexion autour d’un constat actuel « c’est la transformation permanente« , pour en parler, observons les crabes….

Le crabe

La croissance du crabe ne s’effectue pas graduellement comme chez les animaux possédant un squelette interne, mais par suite de mues périodiques. Le taux de croissance dépend de la taille des individus, oscillant entre 15 et 30 % à chaque mue.

Pour croître, les crabes passent par un processus appelé l’exuviation ou la mue. Le crabe commun Carcinus maenus connaît environ dix-huit mues au cours de sa vie, qui dure quatre ans (soit presque 5 mues ou transformations par an).

Le processus d’exuviation est déclenché par une hormone appelée ecdysone (appelée aussi « hormone de mue ») qui engendre une série d’événements.

Après une phase d’accumulation intensive de réserves énergétiques, le crabe cesse de s’alimenter et se tient immobile dans un endroit tranquille et abrité. Le crabe augmente alors la quantité de pression d’eau et, par voie de conséquence, la pression dans la coquille. En même temps, la coquille s’affaiblit. Une fois que la pression est suffisamment élevée, la ligne de soudure située à l’arrière du corps commence à lâcher. La carapace s’ouvre alors, de l’arrière vers l’avant, permettant au crabe d’en sortir. Il retire son corps, puis ses pattes et ses pinces. Les muscles des pinces s’affaiblissent de sorte quelles peuvent être retirés de l’ancienne cuticule et les minéraux essentiels sont recyclés par un stockage à court terme dans la muqueuse de l’estomac.

Après avoir mué, le crabe possède un corps tout mou. Il est donc très vulnérable. Pour se protéger, il reste caché sous les rochers. Il ne se nourrit plus et laisse sa carapace s’imprégner de calcaire pour durcir. La carapace commence à durcir 4 jours après la mue.
Le nouveau crabe mou a besoin de deux semaines pour reminéraliser la coquille et reste très vulnérable à la prédation à ce stade. Cela démontre que le crabe est temporairement vulnérable avant de faire sa transformation et juste après.

COMMENT L’EXUVIATION DU CRABE PEUT-ELLE NOUS INSPIRER DANS UN CONTEXTE DE CHANGEMENT PERMANENT ET DE TRANSFORMATIONS ACCÉLÉRÉES ?

1/ Pour la récurrence du processus de mue, largement comparable aux contextes organisationnels actuels. L’exuviation incarne une forme d’obsolescence programmée qui invite à la régénération permanente. La métaphore du crabe peut, de ce fait, constituer une introduction simplifiée à l’impermanence des choses.

2/ Dans le cas d’une stratégie de croissance organisationnelle ou personnelle, l’exuviation permet clairement de réfléchir au fait que ce qui a fait le succès de l’entreprise dans le passé pourrait maintenant constituer une contrainte (l’exosquelette trop petit) ; mais il ne s’agit pas de faire complètement table rase du passé comme le démontre le processus d’ecdysis, qui recycle efficacement les composants clés de la coquille, du calcium, des lipides et des minéraux essentiels, puis les réutilise dans la formulation de la nouvelle coquille.
La métaphore invite à être acteur de ce mouvement permanent plutôt qu’à le subir, tout en redonnant du sens à un exercice bien connu de questionnement dans les organisations : Que gardons-nous d’essentiel et comment le faisons-nous évoluer ?
Que laissons-nous derrière nous qui n’a plus de pertinence ? Que faisons-nous de nouveau pour nous développer ?

3/ Une autre inspiration possible consiste à envisager le processus de transformation à l’aune de l’ecdysis (processus biochimique de la mue) : quels sont les changements nécessaires pour concevoir la nouvelle carapace, recycler, éliminer ce qui n’est plus nécessaire et faire la transition entre l’ancienne carapace et la nouvelle carapace.
Par ailleurs, le crabe se « concentre » uniquement sur ce processus de mue (il arrête de manger). Cela interroge sur tous les projets de transformation menés dans les entreprises qui viennent s’ajouter aux nombreux projets en cours : quelles priorités, quelles articulations à faire pour maintenir le sens ?
Enfin, comme les crabes, l’entreprise traversera une période de vulnérabilité où la nouvelle carapace durcit (avant et après). Comment se protège-t-elle ? Comment protège-t-elle ses collaborateurs ?

Si les crabes tels que Carcinus maenus (le crabe commun) passent par ce processus jusqu’à dix-huit fois dans leur vie de quatre ans, alors les entreprises doivent intégrer cette philosophie dans leurs plans de croissance et transformations continues.
Un changement de coque ne suffira pas.


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