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Triple frontière. Triples buses ?

Par Balndorn

Triple frontière. Triples buses ?

Résumé : D'anciens soldats des forces spéciales peinant à joindre les deux bouts se réunissent pour préparer un coup risqué : piller un baron de la drogue sud-américain.
Le scénario de Triple frontière pourrait se résumer ainsi : « C’est l’histoire de cinq gros durs qui aimeraient qu’on les paye à leur juste valeur, qui doutent du fait qu’ils soient des gros durs alors qu’ils en sont bel et bien ».

Qu’est-ce qu’une œuvre médiocre ?
Avec un peu plus de finesse – par exemple, si Kathryn Bigelow, à l’origine du projet, l’avait conservé jusqu’au bout –, Triple frontière aurait pu être un bon film. Avec J. C. Chandor, il évite de sombrer dans le navet pathétique. Mais ne quitte pas la masse inerte des films-qu’on-oublie-sitôt-vus.Difficile de parler de quelque chose de médiocre. Ni trop bon pour le louer, ni trop mauvais pour le descendre. Rien qui craque sous la dent du critique qui y croque. Prêtons-nous donc à l’exercice.Comme beaucoup de films médiocres – et c’est peut-être leur caractère définitoire –, Triple frontière met en avant un problème sociétal sans en remettre en cause les fondements. Ici, cinq vétérans des forces spéciales états-uniennes se plaignent des pensions dérisoires qu’on leur verse malgré les sacrifices consentis pour la Nation. En soi, le problème vaut qu’on s’y attarde. C’est à rien de moins qu’une mise en crise du mythe méritocratique que s’attellent nos compères. Cependant, il manque à Triple frontière une profondeur critique. Une profondeur qu’aurait pu apporter la réalisatrice de Detroit, Zero Dark Thirty (aussi ambigu soit-il) et Démineurs. Trop préoccupé par la conduite de l’action, J. C. Chandor loupe le coche en ne remettant pas en cause l’hyper-valorisation de la chose militaire par les personnages. À trop coller au contact d’anti-héros, la fable s’imprègne de leurs discours et se fait le porte-parole de ceux qui souhaiteraient poursuivre l’aventure impérialiste et s’en mettre plein les poches.
Une masculinité sur le pied de guerre
Contrairement aux films de Bigelow, qui remettent en question le modèle martial masculin, Triple frontière ne déconstruit pas la parole monolithique des compagnons d’armes. Aussi désespérés paraissent-ils, les cinq incarnent une certaine virilité patriarcale, dominatrice et violente. Le choix des acteurs renforce cette ligne masculiniste. Ben Affleck, qui n’en est plus à une autopromotion près ; Garrett Hedlund, vu dans Un jour dans la vie de Billy Lynn, où il tient un rôle beaucoup plus délicat ; Charlie Hunnam, qui faisait mumuse dans la nouvelle version du Roi Arthur ; Oscar Isaac, star en vogue à Hollywood ; et Pedro Pascal, dont on se rappelle tous la fin tragique en tant qu’Oberyn Martel dans Game of Thrones… Bref, un casting peu suspect de complaisance féministe ou de trahison à la virilité.En somme, Triple frontière stagne entre le niveau intellectuel auquel J. C. Chandor aspire et la platitude de sa mise en scène et de la caractérisation de ses personnages. Entre prétentions et prétentieux, il n’y a qu’un pas à franchir. Et la dream team du film le franchit aisément.
Triple frontière. Triples buses ?
Triple frontière, J. C. Chandor, 2019, 1h53
Maxime
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