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Frédéric Atlan : la longue marche, du pigment au pixel

Publié le 01 novembre 2018 par Pantalaskas @chapeau_noir

Quand le numérique a manifesté ouvertement ses ambitions face à la peinture, la curiosité a parfois laissé la place à la défiance. Face au geste authentique du peintre, confronté physiquement au support de la toile, comment analyser cette pratique nouvelle dont la seule identité n’était que fictive, dont la seule réalité n’était que virtuelle ?
Rapporté au processus de création historique qui laissait l’homme depuis des millénaires seul dans son face à face avec la paroi de la caverne puis avec le plan du tableau, le numérique est venu bouleverser la donne : l’ingérence d’une machine, l’ordinateur, encore porteuse de toutes les suspicions, la sidérante facilité avec laquelle l’artiste du digital peut jouer, gommer, défaire, refaire, tous ces chefs d’accusation ont été avancés pour discréditer l’idée même d’un art numérique à part entière.

Frédéric Atlan : la longue marche, du pigment au pixel

« Impressions américaines, soleil couchant3 160 x 200 cm

Frédéric Atlan, dans sa dernière exposition à l’APACC de Montreuil qui remonte à six ans, s’était engagé dans une exploration de la peinture qui, dans cet « Infra », nous obligeait à scruter la toile. L’artiste mettait en lumière ce plan complexe où support et peinture se marient pour donner un résultat qui échappe aux codes maîtrisés de l’image. Dans cette peinture s’opérait cette confrontation entre support et couches peintes, entre blanc, noir et couleurs, entre micro-formes et matières. Au terme de cette expérience visuelle, le peintre a conduit le spectateur à envisager que le voyage pourrait ne pas s’arrêter là et  tenter de pénétrer davantage encore dans cet «entrevoir ».
Aujourd’hui, à l’Espace Beaurepaire à Paris, c’est le long chemin parcouru toutes ces années qui aboutit aux propositions nouvelles du peintre. A l’image des physiciens plongeant au cœur de la matière, Frédéric Atlan a poursuivi ses travaux précédents en cherchant au cœur de l’image comment nous faire percevoir cette parcelle élémentaire de la couleur qu’il compose à partir de ses « Tétragrammes » : « Des monochromes rectangulaires agencés en formation carrée autour d’un œilleton vide. »

Frédéric Atlan : la longue marche, du pigment au pixel

« Veliko Tarnovo  » photographie numérique tétragrammisée, Frédéric Atlan.

L’exposition témoigne de ce va-et-vient entre matière et image, entre pigment et pixel. La recherche sur les Tétragrammes évoluant au gré des sensations et des émotions a fourni les élément constitutifs de cette nouvelle image, photographique celle-ci. Cette alchimie singulière entre le point trichrome (rouge, vert, bleu) classique de l’écran de télévision et le tétragramme composé par le peintre génère ce nouveau composant situé entre le pigment du tableau et le pixel de l’image numérique.
« Lorsqu’on définit au préalable un protocole de travail, un cadre rigoureux, explique le peintre, on peut alors explorer les moindres parcelles de ce champ et se lâcher complètement. Pour moi, c’est ça la liberté. Elle est à l’œuvre dans l’exposition Opérations, où à partir d’un même processus donné, des mêmes contraintes, on peut découvrir des résultats complètement différents ! »
C’est dire que l’artiste n’abandonne nullement ses prérogatives face à l’ordinateur et exprime sa liberté dans les différents aspects de sa pratique. A titre personnel, ma préférence, parmi  les « opérations » pour reprendre ce terme clinique, va à ce jeu subtil à la surface de la toile. Collages, déchirements aboutissent à ce résultat délicat, éthéré qui place la peinture dans un champ novateur.

Photos : Frédéric Atlan

Frédéric Atlan
« Opérations »

29 octobre – 4 Novembre 2018
Espace Beaurepaire
Association, Lieu d’art
28 rue Beaurepaire
75010 Paris


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