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Le forcené ou le candide et ses Chocobons

Publié le 22 février 2019 par Desfraises

Le forcené ou le candide et ses Chocobons
Imaginez un galet lancé sur la surface plane d'un étang, les ricochets, les remous. Les remous à la surface et l'eau agitée en profondeur. Le galet, c'est ce forcené qui sème la panique sur son passage rue de Rome puis sur la Canebière à Marseille. Les ricochets, les remous, ce sont les conséquences de ses actes, les gens qu'il croise, trois hommes de 23, 27 et 35 ans à qui il assène un coup de poignard à la tête, au cou, à la nuque, les témoins qu'il épargne et qui se retrouvent seuls avec leur effroi, les questions des enfants qu'ils tiennent d'une main tremblante. L'eau agitée, ce sont les sirènes hurlantes des ambulances du bataillon des marins-pompiers, c'est aussi la rumeur qui se répand dans le quartier, dans la ville, dans la presse locale, sur les réseaux sociaux. Les gens qui disent j'y étais ou j'aurais pu y être.
Inconscient du drame qui se déroule à deux pas, je traverse la Canebière armé de mes achats. Une paire de chaussures de randonnée flambant neuves pour une prochaine virée dans les Calanques et un énorme paquet de Chocobons pour agrémenter un cadeau d'anniversaire à préparer un peu plus tard.
Je vois piler sur moi, ou du moins j'ai l'impression qu'il pile sur moi tant il est proche, le véhicule banalisé de la BAC qui tente d'arrêter la course folle du forcené. Une ou deux secondes qui me paraissent une éternité. Où je suis incapable de bouger, incapable d'aider cette pauvre dame qui, dans la panique, empêtrée dans ses sacs de courses, a chuté. Quand retentissent les huit coups de feu, je n'ai toujours pas le réflexe de chercher l'abri dans le porche de l'immeuble derrière moi. Hébété, je scrute le corps sans vie de l'assaillant et une arme de poing gisant à ses pieds.
Repoussé par les forces de l'ordre, en nombre, qui tentent de contenir la foule curieuse, je marche tel un automate et rentre chez moi. Je ne sais pas quoi faire avec tout ça.
Je digère lentement la violence inouïe du monde qui nous entoure.
Armé de mes chocolats, de mon indéfectible besoin de croire en l'humain, je poursuis un chemin prudent où l'optimisme frise l'utopie. Je suis en vie et je dis aux gens que j'aime que je les aime.

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