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Mon discours à la réunion publique ADMD à Montpellier

Publié le 07 octobre 2018 par Jeanlucromero

Mes chers amis,

C’est avec beaucoup d’émotion que je vous parle aujourd’hui. J’ai déjà eu, lors de nos travaux de la matinée, l’occasion de saluer la mémoire de Christophe Michel-Romero qui fut notre secrétaire général et, aussi, mon mari. Je le dis, y compris à ceux qui l’ont violemment critiqué compte tenu de notre relation, Christophe fut un secrétaire général particulièrement efficace et disponible. Ce n’est faire injure à personne que de dire qu’il est celui de tous les secrétaires généraux de l’ADMD qui a été le plus présent, toujours bénévolement, que ce soit rue de Chabrol, au siège de l’ADMD, ou dans nos délégations, sur le terrain. Rappelez-vous qu’il avait toujours le sourire et qu’il était toujours bienveillant à l’égard de chacun et si présent, partout…
Aussi, le défi va-t-il être grand à relever pour le nouveau secrétaire général de notre association. Vous le connaissez à présent. Il s’agit de Jonathan Denis, élu hier en fin de journée par les membres du conseil d’administration et dont l’élection par notre Conseil a été approuvée par nos adhérents avec un score de 95,8%. Jonathan était co-responsable des Jeunes de l’ADMD, comme le fut Christophe. Ils étaient des amis. J’ai toute confiance dans la capacité et la rigueur de Jonathan pour assumer cette lourde mission. Il sera épaulé par les membres du bureau de l’ADMD et trouvera dans notre délégué général, Philippe Lohéac, un collaborateur efficace.
J’ai aussi, comme vous, une pensée pour Marie Humbert, la « mère courage », qui a tant apporté à notre combat. Mais aujourd’hui, je voudrais juste me souvenir de nos fous-rires avec Marie et Christophe quant elle venait dormir chez nous. Quelle femme elle fut ! Elle nous manque tant. Ils nous manquent, tous les deux, tant…
Dans mon intervention qui sera courte compte tenu du nombre des intervenants de qualité qui vont se succéder derrière ce pupitre, je voulais rappeler quelle est la stratégie de notre association, portée par son conseil d’administration élu démocratiquement il y a juste un an et conforté dans sa gouvernance par les résultats très favorables (plus de 94% d’approbation à chaque question) des votes concernant les différents rapports soumis au suffrage de nos adhérents.
J’entends l’impatience de nos adhérents. J’entends leurs angoisses devant des situations personnelles ou familiales dramatiques. J’entends ceux qui n’ont pas fait grand-chose par le passé mais qui prétendent tout savoir aujourd’hui du lobbying et de la gestion. Je comprends aussi la fatigue et la difficulté de beaucoup de nos adhérents les plus âgés à appréhender les nouveaux moyens de communication pour se faire entendre du législateur. Je comprends la lassitude après presque 40 années de mobilisation…

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Ce matin, vous avez entendu Jean-Louis Touraine, député du Rhône, auteur d’une proposition de loi de légalisation de l’euthanasie cosignée par près de 200 députés, vous parler de sa volonté d’avancer progressivement vers notre objectif. Tout comme d’autres députés, cosignataires de propositions de loi ou, surtout, auteurs de propositions de loi. Je pense à Olivier Falorni et à Caroline Fiat. Un peu comme le fit auparavant Simone Veil qui proposa alors au Parlement une loi allégée. Un peu d’histoire.
L’IVG est aujourd’hui un droit. Certes, mais seulement depuis le 22 juillet 1992 et le nouveau code pénal. Dans la loi du 17 janvier 1975, il s’agissait d’une « simple » dérogation à un délit, votée pour une période de 5 années seulement puis confirmée le 31 décembre 1979.
L’IVG est aujourd’hui un acte qui doit être pratiqué avant la fin de la 12e semaine de grossesse. Certes, mais seulement depuis le 4 juillet 2001. Dans la loi du 17 janvier 1975, l’acte devait être pratiqué avant la fin de la 10e semaine de grossesse.

