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Démêler l’infaux du vrai

Publié le 10 septembre 2019 par Marianne Dekeyser @IDKIPARL

Démêler l'infaux du vrai

"La liberté d'opinion est une farce si l'information sur les faits n'est pas garantie et si ce ne sont pas les faits eux-mêmes qui font l'objet du débat" Hannah Arendt, La crise de la culture, Gallimard 1972
En partant en vacances, nous avons tous fait intellectuellement ce geste informatique "CTRL+ALT+SUPPR" pour permettre à nos cerveaux échauffés par l'année de se régénérer ou, tout du moins, de se reposer de l'info et de l'infaux, alias "fake news" ou post-vérité, rumeur, propagande à peine déguisée qui crée une logorrhée en boucle sur les réseaux.

Pour ce deuxième innogram de Rentrée, il semblait donc impossible de ne pas parler d'infaux, tant elle est partout et existe pourtant depuis longtemps comme nous le rappelle une excellente exposition en ligne et en affiches de la Bnf " Histoires de fausses nouvelles ".

Comment s'y repérer dans ce "plus vrai que vrai" et aiguiser son oeil critique, tel est l'enjeu pédagogique de cette "rétrospective" éclairée et éclairante.

Plus largement, quelles solutions les réseaux peuvent-ils trouver pour remettre un peu de vrai dans le faux et "garantir les faits sur l'information" ? Cet été de grands acteurs du net ont, semble-t-il, eu une révélation, certains parleront de Lapalissade. L'innovation relève aussi parfois du bon sens retrouvé : Facebook s'est en effet rappelé qu'il existe un métier garant de la "bonne" information, les journalistes... ça c'était une info 😉

A côté de l'infaux, j'avais surtout envie de vous parler de l'entrefilet en cette Rentrée. Ces articles qui passent... souvent inaperçus, surtout en été.

C'est court mais c'est bon...l'autonomie en deux mots ou la transformation par la décision, pas par l'addition

Mary Barra, PDG de General Motors a résumé la politique de tenue vestimentaire de 10 pages en deux mots (chez GM) : "Dress appropriately" ou "Habillez-vous de manière appropriée". Finalement qu'est-ce que cela change cette "petite" phrase dans cette grande entreprise ?
D'après Mary Barra cette décision a été libératrice : "si vous avez beaucoup de politiques et procédures trop normatives, les gens les respecteront ; mais si vous laissez les gens se les approprier par eux-mêmes - en particulier au niveau collaborateurs, cela les aidera à se développer "
En interne, certains managers ont jugé que c'était...un peu court 😉 mais la jouent "corporate" (voir le détail de l'article référent sur Quartz at work)

Cette initiative nous pose deux questions simples :

Quelles politiques/pratiques pourriez-vous mettre en œuvre pour renforcer l'autonomie de vos équipes ?

Par contraste, cela requiert également de requestionner par exemple des valeurs qui sont souvent définies de façon simple et pourtant peu appliquées au quotidien,
(si elles ne sont pas traduites en termes de comportements). Chez Atlassian, un des éditeurs leaders de logiciels et solutions pour la gestion de projets collaboratifs, ils ont opté pour une approche hybride du sujet : combiner valeurs et comportements autour de 5 phrases qu'ils réajustent tous les six mois environ, pour rester pertinents. Je ne traduirai pas les 5 phrases atlassiennes suivantes car le niveau de compréhenson me semble accessible à toutes et tous :
> Open company, no bullshit
> Build with heart and balance
> Don't #@!% the customer
> Play, as a team
> Be the change you seek

La fin de la récré en innovation

L'article ne date pas de cet été mais il mérite d'être remis en lumière : Guillaume Borie le Directeur de l'Innovation chez Axa partageait en février dernier la nouvelle stratégie d'Axa : finis les hackathons, les MVP, la stratégie des petits pas... place aux projets de développement resserrés et ambitieux.
Guillaume Borie lève le voile sur le vrai de l'infaux qui a circulé dans le monde de l'innovation depuis plusieurs années maintenant (personne n'est épargné): toutes les entreprises ont pensé que ces approches allaient permettre de réinventer leur activité, leur marché...sans prendre de risque en amont, sans se poser de questions audacieuces au départ, sans bousculer leurs représentations de marchés et clients. Car le premier concurrent d'une entreprise, c'est elle-même : son cadre de référence qui lui permet ou non de penser qu'autre chose est possible, pas son marché, ni ses concurrents.
La réalité ou l'info c'est que les hackathons and co sont de formidables initiatives pour développer la transversalité et se mettre dans un état d'esprit innovation mais rarement pour inventer les marchés de demain. Tout le monde y a cru, sans y croire !

Accélérer ou ralentir telle n'est peut-être pas la question : et si on abolissait le temps ?

C'est ce que propose l'île de Sommarøy en Norvège, qui veut être le premier endroit du monde à supprimer l'heure.

" Il est clair qu'il s'agit de business ", estime CNN. L'île a bien sûr tout à gagner à se présenter comme un refuge où non seulement l'été est infini, mais où le temps ne compte plus.
Infaux ou non ? Toujours est-il que cela interroge sur notre rapport au temps. Cette relation d'amour (quand nous prenons le temps) et de haine (quand il nous fait défaut) nous aimons la reformuler ainsi avec le RX-THINKING© "Et si on arrêtait de massacrer le temps ?"
En cette Rentrée, se poser cette question ne sera peut-être pas totalement une perte de temps 😉

Copenhague incarne la nouvelle pensée "Puissance 10" prônée par Google ou comment penser grand, vite et avec impact
"Notre maison brûle. Littéralement" telle est la célèbre phrase de Jacques Chirac réadaptée par Emmanuel Macro pour fixer le cadre du G7 fin août à Biarritz.
Copenhague prend le problème à bras le corps : alors que la plupart des villes cherchent à atteindre la neutralité carbone d'ici 2020 ou 2050, Copenhague se lance le défi d'y être en 2025. A l'instar de l'approche innovation Google ou la " pensée puissance 10" qui invite à définir une problématique à résoudre qui va automatiquement engager la rupture :
Exemple de questionnement innovation "classique" avec la voiture "Comment améliorer ou imaginer la voiture de demain"
Exemple de pensée "10x" avec la voiture autonome mais "comment garantir une expérience inédite aux conducteurs, qui enlève tous les désagréments de la conduite : risque d'accidents, fatigue, perte de temps...)
La voiture autonome balbutie encore mais la question de départ a permis de changer le prisme d'une voiture de demain et de développer des projets à impact (détaillé dans l'autre entrefilet ci-dessous).

