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Gnome : le poids des icônes

Publié le 19 mars 2019 par Aris - Blognote @_a_r_i_s

Icônes de Gnome 3.32

Gnome, l’environnement graphique pour systèmes GNU/Linux, viens de sortir une nouvelle version (3.32) comportant d’importantes améliorations au niveau des performances comme de l’ergonomie. Au passage, un nouveau set d’icônes fait son apparition…

Jakub Steiner, salarié de Red Hat et membre de l’équipe de design pour Gnome, avait expliqué en janvier 2019 sur son blog personnel les raisons d’un d’un changement global du design des icônes de l’environnement de bureau, qui n’avait pratiquement pas évolué depuis une quinzaine d’années :

Le style actuel de nos icônes remonte au début des années 2000, au style Tango originel. L’une des idées fondamentales derrière Tango était que chaque icône doit être dessinée à des tailles multiples, afin d’obtenir un affichage parfait au pixel près (pixel-perfect) dans chaque contexte. Cela signifie que si vous voulez créer une icône pour une application, vous de devez pas en dessiner uniquement une, mais jusqu’à sept déclinaisons différentes par icône (symbolique, 16px, 22px, 24px, 32px, 48px, et 512px).

Un dispositif qui s’avère après coup bien trop complexe à maintenir, et qui a finalement freiné l’adoption de la ligne graphique de Tango par de nombreuses applications tierces tournant sur Gnome. Ce qui a nuit ainsi à la cohérence globale du design de l’environnement. Jakub parle même d’un « échec » pour Tango, de par son incapacité à évoluer et s’adapter, alors même les tendances en matière de design d’interface évoluaient (style « flat » et 2D). Un jugement sévère par celui qui fut le designer graphique des icônes de Tango.

L’un des principaux objectifs du projet Gnome au cours de ces dernières années a été de rendre autonomes les développeurs d’applications. L’une des principales raisons de cette refonte est que nous nous sommes rendu compte que le style actuel nous tire vers l’arrière en tant qu’écosystème. Tout comme Builder consiste à fournir un flux de travail de développement transparent, et Flatpak à permettre une distribution directe des applications, ce changement de design vise à rendre plus accessibles à un plus grand nombre d’applications les belles icônes .

Pour que ce nouveau design des icônes soit plus incitatif pour les créateurs de logiciels, Jakub Steiner introduit aussi une nouvelle application appelée Icon Preview, créée par Zander Brown, qui vise à rendre le flux de conception d’icônes plus rapide et plus fluide en permettant de démarrer rapidement à partir d’un modèle, et de prévisualiser au fur et à mesure le rendu dans différents contextes. Le logiciel permettra également, dans une prochaine version, d’exporter directement les icônes au format SVG pour les utiliser dans les applications.

Le bureau de Gnome 3.32

La réponse au billet de blog de Jakub Steiner que je trouve la plus élaborée et la plus intéressante, en terme de réflexion sur les icônes dans le dispositif UI/UX, est un long billet de Cassidy James Blaede, l’un des développeurs de la distribution GNU/Linux elementary OS, ami de Jakub Steiner, et à qui ce dernier a demandé son opinion.

Un des échanges que j’ai particulièrement noté concerne l’un des arguments de Jakub en faveur de l’abandon par Gnome du hinting, à savoir le dessin différent de chaque icône en fonction de son contexte d’utilisation : Gnome n’a en fait jamais utilisé toutes les tailles d’icônes imposées par la charte graphique de Tango. Pour Jakub, c’est une bonne raison pour abandonner.

Cassidy James fait remarquer que, contrairement à Gnome, elementary OS a conçu son interface justement pour et sur une utilisation précise et intensive des icônes en fonction de leur taille : 16px pour les menus, 24px pour les sous-menus popovers, 48px pour le dock, etc. Jusqu’au support des écrans haute-résolution (HiDPI) avec une taille doublée à l’affichage.

Alors que nous pourrions réduire le nombre de tailles [d’icône] utilisées dans l’OS, chacune de ces tailles est mûrement réfléchie en fonction du contexte : par exemple, 16px semble un peu trop petit dans les popovers, mais 24px est un peu trop grand dans les menus contextuels. En nous assurant que toutes les icônes d’applications elementary OS et les icônes des applications de tierces parties sont fournies dans chacune de ces tailles, nous pouvons être plus flexibles et créatifs dans notre conception, et nous assurer que les icônes sont toujours aussi nettes et s’affichent le plus parfaitement possible dans chaque situation.

Pour Cassidy James, qui regrette l’abandon du concept de perfection au pixels près, le problème de Gnome vient plutôt du style Tango lui-même, basé sur une modélisation 3D hyper-réaliste, trop complexe au niveau de la création graphique, et qui produit au final de « jolies images », mais qui ne sont pas toujours convaincantes en tant qu’icônes. Ce qui a d’autant plus compliqué la tâche de l’équipe de design de Gnome qui a pris pendant des années à sa charge la création d’icônes pour de nombreuses applications tierces, avec l’objectif de préserver ainsi une certaine cohérence de l’interface globale… Mais au prix de ne pas, ou peu, avoir fait évoluer Tango lui-même.

Sur ce point Jakub Steiner et Cassidy James Blaede s’accordent pour considérer que c’est désormais aux concepteurs et conceptrices d’applications de faire l’effort de s’intégrer aux environnement graphique sur lesquels celles-ci sont proposées. Ce que doit favoriser une charte graphique (Human Interface Guidelines) qui combine une certaine commodité de réalisation avec une rigueur plus grande et plus stricte quant aux règles de design global. Ce que le dispositif autour de Tango n’a jamais possédé.


Références :



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