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On m'appelle Enfant I

Par Capocapesdoc
On m'appelle Enfant I On m'appelle Enfant I

Steve Tasane

Gallimard Jeunesse - 2019

Je remercie la communauté Leclerc pour l'envoi de ce livre.

Voici un roman original, un roman bouleversant, un roman émouvant.
" On m'appelle Enfant I " est une histoire sur le thème des migrants, des réfugiés. Mais pas seulement. Ce n'est pas l'histoire de personnes qui partagent leur trajet, depuis leur pays d'origine jusqu'à une possible terre d'accueil. C'est une histoire qui se passe dans un camp de réfugiés.


L'objet-livre :
J'ai d'abord été surprise par la couverture du livre. En effet, la première page du roman commence dès la première de couverture. Pas de mention du nom de l'auteur, ni sur la première ni sur la quatrième de couverture. Il faut aller en fin d'ouvrage pour découvrir son nom, et comprendre ses intentions d'écriture. Pas de mention d'édition non plus sur la première de couverture. Pas d'illustration non plus. Tout a été pensé pour surprendre et attirer le lecteur. Notre regard se porte sur le titre, écrit en lettres manuscrites, de couleur dorée. Puis un petit dessin d'une figurine. On comprendra la référence en lisant le livre. Et ensuite, la première phrase du roman, elle aussi en lettres manuscrites, en gras. Elle nous attire, elle nous invite à la lecture. Et on continue de lire les quelques phrases suivantes, toujours sur la première de couverture. A ma première lecture, je n'ai pas compris de suite qu'il s'agissait du début du roman, car l'on trouve parfois des phrases extraites d'histoire sur les premières de couverture. J'ai donc tourné la page et quel n'a pas été mon étonnement de ne pas trouver de page de titre à l'intérieur du livre. J'ai d'abord cru à un problème de mise en page, je pensais que la conception avait été mal réalisée. Puis, je me suis aperçue que c'était voulu et tant mieux ! On se plonge directement dans le livre et dans l'histoire de ce jeune enfant.


L'histoire et mon avis :
La quatrième de couverture propose ce texte d'accroche : " Je ne vous raconterai pas mon histoire passée, plutôt celle de ma vie maintenant, ici, au camp, en commençant par aujourd'hui. Mon histoire débute ainsi..."
A travers les mots de Steve Tasane, c'est l'histoire d'un enfant de dix ans, sans papier et sans famille, comme celle de tant d'enfants dans des camps de réfugiés. Pour autant, l'auteur ne nomme à aucun moment les mots réfugiés, passeports, papiers, fuite, pays, religion... Ce sont des termes poétiques qui sont utilisés, comme par exemple "Le livre de vie" pour évoquer le passeport. Presque aucun personnage n'a de prénom. Quelques adultes en possèdent, comme Charité, dont le nom évoque tout le caractère de la jeune femme envers les enfants. Les enfants, eux, sont cités par des lettres. Le jeune narrateur est " I ", ses amis sont M, E et R. Les chapitres de l'histoire reprennent d'ailleurs les lettres des personnages présents tout en formant des mots évoquant le thème principal des chapitres : ainsi, le chapitre, M, I E pour évoquer le passage sur la recherche perpétuelle de nourriture, et notamment de mie de pain. L'auteur explique d'ailleurs dans une lettre que j'ai reçue avec le roman qu'il a débuté ce roman suite au visionnage d'une vidéo trouvée sur Internet qui montrait deux très jeunes enfants syriens picorant des miettes de pain à même le sol dans la rue, dans un camp de réfugiés certainement. (lien de la vidéo : bit.ly/2VwiGto).
Il ne reste rien du passé du jeune garçon. Il ne s'en souvient que très peu, et n'a pas forcément envie de se le remémorer. Il décide de nous raconter son quotidien, pour survivre et exister. Malgré la misère du camp dans lequel il vit avec ses camarades, dans la boue les jours de pluie, dans les courants d'air les jours de froid, l'enfant I nous raconte ses petites joies optimistes, et tente de vivre chaque jour un peu mieux que les précédents. Les thèmes principaux dans ce livre sont donc la quête d'identité - comment exister lorsque l'on est réduit à une lettre, que l'on n'a ni carte d'identité ou passeport, ni photos, ni souvenirs ?, la recherche de nourriture - les épisodes sur les miettes de pain, la cigogne et les baies sont tour à tour poignant, empreint de peur (l'enfant va-t-il se faire attaquer par l'oiseau ?) et d'inquiétude (les baies sont-elles comestibles ?), l'humanité et la solidarité. En effet, les gardes représentent l'autorité militaire et sécuritaire, la justice et l'ordre, mais aussi la crainte et la peur. Charité représente la maternité, la bienveillance et la tendresse. Les enfants forment, les uns pour les autres, une famille, une famille universelle dans le sens où le monde de l'enfance est connu et partagé par tout un chacun. La solidarité prime avant tout.
J'ai aimé cette façon de parler de la vie des camps, presque irréelle et pourtant si vraie. L'auteur a réussi à nous faire partager le quotidien extrêmement difficile de ces enfants tout en nous faisant sourire par leurs agissements innocents, tels le jeu. Nous voyons ainsi les enfants jouer aux agents secrets, jouer à cache-cache, jouer avec les figurines repeintes pour l'occasion et pour donner un sens nouveau et plein d'espoir aux enfants, apprendre à écrire aussi.
Le roman est écrit d'une telle manière qu'il ne nous amène jamais vers le pathos. La poésie et l'esprit des enfants, proche de la naïveté, nous permettent de mieux apprécier la profondeur de l'histoire. Quelques extraits joliment écrits par l'auteur sont touchants de poésie :

En conclusion :
Je dirais que ce livre est une vraie leçon de vie, très émouvant, presque philosophique. Malgré une vision sombre, l'histoire est aussi pleine d'espoir. Un roman qui malgré tout manque un peu de contenu, je crois que j'aurais aimé rester encore un peu aux côtés de ces enfants pour en savoir plus, découvrir davantage leurs personnalités.
Une très belle lecture néanmoins, sur l'amitié, la solidarité et l'entraide, l'espoir, le droit des enfants, la migration et l'identité, la mémoire et la séparation, la fraternité et l'humanité.


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