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Le salon de l’agriculture: Plaque tournante du « farmerwashing »

Publié le 11 février 2020 par Le Parallèle

Le Salon International de l'Agriculture se tiendra du 22 février au 1er mars 2020 à Paris. L'occasion pour le public de se reconnecter avec le monde paysan. L'an dernier, le salon avait accueilli un peu plus de 600 000 visiteurs venus rencontrer 1400 éleveurs et 4000 animaux. Aux côtés de petits producteurs seront présents de gros industriels et lobbys du monde de l'agriculture se servant du Salon pour redorer leur image.

L'élevage français : 80% d'élevage intensif

Alors que 90% des français s'opposent à l'élevage intensif, ce type d'élevage représente pourtant encore 80% des fermes françaises. Après la Seconde Guerre Mondiale, et pour répondre aux besoins en nourriture des français, les animaux ont été progressivement enfermés en bâtiment puis en cage. Les fermes sont restées familiales en se transmettant de génération en génération, mais elles n'en sont pas moins devenues de réelles entreprises où le rendement est passé avant le bien-être animal. Malgré certaines améliorations ces dernières années au niveau de l'Union Européenne concernant le bien-être animal, avec par exemple une obligation de fournir aux animaux une certaine quantité de lumière ou encore l'enrichissement de l'environnement, la France continue de rejeter les améliorations proposées qui feraient pourtant taire les opposants au modèle agricole actuel. En septembre 2018, la loi Egalim qui visait entre autres, à installer la vidéo surveillance en abattoir et interdire l'élevage de poules en cages, a été rejetée par le Sénat. La France figure donc parmis les mauvais élèves concernant le bien-être animal en élevage, malgré son agriculture primée comme étant "la plus durable du monde" selon The Economist.

Le Salon International de l'Agriculture : David contre Goliath

Au Salon de l'Agriculture de Paris, les petits producteurs côtoient les coopératives, entreprises, et lobbies qui les étranglent. Parmi les exposants de l'édition 2020, nous pourrons compter sur Interbev, la FNSEA, la coopérative Evel'Up ou encore McDonald's. Tous acteurs de l'industrialisation de l'élevage, ayant poussé les éleveurs à s'endetter pour produire toujours plus tout en continuant à baisser leurs prix, quitte à vendre à perte. Evel'Up, numéro deux du cochon en France, est la coopérative à travers laquelle transite pratiquement tout le porc de Bretagne. C'est l'intermédiaire entre l'éleveur et l'abattoir, elle négocie le prix du porc au kilo. Et l'éleveur qui veut avoir accès à l'abattoir proche de chez lui, pour ne pas que ses animaux soient stressés par un long voyage, est obligé de passer par la coopérative sans poser de questions. La FNSEA est le syndicat agricole qui a accès à l'Assemblée National, au Sénat ainsi qu'à l'Élysée. Ses manifestations violentes où ils déversent des excréments et saccagent l'espace public leur valent d'être reçus par le Ministre de l'Agriculture ainsi que le Ministre de l'Intérieur. La FNSEA utilise cette influence pour refuser toutes les demandes pour plus de transparence sur ses pratiques d'élevage, et continuer à promouvoir l'industrialisation de l'agriculture avec l'utilisation massive de produits phytosanitaires, ainsi que l'enfermement des animaux en dépit de leurs besoins naturels, et détruit les plus petits paysans au profit de gros groupes d'élevage. Cette non transparence est aussi défendue par Interbev, lobby de la viande, qui ne fait que poser des labels sur les barquettes sans que de réelles mesures concernant la qualité du produit, ainsi que pour le bien-être des animaux ne soient prisent.

Pourtant, ces géants de l'industrie agro-alimentaire seront bel et bien présent aux côtés de petits paysans ayant fait le déplacement pour présenter leur production au plus grand nombre. Ces paysans qui n'existeront peut-être plus demain, malgré l'affection que les français leur portent. Ils se retrouvent noyés par les différents intermédiaires qui les poussent à produire plus, donc s'équiper des dernières technologies pour s'intensifier, pour un moindre coup, donc en supprimant un maximum de main d'oeuvre. Ils se retrouvent tués par l'automatisation et l'intensification, qui n'attendent pas ceux qui ne peuvent pas se permettre l'investissement ou ceux qui n'ont pas le terrain pour de nouvelles infrastructures.

L'intensification majoritaire de l'agriculture n'est pourtant pas ce que l'on voit au Salon International de l'Agriculture de Paris où les animaux sont présentés sur pays, l'image du petit paysan respectueux de l'environnement et de ses animaux y est promu, et les grandes firmes de l'agro-industrie se cachent sous cette image d'Epinal qui y est présentée en s'offrant une place pour leur stand que le salon leur loue entre 30 000 et 250 000€. L'intérêt de ces firmes est de se racheter une image auprès de la population française marquée par les scandales sanitaires de ces dernières années, mais aussi par les images clandestines tournées dans les élevages et abattoirs par des associations. Depuis quelques années maintenant, les marques comme Le Gaulois ou Fleury Michon mettent en avant les éleveurs avec leur portrait sur les barquettes ou les publicités, pour surfer avec avec l'image du paysan qui nourrit la nation qu'affectionnent tant les français.

Le salon de l’agriculture: Plaque tournante du « farmerwashing »
Ces photos d'éleveurs redonnent confiance au consommateur qui ne voient pas un PDG de grande entreprise, mais une personne lambda qui pourrait être leur voisin. Le Salon International de l'Agriculture n'est rien d'autre que la continuité de ces publicité. En se présentant aux côté des petits producteurs, les lobbies et entreprises, veulent donner une image proche de la terre et proche des paysans. Laissant entendre qu'ils sont là pour aider le monde agricole et ses agriculteurs en vendant leur production au meilleur prix, que s'il y a une si bonne entente ils sont tout aussi dignes de confiance que les petits paysans.


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