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Macron joue gros

Publié le 22 mai 2019 par Jean-Emmanuel Ducoin
Macron joue gros

A vouloir réduire cette élection européenne à un duel entre lui-même et Marine Le Pen, allant jusqu’à usurper l’expression de «progressiste», le président est en partie responsable de sa situation et assez comptable de l’ampleur de l’abstention qui se profile à l’horizon.

Ainsi, plus d’un Français sur deux qui s’exprimera dans les urnes, dimanche 26 mai, aura pour première motivation de «sanctionner» Emmanuel Macron. Peine perdue: campagne ratée. Non seulement Jupiter n’a rien résolu à l’ambiguïté de ses deux premières années de mandat née d’une «effraction», selon son propre mot, mais sa liste «Renaissance» pour laquelle il s’implique tant est devenue une sorte de chiffon rouge qui pourrait se solder par un «carton rouge». Tout dans la dernière séquence le démontre: à vouloir réduire cette élection européenne à un duel entre lui-même et Marine Le Pen, allant jusqu’à usurper l’expression de «progressiste», le président est en partie responsable de cette situation et assez comptable de l’ampleur de l’abstention qui se profile à l’horizon. À quoi joue-t-il? À utiliser l’idiot utile du système: l’extrême droite. Que joue-t-il? Sans doute le reste de son quinquennat et le peu de légitimité politique encore à son crédit. D’autant que ce scrutin s’avère rarement favorable au pouvoir en place. Une simple vérité s’impose donc: si «sa» candidate, Nathalie Loiseau, n’arrive pas en tête, l’échec rejaillira sur lui. Il en sera personnellement responsable. Son ministre Bruno Le Maire ne l’a pas caché: seule une victoire de la majorité «permettra de redonner un élan à la politique du gouvernement»…

 

Rappelons que les mesures de Macron pour tenter d’éteindre le feu des gilets jaunes ont été si dérisoires qu’elles n’ont en rien calmé l’hystérisation de la vie politique, due à ce sentiment que le pouvoir n’a pour seul objectif que de décourager le mouvement social. N’oublions donc pas la désillusion du « grand débat » et le risque considérable pris par le président vis-à-vis d’une opinion incandescente. Pas seulement pour lui, mais pour la démocratie, puisqu’une logique mortifère peut toujours jaillir du chaos. Ian Brossat, à la tête d’une vraie liste «carton rouge» à Macron, a bien raison quand il déclare souhaiter que la gauche retrouve vite «le chemin de l’unité et du rassemblement», sur des bases fermes et sociales, pour que «le débat politique ne se limite pas à un affrontement entre les fachos d’un côté, les libéraux d’autre part». Il faudra un peu de temps, c’est certain. Mais cela peut commencer dès ce dimanche.

[EDITORIAL publié dans l'Humanité du 23 mai 2019.]


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