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Vie à vendre, de Yukio Mishima

Publié le 15 février 2020 par Francisrichard @francisrichard
Vie à vendre, de Yukio Mishima

Yamada Hanio fait une tentative de suicide en avalant une quantité massive de somnifères. Sur son lit d'hôpital, cet employé honnête et zélé de l'agence Tôkyô Ad' se souvient pourquoi.

Un soir, rentré chez lui, alors qu'il lit son journal, il s'est avachi sur sa table et les pages du milieu sont tombées à terre. En se penchant pour en ramasser une, il voit que sur celle-ci se tient un cafard.

La ramassant, il voit que la bestiole se faufile entre les caractères imprimés. Les ramassant toutes, il s'aperçoit en les parcourant que tous les signes qu'il veut lire se transforment en cafards. 

Il se dit: Puisque tous les caractères du journal se sont changés en cafards, ça ne vaut plus la peine de vivre... C'est ainsi que l'idée de"mourir"  [s'est] tout naturellement installée dans sa tête.

Une fois sorti de l'hôpital, il donne sa démission à Tôkyô Ad', qui lui alloue une forte indemnité de départ, et il fait paraître l'annonce suivante dans la rubrique Offres d'emploi d'un canard:

Je propose une vie à vendre. A utiliser à votre guise. Homme, 27 ans. Confidentialité garantie. Aucune complication à craindre.

Il fait suivre cette annonce insolite de son adresse et accroche sur la porte de son logement une affichette sur laquelle est inscrit en lettres élégamment calligraphiées: Life for sale - Yamada Hanio.

Vie à vendre de Yukio Mishima, roman inédit en français (il a paru au Japon, en 1968, en 21 livraisons dans la revue Shûkan Purebôi), est le récit des ventes de la vie de Hanio à des clients successifs.

(Au début, pour souffler entre deux missions, il retourne l'affichette accrochée sur la porte de son logement où l'on peut lire: Rupture momentanée des stocks...)

Le héros de Mishima pense qu'au commencement tout est vide de sens et qu'il faut partir de là pour donner du sens et de la liberté à sa vie. Et jamais, au grand jamais, s'embarquer dans le processus inverse...

Ainsi, pendant les tribulations improbables que l'annonce de Hanio lui fait traverser, la peur de la mort qui le tenaille quand il fuit sans but, s'éloigne-t-elle de lui quand la mort semble inéluctable:

Dans le fond, le plus effrayant aux yeux de l'homme, c'est l'incertitude... Il suffit qu'il se dise Ce n'était que ça? pour que la peur s'estompe aussitôt.

Francis Richard

Vie à vendre, Yukio Mishima, 272 pages, Gallimard (traduit de japonais par Dominique Palmé)


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