Donner du sens fait-il sens sans projet à impact ? ou comment "délivrer du sens" ?

Nous applaudissons ces "Trente quatre multinationales qui se sont engagées contre les inégalités" portés par la volonté de développer notamment des business modèles plus inclusifs. Certains de ces acteurs ont montré des premières preuves tangibles d'engagement notamment en soutenant ou en adoptant le nouveau statut d' entreprise à mission.

Tout le monde attend la "grande bascule", ce moment où l'inclusif ne sera pas réservé aux pays dits émergents et où la circularité ne se traduira plus par du "plus cher" mais par "accessible à tous".

Les "méthodes" actuelles permettent d'ouvrir réellement la réflexion, que ce soit au travers de la norme AFNOR XP X30-901 qui vise à guider les entreprises dans leur démarche circulaire en croisant les trois dimensions du développement durable (environnement, économie, sociétal) et les sept domaines d'action de l'économie circulaire : approvisionnement durable, écoconception, symbiose industrielle, économie de la fonctionnalité, consommation responsable, allongement de la durée d'usage, gestion efficace des matières, produits en fin de vie ou en se fixant comme point de repère stratégique les ODD ( Objectifs de Développement Durable).

En revanche, si vous animez des ateliers de réflexion stratégique sur ces sujets, l'info c'est qu'il y a un gros bug de modèle appliqué qui ne peut pas permettre la diffusion d'une réflexion systémique et élargie à d'autres acteurs. Le business modèle à impact reste aujourd'hui un business modèle canvas "augmenté" d'une ligne ou de deux lignes "People" et "Planet" avec quelques nouveaux flux "intégrés".

Je me suis donc amusée à compulser tous les business "modèles" à impact utilisés aujourd'hui en scrutant les meilleures sources officielles et articles de Recherche à date. Ma conclusion et mes nouvelles pistes de réflexion : il y a aussi urgence à ne plus raisonner au travers de 9 cases carrées en matière de circularité 😉 pour aider toute organisation à "délivrer du sens", à inverser les logiques : demain il faudra capter la confiance avant de capter la valeur, et capter la valeur signifiera certainement la co-construire.

Quand Ikea inspire le monde de demain
Les entreprises ont un rôle étendu à jouer demain (cf. supra) ; ce rôle peut aussi être inspirationnel, c'est l'exemple d'Ikéa, qui n'est pas qu'un catalogue à consulter... pour un oeil averti ! En effet, la marque édite depuis plusieurs années une étude internationale pour mieux comprendre ce que les gens attendent de leur maison, aujourd'hui et demain. En 2018, l'entreprise suédoise a réitéré ses investigations en sondant 22.000 personnes dans vingt-deux pays que vous pouvez consulter ici : le rapport Ikea Life At Home 2018
Au-delà de la maison, cette étude nous parle de comment chacun habite l'espace et les relations, de la convivialité, de la famille, de la solitude, de la technologie, des repas, du dedans et du dehors, de la vie... Pour avoir utilisé plusieurs fois leurs études comme introduction à un atelier de réflexion stratégique, je peux témoigner de "l'effet propulseur" du contenu. Pour vous faire votre idée, je vous invite à creuser cet entrefilet quel que soit votre sujet technologique, expérience clients, R&D, services, RH...à vous laisser inspirer par les modes de vie de demain

La fin des leçons ou comment la Chine veut nous apprendre à apprendre : bienvenue dans le monde de l'éducAItion !

La Chine a apparemment commencé une grande expérimentation sur l'AI et le domaine de l'éducation. L'impact ? Les résultats pourraient redessiner complètement la façon dont le monde apprend. En lisant l'article vous aurez l'impression que les MOOCS remontent à l'âge de glace 😉

Si je résume en effet l'article de la MIT Technology Review, la Chine a désormais trouvé le tuteur idéal pour une société intelligente : une startup du nom de Squirrel, basée sur l'intelligence artificielle et le deep learning qui permet de proposer un tutorat ultra personnalisé aux étudiants avec une performance implacable.

Cette solution qui vivait jusqu'à présent comme un modèle "parallèle" au système éducatif chinois veut rentrer dans les cours d'écoles chinoises et bientôt internationales avec sa solution Squirrel mais aussi avec des professeurs avatars pour proposer le saint Graal l'enseignement de masse adaptatif et personnalisé.
Que deviennent les enseignants dans cette nouvelle configuration ? Des techniciens de salle qui pilotent et programment...
L'article doute de la généralisation de l'approche en rappelant les enjeux des "soft skills" ou "compétences-coeurs" qu'appelle le 21ème siècle : créativité, collaboration, esprit critique...
Il n'empêche que sur cet enjeu, il va falloir penser vite, grand et avec impact pour savoir rester non pas intelligents mais humains ... et un peu imparfaits.

Prochain et dernier innogram : les 4 enjeux de réflexion stratégique Imagination Augmentée, Data, Circularité et Moments


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