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Coup de coeur : Kalakuta Dream. Librement inspirés

Publié le 24 mai 2018 par Africultures @africultures

Kalakuta Dream est un spectacle en l’honneur de la pensée créatrice de Fela Kuti, qui nous apparaît sous les traits d’un passeur d’espoir et de vie à hauteur d’hommes. C’est le coup de coeur théâtre de Amélie Thérésine pour Africultures cette semaine.  Cette création de la Bande de Niaismans dans une mise en scène de Léonce Henri Nlend et Malik Rumeau en complicité avec Koffi Kwahulé, est joué les 25 et 26 mai 2018 au Théâtre de l’Échangeur (Bagnolet).

Les artistes de la Bande de Niaismans et Koffi Kwahulé ne convoquent pas ce que l’Histoire nous a légué de l’icône en termes d’iconographie ou de musique : aucune projection d’archives visuelles de la star en concert au Shrine ou de ses danseuses et de leur art d’ornementation du corps, pas non plus de bande son enregistrée des musiques de Fela Kuti. Rien du mythe ni du sentiment d’extraordinaire que la fascination peut produire chez le spectateur.

De la fameuse République de Kalakuta, qu’il est d’usage de présenter comme une enclave utopique dans la ville de Lagos, nous aurons en ouverture de spectacle une rêverie sous la forme d’un nom « Kalakuta-city […] où on fera de la musique et on dansera. De jour comme de nuit… » et en clôture la mise à sac brutale du lieu par les policiers et les militaires qui est souvent considérée comme fondatrice de la destinée de Fela Kuti, du moins dans son engagement.

C’est au sein de cette parenthèse rêvée par Koffi Kwahulé que se déroulent les fragments de vie inventés autour du personnage de Fela Kuti appréhendé dans la potentialité de son devenir, dans sa puissance comme sa fragilité. Cette écriture en mode mineur dégagée du grand récit n’en souligne que mieux un héroïsme qui ne relève pas de grands faits mais d’une pensée engageante forgée jour après jour en réaction au monde tel qu’il va, comme pour la partager avec le spectateur.

Ainsi en lieu et place de Fela Kuti, nous faisons connaissance avec Felamojoh, musicien, accompagné de Sandra, sa petite amie chanteuse, et de Barry, son ami d’enfance. Un trio musical saisi au seuil d’une destinée glorieuse comme un trio amoureux pris dans la théâtralité de sa vie quotidienne où un soupçon de jalousie peut se transformer en trahison.

Du célèbre Afrobeat, nous entendons des compositions à la guitare par Felamojoh (DjeuhDjoah) lors de séances de répétitions ou en concert, des textes savoureux mêlant français, anglais et pidgin qui actualisent les chansons de Fela Kuti dont la dimension politique va crescendo et où les rencontres et collisions entre les mots et les réalités qu’ils recouvrent ne se départissent jamais d’un humour critique et jovial et où la voix de Sandra (Charlotte Wassy) s’associe à celle de Barry (Léonce Henri Nlend) pour former les choristes.

Ainsi, ayant pour point de départ la figure de Fela Kuti, le spectacle met en jeu avec une grande virtuosité une réflexion sur le geste créateur et la transmission qui opèrent par hybridation pour féconder de nouveaux imaginaires.


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