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L’IVG s’adresse aujourd’hui aux femmes enceintes, sans condition. Certes, mais seulement depuis le 4 août 2014. Dans la loi du 17 janvier 1975, la femme enceinte devait se trouver placée dans une situation de détresse.
L’IVG est aujourd’hui remboursée à 100% par la Sécurité sociale. Certes, mais seulement depuis le 31 décembre 1982 puis le 31 mars 2013. Dans la loi du 17 janvier 1975, l’acte n’était pas pris en charge par la Sécurité sociale.
Simone Veil avait compris que pour passer outre les réticences – elles furent nombreuses – il fallait s’appuyer sur une raison de santé publique dans un premier temps, mettre le pied dans la porte, pour ensuite, patiemment, arriver à un texte au plus près des légitimes revendications des femmes en la matière qui avaient tant raison de crier ce slogan « Mon corps m’appartient ! ».
Dans notre sujet,celui de l’aide active à mourir, et dès lors qu’il s’agit de légaliser un geste actif pour finir sa vie dans la dignité, il convient de rassembler le plus largement possible et de ne pas agiter trop violemment les chiffons rouges devant nos opposants les plus farouches. Il convient de nous inspirer de l’exemple de Simone Veil qui ne réussit pas si mal… Le jour où ces parlementaires auront réussi à mettre la légalisation de l’euthanasie à l’ordre du jour, il sera temps de leur demander de l’amender en s’appuyant sur la proposition de loi que nos adhérents ont adopté massivement cette année et qui va dès lundi être adressée à chaque parlementaire. En attendant, il faut donc soutenir tous les parlementaires qui signent des textes nous faisant passer du laisser mourir du bon docteur Leonetti à l’euthanasie et au suicide assisté.
Ce que je viens d’exposer, c’est la stratégie actuelle. Sans doute une politique que d’aucun pourrait qualifier des petits pas. Possible. Mais elle est toujours préférable à l’immobilisme auquel conduit toujours le jusqu’au boutisme. Cette politique pourra changer comme changent les présidents de l’ADMD. Ce dont je suis certain, c’est qu’elle est la seule qui permette d’être crédibles et d’être entendus au Parlement, à défaut d’y être bien écoutés…
Mais en attendant cette loi ? me direz-vous. Que faisons-nous, y compris pour ceux qui évoquent le suicide de bilan ?
Notre association ne reste pas inactive. Et c’est un hommage à notre service d’Ecoute que je rends ici ; ainsi qu’à Francine Noël qui accompagne – toujours bénévolement – nos écoutantes et nos écoutants dans cette difficile mission.

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D’abord, la loi de sédation permet, dans une certaine mesure, d’apporter des réponses. Encore faut-il que les médecins hospitaliers ne méconnaissent pas la loi, ce qui est malheureusement fréquent et nécessite donc une intervention de nos médecins conseillers, voire de nos juristes conseillers.
Ensuite, le recours à nos amis suisses est possible, à la condition que le patient ait une pathologie contrairement aux affirmations mensongères de la ministre de la santé – c’est la même chose en Belgique – et soit encore en capacité de se déplacer jusqu’aux locaux de l’une des associations helvètes ; puis puissent accomplir le geste du suicide. Je rappelle ici que notre association, dans les cas qui auront été retenus par la commission d’entraide mise en place, pourra apporter une solidarité financière au regard des éléments qui lui seront communiqués.
Jamais, nous ne laissons sans réponse des appels au secours, dès lors que la prise en charge par notre service d’Ecoute a été faite.
En revanche, n’attendez pas de moi d’autoriser dans notre association la vente de pilules en provenance de Chine ou du Mexique ; pilules dont on ignore tout de la composition et de l’effet. Vous ai-je dit que les Suisses sont affolés par les dégâts irréversibles mais non mortels que provoquent ces pilules qui ne profitent au fond qu’à ceux qui en font le commerce et qui, pour certains, s’enrichissent du malheur des autres ?
Notre association est une association militante, solidaire, responsable. Elle ne dérogera pas à ce principe, sous mon autorité, pour permettre des dérives qui nous seraient reprochées ensuite, y compris par les parlementaires, les journalistes et les intellectuels qui nous soutiennent et portent notre revendication à des niveaux intéressants et pertinents. Mais jamais, contrairement à ce que prétend une minorité infime d’opposants à notre stratégie, nous n’avons laissé quelqu’un sans réponse, notamment parce qu’il n’avait pas les moyens d’aller en Suisse.
Nous pouvons gagner ce combat pour la vie, pour la fin de vie. C’est à notre portée. Mais il faut se mobiliser et se regrouper. C’est dans les mois à venir que tout devrait se jouer.
Chateaubriand écrivait : « Tout nous ramène à quelque idée de la mort, parce que cette idée est au fond de la vie. »
Hauts les cœurs ! Mobilisons-nous partout! Allons voir nos parlementaires et je suis sûr que bous gagnerons!
Vive l’ADMD !
Vive la liberté !
Je vous remercie. 

Jean-Luc Romero-Michel
Président de l’ADMD


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